Et puis il y a Soral
L'université est utile !
Un très intéressant mémoire de recherche: L’idéologie d’Alain Soral
http://lirenligne.net/oeuvre-a-decouvrir/LiRUO94XYf8bI/L%27id%C3%A9ologie%20d%27Alain%20Soral.pdf
Y sont décrites en détail les positions du polémiste vidéocrate soit disant nazi, Alain Soral.
Tout d'abord, au sujet des idéologies, en préface du mémoire, la définition de Raymond Boudon, l'immense individu disparu récemment:
« doctrines plus ou moins cohérentes combinant à dose variable des propositions prescriptives et des propositions descriptives »
Cette magnifique définition parfaitement descriptive est aussi une admirable prescription et devrait permettre à tous de différencier jugement de valeur et perception descriptive, conceptuellement. Ce qui est précisément l'idéologie de ceux qui savent ce que c'est, qui peuvent les maitriser et donc rester libre. Ah la belle phrase !
Ainsi donc que veut et dit Soral ?
Tout d'abord il n'est ni raciste, ni racialiste. De ce point de vue, bien que se revendiquant nationalisme et socialisme, il se trouve comme porteur de projet, radicalement distinct de ce qu'on appelle le nazisme, mais aussi des idéologies type "Nouvelle Droite" (A. de Benoist, D. Venner etc).
Cette différence est assez nette, les aspects chrétien, égalitariste, populiste et disons "communiste" étant clairement prévalents sur ceux, aristocratiques, européistes, païens, racialistes que l'on associe généralement à l'extrême droite idéologique.
Par contre on a un mélange complexe, difficile à cadrer (c'est l'immense mérite de ce travail d'en démêler la complexité hypnotisante) entre des ingrédiets particulièrement salés qui sont anti libéralisme, complotisme et religiosité syncrétique.
Il faut mentionner toutefois que l'auteur du mémoire continue de classer Soral à l'extrême droite, ses reprises en quantité des thèmes antisémites classiques en restant la marque. Disons qu'il s'agit d'un créatif en matière de mixage idéologique, mais tout de même, avec un ancrage fort. Cette créativité se manifeste par exemple par la notion de "réconciliation" l'immigration étant porteuse de valeurs anti libérales, on doit s'y allier; l'Islam par exemple pouvant être mis à contribution pour lutter contre l'Empire.
Son anti libéralisme est celui d'un ex communiste, qui au tout départ, ne peut concevoir la liberté et les relations anonymes entre humains comme produisant un ordre social. Cette absence quasi totale de la conceptualisation en question le mène ainsi au complotisme, tel que décrit par Taguieff. Là est peut être le début de tout. L'époque relaie abondamment et depuis longtemps ce qui est la remise en cause de la principale avancée des "lumières": le refus qu'il y ait des ordres spontanés, issus de rien, sinon de mécanismes non volontaires, rationnels mais surtout non intentionnels.
Il faut pour l'antilibéral comme pour le complotiste qu'il y ait un démon. Un bon, pour réguler l'économie, et un mauvais pour organiser la misère du monde. Ils s'appellent l'Empire, le mauvais qui domine, le bon à venir.
Raymon Boudon avait abondamment cité toutes ces manifestations de la rationalité non intentionnelle produites par exemple par des hasards simultanés capables de causer de belles structures dont on ne peut que dire, émerveillé: il faut un créateur !
La physique moderne fait rayonner les trous noirs par le hasard de la création spontanée de paires de particules dont seule l'une d'entre elles est happée par le monstre: quelle plus belle illustration d'un monde cohérent mais fondamentalement libre de toute intention, complot ou nécessité de régulation par l'intelligence ?
Ainsi donc, alors que d'immenses réflexions, que de gigantesques connaissances sont là, basées et construites sur les plus immenses arrachements qui soient à toute la pensée rationnelle primitive, et bien on trouve toujours en pointe d'un soit-disant "débat démocratique" des expressions influentes qui ne sont de fait que sa pénible et misérable répétition.
Le mysticisme vient après, mais se trouve secondaire, tant il est une activité pleine et entière très au-delà de la théorie du complot, ou bien plutôt simplement une décoration, une aspiration lointaine. Disons qu'il est une croyance au destin du complot, la présence divine rêvée étant l'image de la force magique qui régit le monde.
J'en reviens donc au profond retard intellectuel de tous ceux qui restent sensibles au mythe du complot, à la raison derrière le rideau, à la volonté qui organise le mal ou le bien. Malgré les nuances qu'ils apportent aux aspects secondaires de leurs engagements, ils participent tous non pas d'un complot, mais de l'adhésion à priori au principal moteur de toute manipulation. Ce qui fixe les individus à ce stade est multiple, et ne peut être rattaché à la religion, à l'idéal politique ou à l'origine sociale, tant des partis radicalement opposés de ces points de vue y sont représentés.
Comme si une forme de caractère, une attitude spirituelle, bref, une propriété de la cognition empêchait d'être séduit, fasciné, puis bien sûr convaincu par une belle propriété du monde, celle de sa profonde liberté.