Les nocturnes
Les nocturnes de Chopin sont 21.
Groupées par opus (9, 15, 27, 32, 37 , 48, 55, 62), seules les opus 9 et 15 ont trois numéros et les 3 ultimes furent publiées après la mort du gars...
Le gars en question est un extraordinaire génie qu'on ne peut qu'aimer avec tendresse, vu sa musique... J'avoue adorer ce type à travers sa musique pour piano, "aimer Chopin" étant l'acte d'aimer ces sons, incroyable expression de quelque chose d'humain, évidemment, et c'est là tout le romantisme (certainement). Car cette musique démontre et suscite la présence d'un auteur infiniment mystérieux, humain forcément (le Chopin qu'on aime) et qui ne parle pas, mais qui "joue".
Ce qu'il joue est extraordinaire, et bien joué, avec le détachement et la tristesse habile qui convient, est absolument merveilleux.
La dernière nocturne, extrêmement connue au point qu'on pourrait avoir honte de l'écouter en compagnie, tellement elle est "sentimentale" est en fait une merveille totale. En concert on est reconnaissant du silence collectif: personne ne cherche à échapper à l'extraordinaire sentimentaliste de la chose...
Chopin raconte une histoire, grave et commune et arrive à l'insérer entre deux témoignages lumineux de virtuosité sentimentale. En gros, ABA comme toutes(tous) les nocturnes.
no 1 (9.1)
La première (9.1) commence par l'histoire, un peu moraliste mais élégante et qui se déploie en éventail puis accentuée.
L'histoire continue alors en plus grave, et se répète, puis presque silencieusement, très sourdement. Et puis vient la mélodie, la fameuse nocturnerie qui fait pleurer et qui se conclut trois fois, puis deux fois, et s'achève tout doucement...
La deuxième (9.2) et la troisième semblent banales...
no 4, (15.1)
est une histoire élégante aussi. Et puis l'orage : 2 éclairs et ça roule. On retape 2 fois et roule encore plus fort. L'histoire revient alors, avec une menace en arrière-plan de l'élégance négligente qui se répète, un peu triste avant de finir...
no 5 (15.2)
Malicieux 3 fois.
Un bruit de rue, un peu insistant, répété. Qui se transforme en énervement. Silence.
On repart avec la malice tout doucement en arpège. Rubato ça balance, en suspension.
Et puis la petite descente perlée délicieuse.
no 6 (15.3)
Très lent, puis tendre, avec la mélodie connue nocturnesque. Très très lent. Un fond grave et la mélodie puis un énervement au cri hystérique. On ne sait quoi faire. Reprise ultra lente. La sonnerie et le "attention" répété. Mais c'était pour finir.
no 7 (27.1)
est d'une tristesse désespérante.... Grave en plus mais avec la merveilleuse perle mélodique au dessus. Et en médium aussi puis ça se complexifie et l'histoire se déroule, c'est comme ça. Ça gronde dans le fond, la fureur arrive avec des cris, et ça roule fort. Puis danse, on récupère "à la polonaise" et on arrête brutalement. C'est assez !
Retour à l'histoire triste, on passe au bruit de la rue, comme toujours, mais c'est toujours triste. Une conclusion? Oui.
no 8 (27.2)
La petite phrase lente, et la grande tendresse, qu'on a toujours entendu, puis la petite phrase. On ralentit jusqu'au presque silence, et la tendresse toute calme, quelques perles et la tendresse en décalé qui monte en puissance, la petite phrase et les perles, tendre à nouveau mais perlé. Bruits du dehors quelques gouttes et poum c'est fini.
no 9 (32.1)
La petite perle d'emblée, toute gentille un peu dansante, avec un regret. Deux fois, avec encore plus de grâce. Stop, un peu de gravité et un récit tenté, mais harmonieux mature, un appel à la beauté, deux fois insistant mais avec un peu de tristesse. Marqué gravement, puis avec puissance et une grande grâce. La danse démarre alors, reprise gravement en écho. Puis timidement toute calme. Stop. Encore avec insistance et concédant la grâce, puis silence.
Injonction finale ! Sèche et autoritaire. La mort.
no 10 (32.2)
Un petit bavardage gracieux bien équilibré, sur le fil. Démarrage insistant et dansant, puissant et sautillant. Ça balance, et le bruit de la rue l'anime, ça valse avec et ça tourne, ça tourne. Jusqu'à la fin.
no 11 (37.1)
La grande tristesse, très connue au demeurant. Marquée et avec force. Un long soupir et ses échos. Et la mélodie toute en élégance, avec une menace de danse. On se remet à insister: ça danse très lentement avec gravité puis tout lentement. Un soupir encore et les deux se mélangent en une respiration. Sommet du soupir et on redanse. Soupir descendant, dansant.
La réflexion presque immobile hachée et silencieuse. Grand silence. Et la tristesse revient avec sa marque forcée, long soupir et hoquets maitrisés, avec la mélodie toute douce et sa danse. Pure lassitude romantique.
no 12 (37.2)
Danse d'emblée dans le petit entrechat ultra connu. 2 puis 2. On reprend à l'envers en écho renversé. Plus énergiquement et on redouble, avec une dissonance grave. Ça reprend, comme un petit matin tendre mais hésitant, haché crescendo jusqu'au silence. Danse lente, lasse et triste. 2, 3 fois. La danse repart, 2 puis à l'envers en pointes aigues, puis en descendant. Variations plus graves et plus lentes, répétées. Un cul de sac de répétitions. Danse encore. Grave et Stop.
On termine.
no 13 (48.1)
La gravité de la grande nocturne. Tchoc, fin de danse sur marche funèbre. Le rubato de folie, suspension atmosphérique à deux mains. Puissance, et descente en perles, et là ça marche puis stop sinistre et triste.
Bruits de rue. Réflexion sur le passé, bon souvenir mais qui passe, le grondement , 5 fois de plus en plus fort et là la grande descente.... On accélère, on parle, on s'essouffle, on sanglote. Retour au piétinement 2 fois. Fin.
no 14 (48.2)
La mélodie connue, un peu lassante, gentille et triste. Toute nocturne. Qui devient medium et affirmative. Puis grave et un peu sentencieuse. Cela répété.
Arrêt et hésitation. Que faire? Et bien on réfléchit. Chopin qui se mélange les pinceaux, un régal à voir... Et ça repart dans la petite mélodie, finalement. Une petite idée qui arrive, et on perle avec. On s'amuse sur une marche immobile en hochant la tête puis dans la mélodie tout de même, la classe totale en perlant... Voilà.
no 15 (55.1)
La grande nocturne 2 fois la mélodie bien rythmée avec le soupir. On développe alors, et l'histoire se continue. Encore la mélodie avec haussement d'épaules, et ré expression. On repart, après un silence dans les subtils retravaux. Grave et fort et soudain ! Dans un bruissement, on travaille. Longue perle. Stop. Et ça repart... Le perlé est très lent puis accélère, de la pure virtuosité de composition et la mer envoie une petite vague. C'est la fin. 3 fois, encore l'écume.
no 16 (55.2)
Un grand soupir martelé de la main gauche et une histoire qui s'installe d'emblée... Complexe au point de dissonner minusculement... Une idée qui est le petit retour en arrière un peu déçu. Et puis le long sanglot.
Le long regret en soupir lent, délicieux. Silence... Et c'est le martèlement lent, final.
no 17 (62.1)
Un balancement qui commence gravement, mais comme venu de l'extérieur, badin.
Et puis la descente perlée ultra connue, (que de pubs avec ça). Un brillant arpège puis l'extérieur encore, tout calme, une méditation de pianiste oisif avec même un peu d'assonance. Ca perle et la virtuosité chopinesque merveilleuse s'enroule alors. Silence. L'extérieur martelé. La descente à nouveau, plus lente encore, qui remonte en plus, puis on conclut 2 fois, 3 fois.
no 18 (62.2)
La lente méditation mélodique, là encore une scie enrobée dans un rythme lent.
Puis une méditation complexe hachée, presque puissante. On revient à la méditation qui s'accélère puis se suspend.
Hésitation, bruits du dehors un peu désordonnés. Silence, et quelques essais presque arrêtés avant la conclusion, imperceptible.