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Les religions

On veut défoncer Durkheim et ses fausses conceptions de la religion (vaste programme). 

Bien sûr, les formes élémentaires de la vie religieuse voulaient faire fi du progressisme en matière de religion, et donc tout écraser à l'aune de la "science", mais n'importe qui pourrait le dire, et les prétentions positivistes sont infinies. 

Durkheim en particulier, théorisa la religion en général et en fit une méthode pour assurer l'ordre social. Identifier un phénomène à ses causes, voilà donc la Science et on ne peut qu'être révulsé par l'approche, et les conclusions, là est le sens de mon raid. 

Non pas que la chose du début du siècle soit démodée au contraire, un certain Bruno Karsenti s'en est emparé avec délices (2) et la continue. Il est donc temps de passer à autre chose. 

Bien sûr ma théorie des trois pensées sera le cadre, le religieux étant l'une des formes de l'institution au sens large, les sociétés humaines en dépendant bien sûr, mais pas que: elles en sont issues, et la liaison avec les caractères supérieurs de la psyché humaine doit être faite, en excluant les soi-disant niveaux supérieurs de l'épistémé, je rejette en effet les habitus autonomes et autres fétiches sociologiques, Compte étant un démon, ou du moins un misérable.

Contre Durkheim

Le cadre rationnel ne peut donc être qu'ancré dans l'anthropologique, la logique des comportements ne pouvant venir que de la perception individuelle, même si celle-ci est plongée dans un collectif bien sûr aussi. Ce collectif ne peut être une chose indépendante, pas du moins au sens qu'il aurait des lois ou une autonomie, n'étant qu'une fonction c'est-à-dire un effet second, de complexité émergente certes, mais en aucun cas capable de s'abstraire de l'essence de l'âme humaine décrite par mon collectif à moi, celui de la dernière civilisation véritable à qui nous devons tout, la chrétienne et la naturaliste (au sens de Descola) qui n'attribue d'âme qu'à soi, l'individu à l'image de Dieu. Aucune société ni aucune ethnie, tribu, parti ou classe sociale n'aura le pouvoir de l'individu Dieu auquel je suis le seul être à ressembler, point final. 

On est donc loin du relativisme positiviste Durkhemien, pour qui toutes les religions sont "vraies à leur façon". Et surtout qui affirme "la société est une réalité -sui generis-, elle a ses caractères propres qu'on ne retrouve pas sous la même forme dans le reste de l'univers". On notera cette pensée profonde qui marque le siècle et qui a convaincu trop de gens de la définitive association entre humanité et collectivité, hérésie certaine : la rationalité s'identifie à la société comme autorité. 

Et bien c'est cette évidence, le caractère de nécessité de l'institution, que je prétends décrire sans essentialiser un humain associé à une société, et qui serait donc essentiellement non libre ! Car oui, le social est nécessaire, mais second, et se construit depuis le bas, tout comme il s'abandonne par le bas. Durkheim décrit l'autonomie du niveau supérieur comme celle des propriétés spécifiques du vivant, différentes de celle de ses éléments minéraux. Certes, et la fonction échappe à son substrat physique, quoique les éléments minéraux aient des raisons d'interagir, ces interactions restant le support effectif de comportements dont le caractère macroscopique reste d'une cohérence inexpliquée sinon par l'histoire de ses répétitions, elles-mêmes rendues possibles par certaines propriétés plus basiques. Bref, le mystère du vivant ne peut pas être source d'explication ! Comme tout mystère d'ailleurs. 

Revenons à la rationalité de la croyance au surnaturel. D'abord, il y a l'hubris moderne qui consiste à confondre explication et rationalisation. Le réel dans son acception stricte est ce qui résiste: la profondeur du fleuve qui empêche de traverser à pied est d'abord une réalité avant que d'avoir à être expliquée. Si la chose est permanente elle est "réelle" et peut être attribuée à n'importe quoi ou qui sans inconvénients car la rationalité consiste à tenir compte de la chose. Toute la vie de l'espèce repose sur cette rationalité là, pratiquée avec excellence depuis toujours: nous n'avons pas disparu. C'est la raison de l'animiste, fou furieux dans ses explications de l'âme du jaguar, et pourtant capable de survie dans une forêt qui boufferait le petit bobo rationaliste en moins d'une heure... 

C'est pour cela que la négation par Durkheim de la notion de surnaturel chez le primitif est un scandale absolu, qui plus est raciste. Le magique n'est pas la "science" du primitif, mais un charlatanisme nécessaire et un accès au réel caché du spirituel primitif : celui-ci n'a aucune illusion stupide sur l'efficacité de sa magie et il ne faut pas confondre une masse à la fois trompée et, il faut le dire, "enchantée" et une civilisation toute entière, qui elle n'est jamais dupe. L'action reste grâce à la magie possible et humaine, et la magie comme un rituel d'espoir ou de conjuration est un aspect de la vie spirituelle, une communication avec le réel. La chose est fondamentale, et primitive, et mérite d'être ce qui rationnellement "explique" (et "fait comprendre") les rituels et aussi la croyance, primitive ou pas, d'ailleurs: on bénit les chars qui montent au front en Russie et cela n'est en rien de la magie ! 

Le chamanisme, vécu par des occidentaux en est un exemple (3): d'abord il y a très peu de chamanes, et ensuite leur perception des "esprits" est parfaitement réelle et ancrée dans des représentations collectives pré-existantes. Sans affirmer que les états de conscience altérés des chamanes (qui restent des états du type hallucinatoire, exceptionnels) s'identifient au mode spirituel de pensée accessible à tous, on peut les comparer et les rendre "analogues". Il n'y a pas UN mode de pensée unique et c'est là la découverte. Certains parlent d"états de conscience", on pourrait et devrait théoriser ces fameux "états" qui couvrent toutes les perceptions globales altérées obtenues avec les drogues. Sont ils vraiment si multiples que cela, ou bien ne seraient ils pas tous en secret accord ? 

On peut au passage parler donc DiMethylTriptamine (DMT) le composant actif de l'ergot de seigle, synthétisé par le LSD, et utilisé dans les mystères d'Eleusis, Demeter déesse des moissons... Sécrétée dans les expériences de mort imminente, c'est la fameuse drogue spirituelle, dont les effets non addictifs seraient, en fait, apaisants (si on ne reste pas à tout jamais dans le délire schizophrénique qu'elle induit). Au passage, l'âme de Descartes est dans la glande pinéale ou épyphise, celle qui sécrète la chose. 

Pour les tenants de l'inconscient vrai noyau de la psyché, on a le monde du rêve et de ses hallucinations, auquel on aurait ainsi "accès" en y incluant un inconscient "collectif", Jung a beaucoup joué avec ça... Pourquoi ne pas envisager un adossement du conscient humain et donc de la modalité spirituelle à des orages cervicaux exstatiques disciplinés par l'évolution dans les sociétés de primates ? Au bout d'un certain temps, des singes bourrés aux champignons se seraient toqués d'explication et auraient mis en correspondance la rationalité évidente du monde et leurs perceptions construites pour mieux interagir avec leurs femelles (on associe ici charitablement l'hominisation et la féminitudisation). Le spirituel en serait issu, et tout le reste... 

Même chose pour le "sacré" respect mystérieux envers quelque chose. Cette "chose" est une vision du réel, quelque chose qui existe et qui est mis en scène. Ce n'est pas un concept social inventé par un boche du XXème siècle qui commande la chose, mais la perception organisée d'une présence, au fondement de l'activité neurologique de l'humain socialisé qui met en oeuvre d'abord un sens: la modalité spirituelle de son activité mentale. 

L'avantage de cette explication-là est sa supériorité quant à la "séparation" profane/sacré. Caractériser un concept comme "exclusif", c'est-à-dire séparant les choses radicalement, c'est faire, et d'ailleurs cela est reconnu, une exception. On peut faire à la fois le bien et le mal, et même ignorer ce qu'est le vrai du faux: le sacré aurait lui un pouvoir propre ! Comme si pour expliquer rationnellement sa puissance, il fallait une caractérisation irrationnelle du concept lui-même... 

Le sacré est ce qui est perçu comme tel, enchanté par les traditions et sa puissance est intrinsèquement "sentie". Son absence l'est tout autant; on n'a pas un "concept" social, mais bien un comportement humain motivé par ses capacités psychiques. D'autre part, cette "reconnaissance" ou "perception" du réel spécial invisible ne se réduit pas au religieux, qui n'est qu'un cas particulier de cette modalité de la perception mentale des choses. Le "sacré" comme respectable s'applique en fait à toutes les institutions, dont le religieux n'est qu'une instance. Mieux ! Tout l'institué se réclame sans cesse du caractère "religieux" de sa présence, au point que, ironie suprême, on se met à identifier le religieux au social et à l'y réduire comme "utilité" ! 

On doit donc passer au niveau supérieur et considérer l'institué, véritable fondement des sociétés et objet de la perception particulière qui rend possible le respect qu'on lui porte, chose qui FONDE les sociétés et non pas les justifie ou les conforte. Car on illustre ici la fondamentale illusion du petit athée moyen : la société comme concept holistique devient la preuve de son existence, illustrant l'absurde croyance circulaire en des entités conceptualisées donc déclarées existantes et explicatives. Combien de Kant seront nécessaires pour faire justice de cette illusion ? 

Note: c'est la troisième fois qu'on illustre et conspue cette illusion, base de la sociologie, cette infâme pseudo science déiste directement issue de la sécularisation tardive d'un judaïsme ou d'un protestantisme mal digéré (Weber était protestant, Durkheim et Freud juifs). 

L'institué est nécessaire à la mise en oeuvre de la perception consciente de l'autre et aussi de l'autre inconnu que l'on peut et doit expliquer à l'autre visible. Les discours et les pratiques liées à ces interactions, de personne et à personne et aussi collectives, se matérialisent dans la construction et l'émergence de l'institué, que l'on doit rendre permanent et transmissible. Mieux, n'est permanent et transmissible que ce que l'on voit, et qui donc existe, ce qui rend justice du concept faux de la pré-existence conceptuelle d'une manière en fait apparue par hasard, et solidifiée par l'habitude. Il n'y a pas de "société", mais "des" sociétés, ce qui reste, et qui ne s'explique que par le principe anthropique: c'est là parce que c'est là, sinon on ne le verrait pas et on se poserait pas la question, abruti. 

Les invariants 

Il faut mentionner Bernard Lahire et ses "structures fondamentales des sociétés humaines". On a ici la notion de séparation du sociologique et du culturel, que Durkheim ignore, rendant ainsi incompréhensible la différence entre sociétéss animales et humaines, ou du moins la nature particulière de l'humain, qui est la culture. 

Le religieux appartient bien sur à la culture... 

Et puis, il y aurait les invariants sociaux, collectifs et distincts des simples déductions de la psychologie évolutive, si à la mode. Mais c'est le problème de l'indépendance  des niveaux de connaissance: le social serait il vraiment indépendant du biologique, et la néothénie ou altricialié (la néothénie étant plutôt la conservation de caractères juvéniles, tandis que l'altricialité désigne la dépendance du nouveau né) a bien une influence sur le social, qui se trouve bien fondamentalement lié au biologique. 

L'invariant social c'est plutôt la séparation sexuelle des tâches, il faudra y revenir ailleurs. 

 

(1) Durkeim https://academiesciencesmoralesetpolitiques.fr/wp-content/uploads/2018/08/08-11-04_durkheim.pdf

(2) https://www.google.fr/books/edition/La_place_de_Dieu/EgrWEAAAQBAJ?hl=fr&gbpv=1&dq=karsenti&printsec=

(3) Sombrun, la chamane https://www.youtube.com/watch?v=cZUF_K6FAdM$

(4) Lahire  https://www.nonfiction.fr/article-11950-du-social-au-culturel-lhistoire-des-societes-humaines.htm

(5) Queau https://metaxu.org/2023/11/23/du-vrai-sens-du-mot-religio/

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