Les colonisations
À l'occasion des saillies multiples de Bernard Lugan et de l'interview d'un ambassadeur bien informé (1), il faut se poser la question de l'attitude publique de la France, pays souverain vis-à-vis du monde, concernant la colonisation menée par elle dans l'histoire.
Avant cela, on citera l'annonce de Driencourt concernant le fiasco diplomatique de Macron en Algérie, qui fera date et devra être enseigné dans toutes les écoles à l'avenir, et aussi la description qu'il fait de l'instrumentalisation de la diaspora algérienne par le pouvoir algérien. Ajoutons la prise d'otage avec Boualem Sensal, accusé d'avoir diné avec Driencourt la veille de son arrestation.
La question est d'importance, quand on voit Emmanuel Macron, l'auteur et responsable de la terrible série de fiascos diplomatiques qui ont déshonoré la France tout le temps de sa présidence, se livrer pas plus tard qu'hier à une repentance envers Haïti, responsable d'un ignoble massacre de français en 1804 puis envers Madagascar, enfermé depuis 50 ans dans les affreuses conséquences d'un choix socialiste imbécile. On évitera de parler des crimes contre l'humanité commis en Algérie, qui inaugurèrent sa faconde diplomatique, cela dès avant son élection, et bien sûr de son éviction d'Afrique pour cause d'arrogance (le "va réparer la clim" lancé au président burkinabe) aggrémenté de photos de lui ivre à Kinshasa et aussi de son premier ministre et de son ministre des affaires étrangères homosexuels... La présidente rwandaise non francophone de la francophonie fera rire le reste de l'assistance médusée devant cette longue série de ridicules dont la France ne se remettra peut-être pas, tout le crédit à l'étranger des 80 dernières années ayant dissipé devant le monde comme une impudique diahrée honteuse. Fermons le banc.
La question est celle de l'histoire d'un pays souverain debout devant le monde, histoire assez brillante pour être connue et respectée, portée par des personnages immenses qui suscitèrent l'unanimité. La personne de De Gaulle est évidemment centrale en ces affaires, bien qu'affreusement dévalorisée par ses successeurs, on vient de le voir, mais pas seulement.
Car c'est bien tout le château de sable français de la période qui est en train de s'effondrer.
Après l'horreur révolutionnaire qui s'acheva dans la déroute napoléonienne (les Russes à Paris), la France tenta effectivement de se retailler un Empire en colonisant le monde à une période où cela était possible. Le mot "empire" utilisé tardivement a bien montré le caractère essentiel de cette ambition dont l'Algérie et ses départements français fut le centre. Tout s'acheva en 1940, et la lamentable guerre d'Algérie qui succéda à la lamentable deuxième guerre mondiale n'eut qu'un seul intérêt: permettre dans les deux cas après bien des abaissements le retour au pouvoir de De Gaulle, sa gestion de l'histoire algérienne condamnée par l'histoire ne pouvant que mal finir malgré une indéniable victoire militaire obtenue de haute lutte. Tout le reste fut calamiteux y compris, hélas, et cela aussi gravement que pour l'autre victoire qu'il obtient, sur le point essentiel de la mémoire des choses laissée à l'histoire.
On ne parlera pas du mémoriel, qui ne qualifie que la gestion de la chose, mais de la mémoire, ce qui reste vraiment à ses propres yeux et à ceux du monde, et cela dans un environnement contesté, c'est-à-dire sujet à des polémiques éternelles. Dans ce cadre-là s'opposent des thèses contraires, lâcheté contre héroïsme, et ce fut le propre de De Gaulle que d'être capable de présenter et de représenter un héroïsme certain et prouvé mais hélas minoritaire, contre l'image véritable d'une lâcheté générale fondée sur des errements collectifs. La grandeur de l'homme et de ses vrais soutiens, plus la nécessité de leurs engagements pour l'honneur d'un pays qui avait quand même des références à présenter, put obliger ceux qui n'en pensaient pas moins de faire semblant.
Quelle est la réalité historique partagée par le monde ? Déchirée par ses atermoiements internes et par le désordre propre à sa destinée collective, la France aurait déjà dû s'effondrer en 1918 et put, grâce à un armistice inespéré, arrêter les frais avant l'inéluctable. Les morts de 18 qui supportèrent le dernier effort allemand ne sont plus là, pas plus que ceux de 14 qui supportèrent le premier. Le reste ne fut qu'un misérable désespoir collectif privé de sa sève qui s'effondra en 40. Le chef d'état-major de Joffre (Gamelin) fit les plans de la défaite et malgré l'armée que De Gaulle put engager en Allemagne, ce qu'on aurait pu et du écraser en 36 résista admirablement (hors ses exactions) à ce qui depuis nous méprisera pour toujours. Amérique et Russie ont compris et intériorisé la fin définitive de l'Europe de l'Ouest et donc de la France, et cela malgré Churchill et De Gaulle, d'ailleurs immédiatement renvoyés après la victoire par leurs peuples définitivement brisés.
L'affaire algérienne, scorie de l'histoire et qui avec l'Indochine fut un martyre historique supplémentaire infligé aux minables "démocrates" qui complotèrent le renvoi de l'homme providentiel, c'est-à-dire infligée à l'élite perdue arc boutée sur une idée pourrie de la République, et qui illustra la gravité de cette affreuse décadence. On commença par la défense du territoire de cette "république", c'est-à-dire de ses départements, déshonorés par la présence sur ses sols d'un peuple de sous hommes abrutis de superstitions misérables et de toute façon privés de tout droit à s'exprimer librement. La "République" de "l'Algérie c'est la France" était une honte morale pour qui se prétendait "démocrate" et ne se rendait même pas compte de la disgrâce en question.
Toute discussion avec un pied noir direct ou indirect, toujours enfermé à la française dans la cage de son déni le prouve encore: l'arabe (en fait le berbère arabisé) majoritaire sur le sol algérien n'avait pas le droit de vote et imaginer qu'on puisse rester le dominer dans cet état ou dans l'autre était une évidente chimère que nul vrai homme ne peut supporter. Il fallait partir et rien ne pouvait remplacer cette évidence.
Harki, OAS, antiracistes bêlant : tout cela n'est pas digne d'un peuple debout dans l'histoire, d'humains libres s'associant pour peser sur le monde. Sous humanité rêveuse et imbécile, elle acheva en Algérie de s'évanouir dès l'armée française, au demeurant victorieuse, disparue. Qu'elle tire sur des manifestants rue d'Isly ou qu'elle laisse violer des françaises à Oran, elle n'était pas là pour défendre une colonie qui n'avait plus lieu d'être.
Maintenant, on rembobine. La colonie fut créé au siècle avant dernier, alors que l'Empire Ottoman régnait sur la méditerranée, à peine vaincu en 1827 à Navarin. On récupéra nos dettes de la révolution, et fit main basse sur un trésor piraté qui ne compensa certes pas les 1000 ans de piraterie et de mise en esclavage des européens capturés perpétrés depuis la capitale pirate qui venait à peine (et du fait des canons américains) de cesser la guerre de course. Infâme et criminelle, la "souveraineté" mafieuse turco berbère islamisée ne méritait que l'écrasement qu'elle a subi et qu'elle aurait dû subir bien avant. Les tribus qui résistèrent, dont les moeurs barbares dégoutèrent nos soldats par leur sauvagerie envers les prisonniers furent enfumées et affamées comme il se doit et l'on mit malgré cela des années à les soumettre; il n'y a que la violence prolongée qui marche avec les barbares, et l'empire romain l'avait lui-même suffisamment montré...
La dernière révolte data de la fin du siècle.
On se permettra de remettre les pendules à zéro à cette date. La conquête coloniale de l'Afrique fut alors discutée, et décidée par la gauche républicaine contre des avis réfléchis et argumentés. Réaliser la chose est d'importance. C'est ce qui est à l'origine historique de la démocratie moderne en France qui fut l'instigateur de la départementalisation de l'Algérie et de la colonisation de l'Afrique et de l'Indochine et finalement pour les mêmes raisons. Mieux ! C'est le lobby algérien en France qui au nom de ses intérêts coloniaux racistes pesa sur cette démocratie au nom de la démocratie pour maintenir ses privilèges économiques spoliateurs (son économie était protégée ) en faisant chanter l'Empire, jusqu'à truquer les élections qui s'étaient (généreusement tu parles) entre-ouvertes aux natifs, tricherie qui déclencha (entre autres) la révolte armée qui conduisit à l'indépendance. Ce fut le deuxième round.
Le troisième round fut assis par la prise en compte de l'échec de toute l'aventure coloniale et de la grande décision française des années 60, la décolonisation. Nécessaire et inévitable, elle fut cependant organisée par nous, de par notre volonté. Là encore, la personne de Charles de Gaulle est centrale et concentre l'immense service qu'il rendit là, encore, à la Nation. Elle fut initiée en Algérie à notre honneur, après notre victoire militaire et les circonstances malheureuses qui l'accompagnèrent furent le fait des acteurs locaux et pas de l'Etat, qui fit ce qu'il fallut faire pour partir, lui.
Là commence le 4ème round. Il est toujours en cours, les gagnants de l'indépendance algérienne étant encore au pouvoir, empêchant toute réconciliation historique et jouant, encore et toujours de la terrible haine des mafieux profiteurs de la rente pécuniaire et mémorielle qu'ils obtinrent de la capture pirate de leur fief terrorisé.
Mais ils sont cependant les maitres légitimes du pays, et exercent le pouvoir des gouvernants d'un État souverain reconnu que nous avons reconnu et il faut faire avec. Là commence le discours raisonnable, basé sur le respect nécessaire de la souveraineté des États que nous reconnaissons, et le respect que l'on doit à soi-même commence par le respect de ce que nous avons publiquement admis.
Que devons nous dire ?
D'abord que tous les États ont une histoire et que le passé, sans pouvoir être nié, a vocation à demeurer le passé et que la mémoire des hommes, qui est aussi celle des hommes morts dans ce passé, doit rester celle de ces humains là, par delà ce qu'ils firent et qu'on peut toujours estimer à la hauteur de circonstances qu'on peut considérer aujourd'hui changées. Là est la clé de toute relation entre entités historiques: la contemplation lucide du passé, et la capacité de le dominer pour songer à un présent et à un avenir pacifié. Car il n'y a de projet commun possible à terme entre pays que celui de la paix et du commerce à nos deux avantages et que tout doit être fait et dit pour y parvenir.
Contempler lucidement le passé et le dominer c'est accepter ses propres victoires quelles qu'en soient les circonstances mais aussi ses propres défaites. Cette acceptation doit être basée sur des faits historiques élaborés hors propagandes et surtout hors du ressentiment humain actif, l'humeur sinistre qui ne prédispose qu'à de nouvelles violences hors de propos.
Les enfumades de Bugeaud furent des actes de guerre aussi horribles que les immondes tortures infligées aux prisonniers français civils et militaires par les populations, ce qui explique les répressions inévitables que des troupes régulières infligèrent à ces civils: il n'est de guerrilla vaincue que par la violence infligée aux civils et la guerrilla algérienne vaincue le fut grâce aux tortures de la bataille d'Alger et aux déportations massives de population liées au plan Challe. Cette victoire fut payée par le désir final d'indépendance et c'est tout le "paradoxe", elle fut ainsi, du fait des souffrances infligées, le vrai moteur de la séparation comme elles le furent autrefois de la soumission haineuse qui dura un siècle.
Reconnaitre ces faits, et de cette manière, est essentiel, c'est l'objet d'un travail collectif de mémoire sur la réalité des faits, non pas seulement celui d'un bord, car la repentance unilatérale en plus d'être fausse, n'est qu'une source supplémentaire de haine, mais des deux bords, reconnus ainsi égaux et dont les combattants enterrés côte à côte peuvent enfin reposer en paix.
Cette équivalence n'est pas un relativisme, mais au contraire la virile reconnaissance des coups portés de part et d'autre, avec le regard lucide porté sur toutes les exactions passées et l'acceptation des torts de tous, ceux qu'on a encouragé parce qu'à notre avantage, et les siens propres qu'on doit cesser de nier. Et il n'y a pas d'accord sans que cela se manifeste publiquement, d'une manière ou d'une autre, et il y a bien des moyens d'incliner la tête sans se soumettre.
Pour finir, il faut aussi admettre que même si cela débouche sur la paix, soit des relations futures apaisées et productives, cela ne signifie pas le "pardon". La séparation des Etats reste historiquement constituée et les souffrances subies ne peuvent s'oublier ou cesser d'être célébrées. Les collectivités nationales incluent leurs morts, on se doit de les célébrer toujours et aussi de respecter mutuellement ces célébrations là.
Cette étape qui est toute l'affaire, doit être affirmée et produite, comme centre de l'expression publique des nations entre elles. Elle est hélas cependant très difficile, voire impossible dans la plupart des cas et l'accord entre les nations ne peut se manifester malgré cette impossibilité que par le silence nécessaire aux choses qu'on ne peut ou doit dire. Néanmoins, la dignité des hommes et la grandeur des chefs d'Etats et de leurs politiques doit toujours quelque part faire "comme si", le respect silencieux des choses vaut tous les discours.
On se souviendra de De Gaulle, par exemple, parlant de Pétain en novembre 68 à Douaumont, et les déjà vieillards silencieux qui entouraient la cérémonie y manifestèrent en silence la gravité nécessaire.
Ainsi, il ne peut y avoir de parole publique, de mémoire publique exprimée au nom de la Nation sans ce respect là de soi même et des autres. Au delà du mémoriel, et de la repentance il y a la mémoire nationale et l'ignorer est un crime contre l'histoire et contre la civilisation. Malheur à ceux dirigeants ou complices de l'abaissement de la France qui l'oublient ou ne l'imaginent même pas, faut de culture ou de vraie morale.
Pour ce qui concerne l'Algérie, il est clair qu'il n'y aura aucun changement à l'immonde et inacceptable comportement des pirates qui la spolient et dirigent, sans leur écrasement violent ou leur mort de mort naturelle, qui ne saurait tarder, mais qui n'est pas encore là. On notera que le peuple derrière, jeune et oublieux du passé et du présent n'est là comme ailleurs que totalement incapable de la moindre grandeur ou de la moindre lucidité. Ce sont les peuples qui font leur propre malheur eux-mêmes.
(1) Interview de Xavier Driencourt https://www.youtube.com/watch?v=EGtmH0qkRSg