Les Droites
À l'occasion d'une empoignade polie (1), on peut réfléchir sur ce qu'est la droite, ou plutôt ce que sont LES droites.
Les définitions de la dame, intelligentes et un peu surprenantes, de la droite c'est la "gratitude" tandis que la gauche c'est le "ressentiment" vaut son pesant d'or et devrait faire date. Au passage, elle se déclare libérale-conservateur (le "rice" n'est pas de mise chez les civilisés oublieux du woke) et critique le petit Zemmour, accusé d'en faire trop et sans doute de vouloir exagérément porter atteinte aux libertés.
On passera sur la polémique qui n'a pas lieu d'être, et on évoquera surtout ce qui manque à la chose, c'est-à-dire à la droite telle qu'on voudrait la définir. Car la droite est une alliance entre domaines et l'alliance apparemment paradoxale entre liberté et conservatisme la caractérise au moins partiellement. Simplement il faut lui ajouter encore une autre composante, et qui est la spiritualité disons traditionnelle, celle qui réfère le christianisme. Oubliée ou rejetée par la modernité libérale, qui se dressa d'abord contre le catholicisme, cette composante reste pourtant essentielle. On doit donc parler de libéralisme conservateur chrétien pour faire le tour d'une droite complètement définie.
Le clivage droite gauche est pourtant paradoxal au point d'en être rigolo: la liberté fut une revendication de gauche contre le pouvoir catholique autoritaire, le conservatisme est bien sûr celui de la question sociale cristallisée autour d'un système social ruineux et immobile, et le christianisme fut remplacé par le moralisme woke spirite et hugolien conçu pour remplacer le catholicisme pour les mêmes raisons qu'agitent ceux qui veulent aller à droite au-delà de la simple raison.
Serait-ce donc de droite que de vouloir une liberté d'abord économique, avec le plafonnement nécessaire de la fiscalité, avec aussi un conservatisme permettant les interdictions des transhumanismes néoraciaux et surtout la préservation ethnique et culturelle des populations européennes, sans oublier le nécessaire respect du côté spirituel de la préservation des institutions, le sacré du pouvoir et de l'histoire devant être respecté et pratiqué ?
On se réclamera pourtant d'un athéisme radical, à rebours de toute essentialisation des idées, qu'elles soient celle de la "liberté" par-delà les nécessaires limitations d'icelle, celles qui empêchent par exemple l'homme libre surtout s'il est africain de s'installer où il veut; ou bien celle du "conservatisme" lui-même, un peu trop attaché à préserver un modèle social quasiment ethnicisé et qui conduit le peuple français au nom de l'égalité à ignorer la nécessité de la préservation de la pauvreté non financée, celle qui permet d'éviter les endettements hors limites qui nous affligent.
Le christianisme lui-même mérite d'être désossé, en ce qu'alors qu'il est heureusement porteur avec le péché originel de la notion de malheur ontologique attaché à l'humanité, ce qui permet de traiter le problème du mal, fonction essentielle du religieux, il veut aussi résoudre le problème en introduisant la notion de salut avec la finalisation christique du monde qui va jusqu'à suggérer une perfection dans ce monde-ci, c'est en tout cas ce dont se convainquit la gauche...
Faut-il se concentrer sur la différence entre conservateur et réactionnaire, le réactionnaire voulant revenir à "avant", typiquement à la royauté qui précéda la révolution, tandis que le conservateur plus réaliste ne veut que garde ce qui marche, tout en voulant aussi changer ce qui ne marche pas, ne serait ce que pour éviter les révolutions à venir ?
De ce point de vue, Zemmour est donc vu réactionnaire, mais il manque clairement le côté spirituel des choses qu'il ne tente pas lui, contrairement à Buisson, à ressusciter. Or il semble bien être ce qui manque le plus, le dévoiement du domaine devenant dangereux car bavant sur tous les points de vue, la motivation de nos pauvres vies ne pouvant apparemment qu'être prise en charge par une dégueulasserie woke absolument révoltante. Tout ce qui préexiste et justifie les discours de nos maitres de droite et de gauche, dégouline d'un purin verdâtre insupportable rejeté par tous, c'est ce qu'on appelle la perte des "valeurs" ou la "décivilisation" voire la barbarisation du monde, issue à raison du dégout pour ce qui est proposé.
On en revient donc à ce qui est maintenant nécessaire: un égoïsme local respectueux de l'autre vu essentiellement différent, ou en tout cas suffisamment différent pour qu'on lui laisse assumer ses choix. Ça c'est le bon côté du wokisme: le relativisme culturel appliqué aux nations: excisez-vous selon vos gouts dans vos familles, mais là le woke cale, ne le faites pas chez nous.
Cet égoïsme respectueux de la seule chose qui existe au-delà des tribus barbares, la Nation, invention européenne, doit être la base de la spiritualité nécessaire aux choses publiques. Incluant les morts, la Nation n'a point besoin de Dieu pour respecter silencieusement ce qu'on est et ce qu'on doit demeurer. L'État défend la Nation et conçoit ses politiques en fonction, quitte à meurtrir ou violenter les autres nations qui pourraient l'agresser.
L'autre point est que l'État est aussi fondé à martyriser ses propres assujettis quand il n'a pas les moyens ou la faiblesse d'emprunter assez pour les nourrir. Les famines historiques ne peuvent être combattues que par l'organisation rationnelle de la prospérité et non pas seulement par l'assistance. Cela est spirituel et la pauvreté se respecte: la nier c'est nier le mal essentiel à la liberté de l'homme, on ne peut la combattre qu'en la rendant plus difficile et c'est la justification de la froide raison technicienne que de la réduire en l'exploitant.
Ainsi ce qui manque à la droite pour couvrir tous les domaines de son efficience, c'est bien l'égoïsme sacré, valeur suprême construite par la spiritualité nécessaire à tout ordre.
On en vient donc à la gauche. D'abord, elle n'est pas essentielle, mais "anthropologique" comme le dit Zemmour : toute position a sa droite et sa gauche où que l'on soit.
L'hypostase gauchiste réalisée n'est que pathologie à ses heures surtout quand elle se tourne vers les extrêmes. On niera le concept de droite "extrême", le rêve totalitaire qui l'a discrédité n'étant qu'une variante du socialisme, car ne pouvant exiger l'héroïsme suicidaire qu'il nécessite que par le confort social et alimentaire apporté par sa pratique du pillage racial.
Tout comme le principe même de l'assistance illimitée au petit peuple, le nazisme est d'abord une corruption du peuple, ce qui lui fait admettre la perte de sa liberté. La gauche est donc pathologique par essence dès qu'elle s'organise et se radicalise. Son principe: le refus du réel, du mal et de l'exercice de la liberté pour le combattre. D'une attitude naturelle respectant des tendances excusables de l'humanité, on fait ainsi des régimes politiques et sociaux débiles, inacceptables et décadents.
Ce refus du mal essentiel se manifeste aussi par le culte du nouveau, l'idée irrépressible qu'une nouvelle humanité est possible sur des temps courts. Surhomme nietzschéen, nazi, communiste ou transhumaniste, cette évolution improbable invisible à nos échelles temporelles est une niaiserie absurde: nous sommes strictement égaux cérébralement aux hommes de l'antiquité et vivons suivant les mêmes principes fondamentaux dont beaucoup sont toujours valables. Cela s'appelle le conservatisme et il est sagesse et respect du réel et de l'évidence. Le progressisme ontologique est faux, et il n'est que confusion imbécile avec le progrès technique qui lui n'est qu'exploration libre du réel infini.
En conclusion, la droite est ce qui rassemble ce qui doit être et qui n'est pas réducteur: on y trouve le spirituel du mal accepté, de la grandeur du passé, et de la liberté nécessaire à la construction du futur. En cela, le mot n'a pas d'intérêt véritable (à part sa position dans la binarité nécessaire de toute pensée), tout comme l'autre mot, gauche du précédent et attaché aux pathologies dont il est porteur malsain.
(1) le débat Strauch-Bonart Zemmour: https://video.lefigaro.fr/figaro/video/esprits-libres-z-strauch-bonart/