Les Néo Réactionnaires
On en parle beaucoup (1) et on retiendra l'antidémocratie et la gouvernance algorithmique. Sans doute en suis-je un ou en deviens-je un, par force, la vitesse de l'effondrement (Nick Land est un théoricien de l'accélérationnisme) augmentant sensiblement de nos jours, ou pas loin d'une minute ne se passe sans que, non pas qu'une femme soit violée, cela on le savait, mais qu'une monstrueuse connerie ne soit dite, inaugurant une funeste décision à venir.
Bref, le dégout qu'on éprouve à suivre les péripéties de la démocratie en exercice va croissant. Ce n'est bien sûr pas la première fois dans l'histoire que cela se produit, mes pauvres parents suivaient déjà, atterrés, les miterrandianismes des années 50 avant que j'eusse l'occasion de suivre ceux des années 80, mais cela confirme en tout cas l'incapacité congénitale du système dit représentatif à évoluer. L'histoire l'a d'ailleurs toujours prouvé: pour ce qui concerne la France, nulle évolution de la situation délétère installée par une république de numéro quelconque ne s'est achevée autrement que par un coup d'État. La situation actuelle, qui dure depuis 45 ans, finira inéluctablement de la sorte, j'en suis persuadé.
On pourrait dire de même que tous les grands problèmes de l'Amérique ne se sont réglés que par des guerres, depuis celles contre l'Angleterre jusqu'à celle contre le Mexique puis contre les indiens, sans parler de la guerre civile qui n'a pas résolu le problème noir, toujours moteur de la guerre civile permanente qui anime la "démocratie" américaine.
La conclusion est claire et nos 250 ans de "démocratie" le prouve absolument: ce type de régime, impuissant et corrompu n'est acceptable que pendant les brèves années où la force des armes ne s'étant pas tout à fait relâchée, les guignols élus au hasard de leurs démagogies arrivent à bien se tenir...
Voilà donc la première forme de la réaction: abolir, ou modifier en profondeur le régime de gouvernement.
On notera d'ailleurs que sont à l'oeuvre derrière tout cela des idées et des philosophies issues de ce qu'on appelle les "lumières", où furent élaborés des concepts fondamentaux. D'abord celui d'"émancipation", c'est la raison individuelle, propre à chacun qui le rend atomiquement capable de jugements raisonnés et donc de la capacité de choix collectivement transformée en la meilleure décision possible concernant la vie en commun. L'émancipation est le droit, devoir et capacité accordée (ou arrachée) à l'humain en question. Elle fut à l'origine émancipation des autorités et des morales (royales ou religieuses).
On notera ici un clivage entre deux "raisons". La première est celle de l'émancipation individuelle: la raison est un exercice personnel et le théorème est démontré dans ma tête d'abord. La deuxième est collective et intemporelle: LA raison, qui règne sur le monde, organise sa nature et devrait donc, c'est tout le problème, organiser aussi les sociétés. Le mot "loi" s'applique aux deux, n'est-ce pas ? Il se trouve que non, et la grande aporie de la raison, et c'est ce qu'on évoque plus haut, est que la "raison" a totalement échoué à fournir des critères convenables à la conduite des sociétés, systématiquement rongées par le désordre des idées et des raisons individuelles, précisément.
Nous devons donc vivre une deuxième émancipation, c'est sans doute le vrai sens des "lumières noires" de Nick Land: il convient de s'émanciper de la raison démocratique à l'origine du régime manifestement failli. Cela sans doute au nom d'une raison individuelle particulière et on voit alors s'avancer le paradoxal autoritarisme libertaire, qui fait tout l'intérêt de la réflexion en cours.
On pourrait mettre en savant Singapour, sa méthode d'apprentissage des maths et son dictateur Lee Kuan Yew (qui peut se souvenir de ce nom ?) qui fit le bien par la force, et qui se trouve tel le Frédéric II de Voltaire, le dépositaire de la vraie intelligence, celle qui s'impose avec l'énergie nécessaire.
Les néo réacs vont plus loin et parlent de la continuation modernisée des dictatures éclairées, la gouvernance algorithmique, ou la robotisation du pouvoir, de manière à distinguer complètement humanité et contrôle de l'humanité, et à revenir à une sphère des fixes à la fois ultra-libérale et immuable, et donc capable de laisser vraiment s'auto organiser les consciences en charge de faire le bien en se voyant retirer le droit de le faire au nom de tous.
Car là est le problème et la clé de tout: dans le conflit entre les deux raisons, c'est bien sûr la raison individuelle qui s'impose et qui prétend à un certain moment, détenir la raison collective et donc décide de l'appliquer à tous, ce qui est par définition la seule chose à faire une fois convaincu... Le résultat est non pas la dictature, mais le foutoir, soit la dictature de ce qui ne peut être qu'une minorité, erratique et forcément sujet à corruption et qui se précipité à moyen ou long terme vers l'échec misérable et la destruction violente.
Il faut donc soustraire pour toujours la raison collective idéalisée et imprenable, des volontés et fantasmes des raisons individuelles et la transformer en nature, réel immuable (je dis bien immuable) qui ne se laisse comprendre que par les approximations peu révisables que sont ses lois de fonctionnement et qui s'appliquent indistinctement sans souci de morale, de charité ou de "justice", ces choses étant précisément ce que la dégénérescence démocratique prétend maitriser.
Car le terme de "lumières noires", on pourrait parler de "wokisme de droite", ou "nazibéralisme" (le terme devrait faire flores), désigne aussi un éclaircissement, une révélation: que le "progressisme" désigne en gros tout ce que d'erratiques et désordonnées consciences paumées peuvent tirer de l'idée de "raison individuelle" soit l'application foireuse de concepts piochés n'importe où et qui s'imposeraient au nom du bon plaisir de communautés tribales variées se livrant à débats en forme de partouzes sous drogue.
Le progressisme et tout ce qui s'y rattache doit donc être banni pour toujours: il n'y a pas de "progrès" autre que des changements indéfinis issus de l'arbitraire du délire. Et ce qui le rend possible doit être éradiqué.
Car il y a deux phases: d'abord l'organisation et les principes, d'ailleurs immédiatement théorisés sous une forme contradictoire. Car le pouvoir souverain du "démos" est d'abord exercé contre le système lui-même: par essence, cette souveraineté peut et veut s'interdire elle-même et c'est d'ailleurs ce que l'échec retentissant et qu'on aurait voulu voir définitif, de la démocratie athénienne a montré. La chose est essentiellement contradictoire, c'est-à-dire suicidaire, et à chaque fois dans l'histoire, consomme d'ailleurs son suicide.
Les plus acharnés défenseurs de la démocratie sont d'ailleurs ceux qui veulent "rompre avec" quelque chose, par exemple le capitalisme, pourtant organisateur implicite de l'économie, soit ce qui rend seul possible l'exercice même du vote ! L'"alternance démocratique" est ainsi par essence la succession de programmes de ruptures ou de "changements" voulant mettre à bas un essentiel de ce qui précédait et de ce qui s'offrait ainsi lui-même en sacrifice pour la foule déjantée qui allait décider "démocratiquement" de sa mort !
Et puis il y a l'organisation: sur la base d'une liberté de choix des partis, une oligarchie impitoyable, assez corrompue à tous les sens du terme, organise son maintien au pouvoir avec hypocrisie, en affirmant tour à tour la justesse de ses principes pour imposer son pouvoir, et en affirmant avec cynisme son autorité pour en imposer l'application. La corruption est multiple: par l'argent des pays étrangers à la manoeuvre pour accaparer, par les démagogies à l'égard de communautés séduites dont on protège les intérêts, par les salaires dispendieux qu'on verse et qu'on se verse. Toute remise en cause de ces immondes pratiques est dénoncé comme populisme fasciste, l'estrèmdroate ennemi essentiel étant le diable à combattre qui justifie tout cela.
Revenons aux principes, le principal d'entre eux étant l'"égalité", funeste concept en forme de contresens langagier essentiel: égalité de quoi? Tout enfant, possesseur sous la forme de son avidité individuelle de monade vivante qu'il exprime par son sens immanent de la justice traduira cette égalité-là sous la forme de la stricte égalité quantitative. Nous y sommes: tous ont droit à la même chose et donc sont dépositaires de l'égal respect qu'on doit à ceux qui auront autant que les autres. Et non. L'inégalité physique, matérielle, intellectuelle et biologique est universelle, rationnelle, évidente et totale. Le faible et l'imbécile doivent être écrasés, jugés et nourris à leur juste valeur, et l'égalité n'est que de principe, même le plus acharné des éclairés de l'âge des lumières le pensait avec clarté: il s'agissait d'abolir les "ordres", rien de plus évidemment. La subversion du principe fut le fait des démagogues qui utilisèrent le trope pour mieux dominer les faibles dans les assemblées "démocratiques" qui décidaient des mises à mort de qui on voulait abattre.
Archi transformés par toutes les républiques qui suivirent, le concept démagogique se glissa dans bien plus puissant et efficace: la question dite "sociale", devenue une réponse ultime à la question éternelle du mal: l'égalité des conditions comme solution à imposer à la dramatique inégalité des conditions. Absurde et débile idéal, qui ronge et pollue les consciences, et qui surtout motive les meurtres de masse en plus des conneries de masse pendant les périodes plus pacifiques et qui du fait de l'inanité obligée des décisions prises en rapport, conduit toujours à la ruine. Nous y sommes actuellement en France.
Qui plus est, l'inanité du principe, qu'on aurait pu croire en bout de course du fait de la monstruosité de la dette publique qu'il généra, conduisit à des diversions pour atténuer l'ampleur de l'appauvrissement non voulu qu'il générait: on passa à l'égalité des improbables, c'est à dire des races, des sexes et des inter sexes: on alla même jusqu'à instaurer des inégalités de leurs contraires afin de garantir l'essentiel: le grand remplacement démographique obligé, l'obligation faite par des juges majoritairement (et silencieusement) des femmes de respecter la parité dans tous les autres domaines, et pour finir le mariage homosexuel dont l'égale fertilité ne peut être assurée que par l'illégale GPA dont les produits en même temps légaux et illégaux sont automatiquement naturalisés par les mêmes juges pour éviter d'en faire des mineurs isolés par ailleurs justiciables du "même" traitement. L'absurde, le contradictoire, le gerbant en forme d'apothéoses désespérante: la chiasse, la chiasse comme dirait Joseph Conrad.
Revenons toutefois au social, qui plus que le sociétal, coute de l'argent, et beaucoup d'argent: il est tout entier basé en fait, même si cela est fait au nom du foireux et faux principe d'égalité, sur un principe sous jacent qui est le refus (ou le renoncement ) d'accepter collectivement la souffrance: il faut, c'est ce que veut le progressisme, et c'est ce que NOUS voulons, que les problèmes de survie des uns et des autres soient réglés par le gouvernement. Migrants malade atteint du mal de mer sur son radeau, licenciés par son exploiteur de patron perclus des dettes de l'URSSAF, divorcées sans ressources, jeunes fainéants à la rue, toutes les misères du monde et des circonstances méritent non pas la charité individuelle et les partages de manteaux qui firent la chrétienté, mais l'assistance sous forme de droits, se présenter au guichet en montrant ses écrouelles suffisant pour mériter salaire.
Nous avons donc exposé les principes et les manifestations du progressisme. Celui ci étant l'ennemi, et ses principes étant les causes de sa malignité dont les effets sont l'absurde et la ruine, il convient donc de s'en débarrasser.
L'attribution de l'attribution des droits (exprimés en numéraire) devrait donc être soustrait à la charité d'un décideur corrompu car disposant pour son bien être moral de l'argent des autres. L'égoïsme nécessaire doit être informatisé. Le "c'est la faute à l'ordinateur" qui servit longtemps à excuser les horribles bugs des premières robotisations sera maintenant l'excuse des cruautés sociales qui forceront les pauvres à mieux s'organiser, individuellement ou collectivement.
Nous y voilà ! Je suis donc un nazibéral. Manifestement.
(1) Le Grand Continent : https://legrandcontinent.eu/fr/2025/06/28/atlas-neoreactionnaire/