Les suites allemandes
On appelle ainsi les 6 partitas pour clavier, premières du genre, ou Clavier Ubung Un (le premier).
On s'était déjà passionné pour 825 (1), mais il faut bien réaliser qu'elles sont 6.
Les deux principales sont 825 et 830, sont les deux "royales". Et les 4 autres ?
Un point important : la totalité de ces danses sont connues et familières, chacune d'entre elle ayant toujours été là, comme des évidences, positionnées dans les partitas comme des tiroirs. Pourtant, elles sont brouillées: comment mémoriser leurs localisations ? En les réécoutant, les rejouant, encore et encore...
826 ut mineur
On attaque par 826, dont l'unité est marquante.
La Sinfonia est introduite de façon majestueuse et grave. Et puis commence l'histoire sautillante et délicieuse, qui se transforme une course rapide, comme une fuite éperdue qui s'achève gravement.
L'Allemande se balance alors répétitivement et gentiment.
La Courante lui ressemble, mais plus vive.
La Sarabande dans la même tristesse gentille mais décalée. Grande majesté triste, ta ta ta ta grave et c'est fini.
Le Rondeau sautillant peut laisser croire qu'on est déjà au Cappricio... Mais non !
Le Cappricio est incroyablement vivace, et peut se jouer très vite et très énergiquement avec ses retours par dessus, graves.
Le Marta Argerich de Youtube, agressif et puissant. Ce qu'il y a de bien avec Argerich c'est que la maitrise globale et détaillée de tout le bazar se permet de foirer ponctuellement sans que cela ne nuise, presque au contraire, à l'équilibre global du jeu.
827 la mineur
827 est un peu sombre, et un peu "banale".
La Fantasia est un peu mécanique et dissimule un petit couac au tout début, produit d'une exécution trop rapide sans doute, les interprétations lentes ne le font pas apparaitre.
Allemande et Corrente sont similiaires...
La Sarabande brodée pourtant est très lente et timide.
Les très courts (1 minute) Burlesca et Scherzo ravivent la chose mais la Gigue ne conclut pas très vivement, plutôt un peu tristement, finalement, même si elle peut être jouée vivement.
828 ré majeur
Là on a une Ouverture à la française, majestueuse et royale. Grandeur et noblesse... Ça s'enfonce vite dans une très vive suite d'attaques répétées, en fait une ronde effrénée.
L'Allemande, riche et triste comme il se doit...
La Courante, complexe et perlée.
Un Aria, dans la lignée de la courante mais plus rythmé.
La Sarabande reprend un titati de l'Aria et se déroule tranquillement, allant presque jusqu'à l'extinction.
Un charmant Menuet dans le même style en écho, d'ailleurs.
Et la Gigue, décidée à en finir. Une reprise énergique et affirmée, déclinée en vitesse.
829 sol majeur
Sans doute la plus "ordinaire" de toutes...
Préambulum: sautillant et rapide.
Allemande: cool et tristounette.
La Courrante est d'une grande vivacité, vitesse pure, donc et délicieusement mélodique.
Sarabande: solennelle, mais mélodique, elle est discrète en écho à la courrante.
Tempo di Minuetto: délicieuse et perlée promenade. Dissonnante un peu.
Passepied: forte et autoritaire répètitive en tout cas.
Gigue: toujours dans le même style, vif mais restant tout de même un peu banal.
830 mi mineur
La royale,
Toccata agressive et insistante, mais majestueuse et surtout longue.
Allemande: complexe et mélodique, mais toute là, et roulante. Surtout, à chaque fin de phase, cette finale roulée.
Et la courante, vive et extrêmement riche avec une cavalcade surprenante. Ces descentes simultanées dans l'aigu et le grave en accord étrange comme des voix distinctes.
l'Aria sollennel et appuyé mais n'est qu'un intermède. Pour la Sarabande, la grande sarabande de 830, le grand déroulé du drapé. Avec la fin de phase magnifique. Et puis le démarrage d'une petite course balancée, la Tempo di gavotta. Puis une course grave, réfléchie, complexe et sérieuse qui va jusqu'à la dissonance, la Gigue.
(1) http://francoiscarmignola.hautetfort.com/archive/2017/02/19/la-partita-no-1-en-si-bemol-majeur-bwv-825-5912861.html