Xylophagies Macronésiennes
Cette réthorique là est étudiée, connue et analysée. Toute une partie de la culture et de l’intelligence s’y consacre, pour notre plaisir, notre élévation et aussi notre clairvoyance.
Pour commencer, on se réfèrera à http://g-langue-de-bois.fr/ dont le générateur, du premier coup nous produit ça:
« la dynamique vertueuse fait ressortir le réel attrait d’un rassemblement des conditions de base pour construire sa vie et envisager son avenir. »
Au détour d’un raid sur le twitter de Macron, j’ai réalisé la profondeur de l’absurde langage de celui que les sondages annoncent gagnant. Comme en fait ils annoncent un état de l’opinion avec une bonne moitié d’indécis, il convient de tenter de dire à ceux là ce qu’on pense de leur hésitations… Car les commentaires des saillies du monsieur sont partiellement accablants: bien souvent tout passe inaperçu.
Bien sur pas pour tout le monde, la chaine Youtube ridiculeTV: https://www.youtube.com/channel/UCIu1KhZAvIiujTIgNAz22sQ parait il faite par des fillonistes (des talentueux vidéastes fillonistes) offre un florilège incroyable de macronneries indicibles.
Il faut citer, et notamment les perles les plus belles. Elles sont constituées de fragments de discours en forme de slogan, que l’on peut reprendre dans sa tête ou retweeter, tout simplement. Toutes candidates à un passage par « ridiculeTV », avec des commentaires du Camelot d’Alexandre Astier pour en dénoncer le vide de sens, sous la critique de la grosse reine qui elle y est sensible, on peut les collectionner.
On a ainsi sur ce compte twitter là le plus remarquable amas d’exemples de la langue de bois la plus grasse, la plus construite, la plus dénuée du moindre sens autre que sa fonction: stupéfier, terrifier, perturber. Car l’acceptation de ces absurdités change l’auditeur et c’est le rôle de ce type de parole: dominer, essentiellement. C’est en cela que ce type de discours, inventé et mis en pratique par tous les socialismes et en fait, et oui, fasciste.
Le mot peut sembler fort pour désigner le successeur de Hollande, le timide freluquet qu’on pourrait croire efféminé, chienchien à sa mémère. Il ne l’est pas: ses fadaises centristes sont un refus profond de tout débat, de toute opposition, de toute politique en fait. Il ne veut rien faire et l’imposer à tous au nom d’un consensus sous son autorité qui est le propre du fascisme, lui seul pouvant donner sens à la destruction totale du sens, qu’il organise avec son langage truqué.
Il hérite ainsi de ses mentors dont Ségolène Royal, son soutien discret n’étant pas douteux en est un, la capacité d’émettre le langage frelaté de la fausse connivence politiquement correcte. C’est la plus horrible chose qui soit au monde, la plus destructrice du lien social et symbolique qui unit le citoyen à l’Etat. On l’a vu cinq ans et cela veut continuer à tout prix, il est là pour ça et il fait le maximum.
Il faut noter que l’aspect absurde voire délirant de la démarche s’est accentué depuis le premier débat, on atteint ainsi maintenant (début avril 2017) régulièrement des sommets et cela se voit ici.
Voyons voir la collection.
Une constante, l’adjonction pour faire sens de plusieurs (au moins deux) significations distinctes juxtaposées qui semblent se renforcer l’une l’autre. Trois cas suivant que les deux significations se contredisent, se répètent ou tout simplement n’ont rien à voir.
Par exemple:
« Je défends l’ouverture et l’esprit de conquête. » Rien à voir.
« Nous allons sortir du passé qui ne veut pas passer. » Se contredit.
« La société est formée à moitié de femmes et à moitié d’hommes ». Evidence
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Le multiple ne nuit pas. A partir d’un terme, ou d’un thème, on peut tripler la dose:
« l’emploi des autistes sera encouragé par une reconnaissance des entreprises inclusives. »
« Nous allons sortir des divisions, sortir de la Françafrique, sortir de tout ce qui nous a tués. »
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Parfois, l’articulation des qualificatifs les renvoient les uns aux autres, par exemple dans le très réussi:
« J’ai décidé de franchir une nouvelle étape pour aider la France à se transformer elle aussi. »
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Une constante, la nuance qualificative. Une affirmation doit être paradoxalement qualifiée par son contraire pour la nuancer et en établir la mesure. Bien sur cela en modifie substantiellement la portée et souvent prête à rire car précisément cela détruit le sens global, en montrant une volonté de dire « tout et son contraire » c’est à dire d’accorder à tout prix des contraires.
« Nous aurons une politique de tolérance zéro : à l’égard de la délinquance et à l’égard des abus des autorités policières ».
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Ici on l’introduction du quantitatif (le doublement) mais dans un domaine qu’on ne peut établir que qualitativement (le manque): une merveille:
« Protéger, c’est aussi soigner. Je veux doubler les maisons de santé partout où le soin manque. »
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Une constante: le « nous » qui alterne avec le « je » des exhortations, il est descriptif et généralement transforme la foule en quelquechose:
« Nous sommes le projet qui protège les Français. »
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Une magnifique double adjonction en forme d’écho; le « rien à voir » est ici doublé:
« 50 milliards d’euros pour investir dans le numérique et l’écologie. Pour changer nos manières de produire, de consommer. »
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Une figure triple avec double don, qui plus est redoublé:
« Nous redonnerons de l’espoir par le pouvoir d’achat. »
Qui complète harmonieusement le:
« Nous redonnerons de l’espoir par la culture. Elle est ce qui nous fait peuple. »
et aussi :
« La France a besoin d’espoir et nous ramènerons l’espoir par l’école ! »
et aussi:
« Nous redonnerons de l’espoir par le sport. »
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Les allusions sexuelles. Contrairement à ce qu’on pourrait croire, il y a du sexe chez Macron, mais sous une forme cachée délicatement masturbatoire:
« Un lien pour recréer la sève de la République et ses principes. C’est la force des patriotes. »
« Nous sommes l’alternance profonde »
« Il faut créer un nouveau rapport à l’autorité et à la police. Je créerai une police de sécurité quotidienne. » (ici le rapport quotidien en plus à l’autorité, fait sens).
« Je mets mon énergie à faire plutôt qu’à durer ! »
« Nous allons porter l’alternance véritable qui rassemble des femmes et des hommes jusque-là divisés. »
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Parfois, on passe dans le néologisme, mais qui évoque un soupçon: ici par exemple, disposer de deux langues a un coté sexuel, ou mensonger, en tout cas, vaguement inquiétant, les « humanités » renforçant le coté bi… Notons bien que bilangue n’est pas bilingue.
« Je veux rétablir les classes bilangues, je veux rétablir l’enseignement des humanités. »
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Une belle répétition (le slogan est martelé régulièrement) qui avoue la responsabilité (il était au pouvoir les 5 dernières années) et aussi l’irresponsabilité (il ne l’était pas avant):
« Nous allons tourner la page, non seulement des 5 dernières années, mais des 20 dernières années. »
Les allusions à ce que suscite un tel langage sont parfois fièrement provocatrices, quitte à être un peu douteux:
« Nous sommes l’alternance profonde : c’est pour cela qu’ils nous détestent autant, mais c’est pour cela que nous gagnerons ! ».
Le charme du ni droite ni gauche contradictoire atteint parfois des sommets:
« Cela fait 20 ans que nous sommes bloqués par le balancier permanent entre la droite et la gauche. »
Bloqué par un balancier ! Il fallait y penser.
En économie, le principe du rapprochement entre les deux directions du monde s’applique aussi:
« Il faut réconcilier ceux qui investissent et ceux qui travaillent. »
Parfois le constat est sévère, voire paradoxal au point d’être gênant: faut il éviter d’aller à l’école, voire de fréquenter des professeurs ?
« Aujourd’hui l’école creuse les inégalités de départ ! »
Le pléonasme redoublé, il fallait y penser et ça marche, cela se renforce, même:
« Nous devons parler d’orientation plus, et plus tôt. Faire venir des professionnels à l’école, présenter leurs métiers. »
Délicate opposition entre des comparables, avec un soin laissé à la formation du sens qui force l’admiration:
« Le vrai clivage de cette campagne est entre les patriotes et les nationalistes. »
Car il faut vouer le nationalisme (« le nationalisme c’est la guerre ») au gémonies.
Il faut creuser davantage et vraiment. Sans craquer:
« Je recréerai un véritable creuset national. »
« Le service civique, l’apprentissage… il faut multiplier les voies qui permettent aux jeunes de sortir des sentiers battus ! »
Ainsi donc on va multiplier les sentiers battus pour en sortir!
Une triple adjonction, le sel étant donné à tout ce qui ne compare pas:
« On doit redonner du sel à un engagement, à de l’ouverture. »
Certaines conclusions sont paradoxales et attirent l’attention:
« On a un paradoxe français : on n’aime ni la réussite ni l’échec ! Il faut dédramatiser l’échec. »
Cette priorité donnée à l’échec est un effet. Prémonitoire sans doute.
Là on a une figure en forme de double sens évident: qui mieux que les enfants des quartiers pour… ?
« Qui mieux que les enfants de la République comme ambassadeurs des quartiers ? »
On peut se trouver fasciné par les différentes modalités de l’action. Par exemple, ici, on peut compléter la mobilité ou bien l’entreprenariat mais l’assonance « mobi » domine:
« On facilite l’entreprenariat qui est un élément de mobilité économique et sociale. Il faut la compléter d’une mobilisation sur le terrain. »
Le baroque peut parfois mettre les voiles, à la proue de la volonté, le présent confirmera le futur annoncé en lequel, il faut le noter, on croit:
« Je crois à la croissance bleue. Elle passera par une politique d’innovation très volontariste dont l’Ifremer est la tête de proue. »
Parfois on dissipe des doutes. Le soin à l’agriculture (on avait pensé à l’oublier) sera à la fois permanent et fort. Le coté sexuel est indéniable.
« Oui, dans mon gouvernement, il y aura bien un Ministère de l’Agriculture. Il sera fort et à plein temps ! »
En parlant d’agriculture, au cas où les paysans n’auraient pas à s’occuper avec l’argent qu’on leur donne:
« Mon plan d’investissement pour l’agriculture permettra aux paysans de garantir le bien-être animal »
Sans parler de la sécu pour les bêtes:
« Je ne connais pas un éleveur heureux avec des animaux malades »
On trouve une tendance à récupérer le sens à son avantage mais en même temps, il y a quelque chose de forcé:
« Marine Le Pen vous désigne aujourd’hui comme son adversaire principal. – Elle a raison. »
En tout cas, on trouve, dans le langage, une volonté de nuance; le ni ni est patent:
« Je veux être un président engagé : ni suractif, ni en retrait. »
Parfois les priorités se multiplient, au point d’égarer: (elle est pas bonne celle là?)
« C’est par l’accessibilité que nous garantirons la participation de tous à la vie sociale. J’en ferai l’une de nos priorités. »
L’utilisation de l’anglais pour lutter contre les discriminations n’est pas à négliger:
« Nous lutterons contre la discrimination à l’embauche des personnes en situation de handicap en généralisant le testing et le name and shame. »
Le software c’est le hardware: « Il y en a qui pensent que quand on fait des choses par le numérique, ça n’existe pas. Non : le numérique, c’est du matériel. »
Au delà du sexuel il y a un sommet de politiquement correct, en fait limite:
« Le Premier ministre sera choisi sur des critères d’expérience et de compétences. J’aimerais que ce soit une femme. »
Un doublement classique:
« Il n’y aura pas de vraie relance sans une politique de relance européenne »
Encore un doublement, celui là pléonasmique, mais associant passé et avenir:
« C’est à partir de notre histoire commune que nous écrivons un avenir commun. »
On a aussi des passages d’idées, voire des communications sur les convictions, mais on ne peut s’empêcher de les masquer quelque peu.
Il y a dans certains choix politiques, par exemple l’abandon du paritarisme en matière d’assurance chômage, une franchise programmatique claire, pas si éloignée du revenu universel. Il n’en demeure pas moins que l’argument reste défaitiste:
« Le chômage est devenu un vrai risque social qui touche tout le monde et doit être financé par l’impôt. »
Mais il y a aussi, dans l’européisme forcené, de quoi faire peur si les allemands sont meilleurs que nous:
« L’excellence est tout sauf un gros mot. L’excellence dans l’école publique, c’est la vraie méritocratie européenne. »
Il y a aussi les aveux déguisés:
« Je suis contre la GPA. Je ne souhaite pas l’installer en France. »
Sa pratique encouragée hors de France satisfaisant les besoins, bien entendu.
L’adaptation est un thème important: quoi de mieux que les flexibilités pour s’adapter aux contraintes, tout cela est réuni.
« Les contraintes naturelles et géographiques de La Réunion supposent d’utiliser toutes les flexibilités. »
Il y a aussi les honneurs déjà rendus, mais qu’on renforce, quitte à innover:
« Je souhaite que soit rendu hommage à tous les anciens combattants. Pour eux, je recréerai le Mérite Combattant. »
Tout ce qui concerne le plus de mooooyens doit être renforcé:
« Il faut donner à la France les moyens d’une autonomie stratégique accrue. »
Pour finir la dernière phrase de son discours de conclusion lors du deuxième débat:
il faut « renouer avec un optimisme volontaire ».
L’expression, déjà utilisée par Hollande en 2012, a une variante « je suis un optimiste de la volonté ».
Il y a pire, voir même inquiétant, à la limite de la folie, sur le thème de la réconciliation:
« Pensez printemps mes amis, c’est réconcilier l’ambition et le réel »
« La réconciliation cohérente que je propose et le projet progressiste assumé sont de nature à réveiller des initiatives très fortes au niveau de la société »
Quadruple composition, l'expression "promesses non tenues", parce que venant spontanément à l'esprit, étant rejetée et imposée vicieusement en même temps:
"Je veux que l’Europe soit digne des promesses d’hier pour porter les promesses de demain."
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Certains slogans sont répétés: « L’alternance profonde » est présent dans plusieurs discours et tweets variés. Le qualificatif de profond pour désigner la « ternance » figure répétée trois fois sans doute, a, on l’a vu, une connotation sexuelle enthousiasmante. Elle est aussi sans doute une allusion au « gouvernement profond », le complotiste directoire à qui sans doute on veut s’allier, ou dénoncer, c’est selon…
Pour conclure, l’horreur de ces abominations soulève un tel dégout (cette expression là me parait douteuse, mais je la garde) que nous en sommes maintenant à la haine, et au refus d’un résultat défavorable de l’élection. Les tenants de cette saloperie prennent un risque et un sort funeste pour les tenants de l’alternance profonde est à prévoir si ça se passe bien pour eux. Tout, absolument tout sauf Macron.
(1) Sur le livre de Klemperer, https://germanica.revues.org/2464
(2) Une couverture du thème: https://www.cairn.info/revue-hermes-la-revue-2010-3-page-33.htm
(3) Philippe Murray avait prévu Macron ! http://www.lefigaro.fr/vox/politique/2017/04/05/31001-20170405ARTFIG00239-macron-fillon-debat-presidentiel-philippe-muray-avait-tout-vu.php
Commentaires
François Carmignola, où intervenez-vous sur le net ? Je ne vous vois plus et ai l'impression que vous ne fichez plus rien. Votre dernier commentaire sur lefigaro.fr remonte à il y a 5 semaines : c'est grave. Plus grand chose de votre part sur le blog de Verhaeghe non plus (moins grave car faible audience). Bougez-vous un peu SVP, il s'agit de gagner les législatives même si Baroin n'est guère motivant.
Je n'ai gardé de mon amour trahi pour le lâche Fillon que la haine de Macron et détruit tout le reste. Après avoir voté Le Pen et l'avoir hurlé sur Twitter tout ce que j'ai pu, je me prépare effectivement à voter LR aux législatives. Mais ma défaite totale me rend totalement incapable de prévoir l'avenir, en lequel d'ailleurs je ne crois plus. Baroin m'a sucré ma TVA sociale, et j'ai bien peur que ma CSG n'augmente...
Qui êtes vous?
Ah oui, je n'avais pas vu que vous étiez sur Twitter. Il me semblerait plus efficace de commenter sur les sites des "grands médias", même si d'après ce que je viens de lire Twitter permet une plus grande liberté d'expression.
Entièrement d'accord sur tout ce que vous dîtes.
Je suis un simple anonyme d'internet, sans blog ni compte twitter ni facebook.