Le débat fait rage. On parle même de référendum !
Quelques arguments sont évoqués ici (1). On parle de la loi en cours, rédigée, et à discuter. Atterrant.
Les arguments
Ce n'est pas une loi sur la fin de vie, car elle peut concerner des personnes qui ont des années à vivre, avec des soins retardateurs efficaces. C'est le cas des cancers progressifs, des charcots, des dialysés sévères etc: les "affections graves incurables" que les techniques médicales peuvent repousser la mort à plus de dix ans voire vingt ans. Des milliers de personnes sont dans ce cas.
Elle n'est pas encadrée, avec une procédure expéditive: 15 jours d'examen, et 48h pour réfléchir. Pas de collégialité, pas de psychiatre, ce qui pourrait paraitre étonnant: voudrait-on éviter tout ce qui pourrait remettre en cause le très volontaire suicide ? Serait ce criminel que de vouloir, comme pour l'avortement, dissuader le futur assassin de soi-même ?
On meurt mal en France, et le système de soins s'effondre. Pourtant, les soins palliatifs et les médicaments qui vont avec, fournissent une solution à la douleur des (vraies) fins de vie difficile. Ainsi, pour ceux entrés dans des unités de soins palliatifs, la demande d'euthanasie passe de 3% à dix fois moins très vite.
Or 1 demande sur 2 de soins palliatifs à des mourants n'est pas satisfaite: 2 à 9 mois pour obtenir la consultation, alors que la demande de suicide sera satisfaite en 15 jours. Une sorte d'appel au crime. Les terribles descriptions de personnes suppliant qu'on les tue et qui émeuvent tant les soi-disant "plus qu'humains" sont le fait de victimes de déserts médicaux.
La loi va ainsi créer une pression supplémentaire pour la demande de suicide faute de soins. Tout simplement. On obtiendra en 15 jours ce que des mois de procédures pour obtenir des soins palliatifs non disponibles sont incapables de fournir, quelque soit l'urgence.
Les EHPAD appauvris où meurent 25% des décédés sont remplis de personnes vivant dans l'inconfort de leurs urines et de leurs selles lavées une fois par jour. Cette loi, et le suicide qui a avec, est une solution à la cherté de cet environnement et aussi à l'inconfort qui va avec, de subir et de voir ces déchéances.
La psychologie du suicidé de cette loi sera celle des pauvres, en souffrance, seuls ou qui ne veulent pas être davantage à la charge de leurs proches ou de ce qui en tient lieu et à qui on offre une alternative qu'ils ne pourront, au final, refuser.
Quant à la question de la fameuse "liberté" de mourir. Libertés réelles, libertés formelles: les riches soignés par leur argent n'auront pas besoin de cette loi... La liberté est-elle celle de la dépression et de la pauvreté, qui favorise l'envie "libre" de suicide ?
Les grands principes
On parle de loi d'"équilibre". Or, l'équilibre, précisément, est rompu en faveur du franchissement d'une barrière symbolique fondamentale, qui est l'attribution du droit et en fait du devoir de tuer aux soignants. Cette rupture symbolique du rapport entre médecin et malade sera définitive et aura des conséquences fondamentales: le médecin pourra vous tuer si vous le demandez. Cette révolution éthique est-elle discutée et vraiment considérée ? Non.
On parle d'"aide à mourir". La phrase est inacceptable car ambiguë au dernier degré dans le sens du cynisme mortifère le plus révoltant. On parle (1) de "tuer" (aider c'est permettre, faciliter permettre) ou bien (2) de permettre de quitter la vie dans les meilleures conditions possibles ? Au nom du deuxième sens, séducteur de manière diabolique, on organise et promeut ce qui reste un meurtre.
De plus, on promeut une restriction à l'expression des opinions: tenter de dissuader du suicide demandé sera poursuivi, et ma révolte pourtant légitime est déjà hors la loi. Un contrôle supplémentaire dans la limitation de liberté d'expression des opinions.
Pour finir, on sait que l'un des problèmes de santé publique est la question des suicides, causés par les variantes des dépressions, maladies mentales de diverse importance pour lesquelles il existe des soins variés. Poser la décision suicidaire comme droit imprescriptible et obligation médicale sans s'assurer de la relation possible de ce désir avec une maladie associée n'est pas convenable. La chose n'est même pas discutée, alors que l'évidence de la dépression profonde est forcément associée au moins en principe avec l'approche de la mort. Rendre possible la suppression de tout soin pour laisser toute la place à la mort est criminel et je pèse mes mots.
4 grands principes sont ainsi foulés aux pieds par des institutions dont tout montre qu'elles sont gravement malades et en fin de vie. Une pulsion suicidaire de mort saisit l'Occident ou ce qu'il en reste.
De fait, et les lois sur le mariage pour tous, l'homo parentalité (parent1 parent2), la décision concernant son sexe, l'avortement sans limites, la procréation assistée comme droit, y compris l'achat de prestation de grossesse et bientôt l'euthanasie violent les sentiments basiques de toute l'humanité concernant les principes fondamentaux de la base biologique qui contraint ordinairement l'organisation des sociétés humaines.
Cette rupture qui s'achève progressivement est maintenant un caractère des sociétés occidentales. D'une certaine manière, le caractère décidé et explicite de la disparition du symbolisme moral dans la conduite légale de la société est maintenant avéré et manifeste une volonté. On peut (de toute façon on devra) ainsi vivre dans des sociétés sans référence à cette hyper morale, qui ne disparait pas pour autant, elle est simplement abolie pour ce qui concerne l'inspiration et la justification des lois.
Y a-t-il pour autant disparition de tout principe pour ce qui concerne l'esprit des lois? Non, bien sûr, il y a remplacement des principes dits traditionnels qui étaient jusqu'il y a peu des conséquences plus ou moins directes des principes chrétiens défendus par ce qui était encore une religion majoritaire. Des principes nouveaux de liberté complète quant aux comportements individuels minoritaires sont ainsi considérés de valeurs strictement égales à tous les autres comportements pourtant ordinairement contraints par des valeurs communes symboliquement affirmées, puis rendus obligatoirement disponibles gratuitement aux minorités concernées et enfin rendues incritiquables de par la loi.
On a ainsi, avec apparemment l'assentiment de l'opinion, mesurée par les sondages et les enquêtes (on ne peut le nier pour la quasi totalité des mesures sociétales décrites), une rupture complète avec des principes dit moraux assez connus, et défendus mordicus pendant des siècles.
Les alternatives
La loi sur la fin de vie en France est une loi travaillée plusieurs fois et qui permet avec l'aide de l'État, une véritable "aide à vivre sa mort" dans les meilleures conditions, les progrès des antalgiques permettant de supprimer les souffrances extrêmes dans pratiquement tous les cas, les procédures raisonnées et attentives d'accompagnement de la mort inévitable sont disponibles et décentes. Reste à disposer des équipes et traitements de soins palliatifs, disponibles vingt ans après la loi uniquement pour la moitié des français.
3 critères progressifs d'accompagnement effectifs de la mort prévisible immédiate sont disponibles et pratiqués : l'abstension (de réanimation), la prescription de sédatifs (causant la mort), l'arrêt des traitements terminaux. Humains et respectables, respectueux des soignants et des malades, tout cela se fait à l'honneur de tous.
Hors la généralisation obligatoire et contractuelle de la mise à disposition des malades en fin de vie de ces traitements, quel est le besoin d'une aide à mourir qui n'est que la rupture symbolique avec l'interdiction de tuer qui s'impose à toute société ?
Les amendements
Pour bien illustrer l'esprit et le vrai sens de cette loi, il n'est que de mentionner les amendements rejetés et adoptés en commission. Le dégout et la haine vient à l'esprit et aux lèvres. Les raisons de l'évidence que je ressens m'éloigne pour toujours des enculés assez inhumains pour concevoir de telles horreurs.
Rejetés
L'interdiction du suicide aux personnes déficientes intellectuellement
Vérification de l'altération du discernement de la personne
Saisie d'un psychiatre en cas de doute sur la demande de suicide
Clause de conscience étendue au personnel soignant et infirmier.
Adoptés
L'absence de différence entre suicide assisté (poison laissé à disposition) et euthanasie (injection explicite du poison).
La considération que la mort du fait de l'application de cette loi sera considérée et explicitée comme "naturelle".
Amende et prison pour délit d'entrave, soit l'empêchement ou la tentative d'empêchement de d'information ou de pratique du suicide assisté, par tout moyens, y compris l'information en ligne.
En conclusion
Un prof de médecine, praticien de la chose, au courant des choses, l'explique: cette saloperie eugéniste est un crime contre l'humanité. La décadence morale mortifère de cette société de merde est inqualifiable. Il n'est pas le seul: tous les spécialistes engagés dans la conduite de l'assistance humaine et médicamenteuse à la fin de vie, qui seront obligés de par la loi de proposer la chtite seringue mortelle (pourquoi pas la balle dans la tête ?) aux grabataires désespérés sont vent debout devant cette saloperie.
Sauf si bien sûr, le libéralisme moderne prend acte de la nécessaire gestion économique du soin de la population misérable, qui en plus ne vote pas: les vieux qui n'ont pas les moyens de se faire changer leurs couches plusieurs fois par jour vont pouvoir se suicider, tout comme ceux, trop ploucs pour avoir droit à la trop chère morphine, ou trop fatigués d'attendre un rendez-vous. Des économies importantes sont ainsi à attendre: une mesure énergique à grande échelle sera donc enfin décidée par Macron !
Et on ne plaisante pas: les mutuelles (sans que l'on parle de conflits d'intérêt) sont à fond pour la loi, et le Canada a fait de belles économies avec une loi analogue: des dizaines de millions de dollars et 30% des suicides sont le fait d'handicapés... Et puisqu'on veut encore rigoler, parlons pour finir de la proposition de loi d'Aymeric Caron pour interdire l'euthanasie des chiens et des chat.
(1) interview Philippe Juvin https://youtu.be/5ICaaqpN79o