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  • L'art suprême

    Arthur Schopenhauer, l'anti Hegel (comme on dit l'Anti Christ) est l'auteur de "Le monde comme volonté et comme représentation", somme philosophique totale décrivant tout du monde, dont les premières et dernières éditions sont séparées de quarante ans (entre 1819 et 1859). 

    D'abord le monde EST volonté: aveugle, unique, globale, orientale, implacable et d'arrière plan, reconnue comme l'origine conceptuelle de l'inconscient de Freud, de Jung et aussi de la vie acharnée derrière l'évolution de Darwin. Comme il le pensait d'ailleurs lui même, il est donc l'unique philosophe et il a entièrement raison. Il est bien sur opposé à la vivisection et auteur de la dialectique eristique (l'art d'avoir toujours raison) il est le seul maitre de Nietzsche. 

    Admirateur du Védanta, l'une des 6 philosophies Hindoues dites astika (soumises aux Véda et aux Uspanishad). On distingue les astikas des nastikas (qui ignorent les Védas), et à qui appartiennent le Bouddhisme et aussi le Jaïnisme. On rappellera qu'un hôpital Jaïniste pour oiseaux, qui soigne les pigeons, se trouve à Delhi, en face du fort rouge.

    Le monde est représentation, issu de l'unique réel indifférencié, le Brahman, tout le reste n'étant qu'illusion, le voile de Maya. Héritier de Kant et donc de l'inventeur de la chose en soi que l'on ne peut connaitre, le noumène, il le rejette comme n'étant ni représentation ni volonté et donc que chimère... La seule chose en soi est la volonté.

    La perception haute est donc, celle possible de la forme derrière l'illusion, et donc voilà la base de l'esthétique: la vision du vrai. 

    Revenons au cercle d'Iéna, creuset du vrai romantisme, l'allemand. La fin du XVIIIème siècle y fut mémorable... 

    Les deux frères de lait, Tieck et Wackenroder sont connus pour leur idolâtrie intellectuelle de la musique, conçue comme ce qui exprime de manière abstraite les émotions: les mouvements de l'âme sont désincarnés. 

    Il y eut d'autres frères, les Schlegel, Auguste le philosophe théoricien du romantique, frère de Friedrich, qui lui fut le philosophe, le "grand" Schlegel, celui qui vécut à Paris. Avec Novalis, et Schleirmacher, le cercle d'Iéna, et la revue Athenäum, toute une époque. 

    August Schlegel sur la musique: "Elle purifie pour ainsi dire les passions de leur souillure matérielle en les représentant dans leur forme même, sans aucun rapport à des objets,". On dévalorise les livrets d'Opera, et considère la symphonie comme forme suprême.

    E.T.A (Ernst Theodor Amadeus) Hoffmann, celui des contes, parle de Beethoven:

    "La musique ouvre à l’homme un royaume inconnu ; un monde qui n’a rien en commun avec le monde extérieur des sens qui nous entoure, et dans lequel il va abandonner tous les sentiments qui se définissent en des concepts afin de s’adonner à l’indicible"

     

     

  • La partita no 1 en Si bémol majeur BWV 825

    La partita est en B flat major , ou B dur. 

    Les partitas sont les suites "allemandes", l'opus 1 du klavierübung. 

    BWV 825 la première d'entre elle est parfaite, ça commençait bien. J'avoue ne pas pouvoir me détacher de l'impression de perfection totale ressentie à entendre jouer ça: rien qui ne soit incroyablement à propos, merveilleux et délicieux. 

    http://www.qobuz.com/fr-fr/album/johann-sebastian-bach-rafal-blechacz/0002894795539

    en est un jeu particulièrement brillant, rapide et percutant, d'une virtuosité incroyable, en tout cas à la hauteur du morceau. 

    Le prélude est une sorte de choral un peu triste, une vieille chanson et hop ça part le rideau de perles en arrière plan qui parle, de plus en plus grave. Imité par la main droite, puis on recommence la tristesse. Le dialogue s'amorce pourtant, la main droite accepte puis refuse. Elle a le dernier mot. 

    L'Allemande est plus vive, joyeuse et chantante et on ornemente. On repart une deuxième fois encore sur la si belle phrase. Une troisième fois un peu en retrait, et tap et tap, on insiste, ornemente, quitte à dissoner un tout petit peu, que c'est virtuose tout ça. La fin est juste un peu étrange. 

    La Courante est la plus fade des danses. Mais bien joué ça balance comme une toile un peu lourde qu'on décore du bout des doigts. 2 phrases, et la 3ème est plus en retrait, mais continue l'exploration et hop ça part par en dessus et en grave en plus, la conclusion se répète. On repart une 4ème fois, le passage par en dessus est moins net mais bien enlevé. 

    La Sarabande est le centre de la partita, incroyablement nonchalente et douce. La main gauche arrive tout doucement sur le travail qui s'est bien développé. Chaque fin de séquence a ce terrible tadada conclusif. On repart alors dans la méditation dansante, il s'agit bien d'un corps qui tourne lentement sur lui même à la recherche d'une montée sans effort et puis dans la troisième séquence la terrible montée de la main gauche qui se replie mais qui en fait parle. La quatrième séquence est profonde et colorée de la main droite. Et puis les perles, qui s'achèvent encore, et encore. Et c'est le dernier tadada. 

    Le premier menuet est une machine magnifique, avec en fait un rythme puissant et doux dans toutes les sonorités qui tournent autour de l'obsédante marche. Court pourtant. Le deuxième menuet est statique, étrange, méditatif. On retrouve le tadada de la sarabande. 

    Et puis la marche folle reprend en sur aigu. On se lance alors avec énergie, et c'est tout.  

    La Gigue est un monument de complexité. Ca part dans tous les sens. Des pointes de partout. La fin de chaque phrase endiablée et un tadada inversé. On se permet même de faire des perles descendantes qui n'en finissent plus, et la main gauche qui rattrape avec agilité. tadada. 

     

    Mei est très bien aussi, en fait avec tout la subtilité de la dame... 

    http://play.qobuz.com/album/3760127221562

     

    Et puis y a une forme simple et directe, Sokolov...


     

  • Les nombres de couches

    Vers 2012, il n'y a pas si longtemps, une méthode d'apprentissage dite "multi couches" ou "profonde" fut enfin considérée, preuves à l'appui, comme très efficace. Toute l'Intelligence artificielle sorti alors de son long hiver (30 ans) et se mit à exulter de joie: l'homme va être remplacé, enfin.

    Entre temps, Marvin Minsky et Seymour Papert avaient en 1969 démontré les limites intrinsèques du perceptron ce qui avait drainé tout l'argent destiné aux neurones vers les approches symboliques, elles même ruinées avec l'effondrement du marché de la LISP machine en 1987. L'hiver de AI commençait. 

    Evidemment, il s'agit en fait pour l'instant de reconnaître automatiquement les amis d'un utilisateur de facebook qui publie bêtement les photos de ses "soirées", même si cela sert aussi à conduire les voitures de Google. Yann Le Cun, éminent chercheur français, honneur des universités américaines dans lesquelles il a mené toute sa carrière, vient de s'y faire embaucher ciao (chief intelligence artificielle officer, pardon, aucune machine ne pourra jamais faire ça). Il nous explique tout cela depuis le collège de france. 

     https://www.college-de-france.fr/site/yann-lecun/course-2016-02-12-14h30.htm

    D'abord, il s'agit de reconnaitre, tout est là et la reconnaissance des formes, d'abord une théorie de l'analyse des images, est la préoccupation première. Notons que cette reconnaissance, qui porte d'abord sur des champs de bits à 1 et à zéro (plus les couleurs), est aussi celle que l'on cherche à faire dans n'importe quel ensemble de données: les formes sont aussi des regroupements dans des résultats d'élections selon les catégories socio professionnelles par exemple. On distingue ainsi les régressions (sur les nombres) des classifications (sur les objets) mais cela revient au même: on veut reconnaitre et cela plus vite qu'en énumérant les fameuses bases de données de cas déjà résolus constituées par des professeurs humains. 

    On en vient donc à la différence entre apprentissage supervisé et non supervisé.L'apprentissage non supervisé consiste à classifier la base d'entrée en en exploitant les différences présentes tout seul comme un grand. C'est évidemment l'avenir, mais dans un premier temps c'est plutôt difficile et il sembla dans un premier temps que cela ne servait pas à grande chose, l'apprentissage supervisé étant tout à fait suffisant.  

    La supervision consiste ainsi à tenter d'établir une machine, un programme, une boite,  qui résout tout de suite par calcul une collection de cas déjà traités et qui peut AUSSI répondre à des questions portant sur les cas intermédiaires. Comme si dans l'ensemble des cas possibles, on avait trouvé l'équation d'une surface qui séparait exactement les différents regroupements d'objets similaires. Est ce une femme nue ? 

    C'est la grande affirmation de Le Cun: il ne pourra pas y avoir d'intelligence, au moins au niveau d'un animal, sans apprentissage non supervisé. Et il se trouve qu'on en est très loin. Au passage, on considérera aussi l'apprentissage "par renforcement" qui se contente d'utiliser une récompense attribué de temps en temps. La rétro propagation ne fonctionne pas dans ce cas et ce type d'apprentissage est terriblement lent. Par contre, ça marche dans certains cas, en particulier dans les jeux et Deep Mind, qui joue au GO a été entrainé de cette manière. Quand la récompense est un click sur une pub, cela marche aussi et c'est mis en oeuvre dans les régies publicitaires: le nombre de récompenses devenant très grand. 

    Mais revenons au problème. 

    Quelques précisions d'abord. Il n'y a de classification que sur des objets déjà identifiés. La chaine de traitement est donc formée de 2 modules au moins: un extracteur de caractéristiques et un classifieur. Ce principe est totalement général: on n'élabore rien sur du sable, ou de l'eau. Il faut d'abord faire des tas, ou des tasses et après on commence à comparer ou a choisir. Toutes les techniques d'apprentissages ne concernent que les extracteurs, et il importe de comprendre pourquoi. D'abord, une classification ne peut être que linéaire, c'est à dire qu'elle consiste à diviser un espace d'objets en zones distinctes séparées par des plans. De part et d'autre on trouve des zones qui ne contiennent QUE des points identiques du point de vue de la classification, du moins c'est ce qu'on a calculé en "apprenant" à partir d'un nombre fini d'exemples.  Un nouveau point, le "truc" à reconnaitre se positionne dans l'espace au dessus ou au dessus du fameux plan et se trouve donc "reconnu". 

    Quand le problème impose des surfaces de séparations convoluées et non linéaires, on ne peut presque rien faire. Pour obtenir des séparations linéaires, il faut ajouter des dimensions et chercher des projections dans d'autres espaces, plus commodes à découper. 

    Le Cun n'en fait pas mystère: on a des espaces de grande dimensions, et la surface en question est un un espace de dimension inférieure inclus dans le premier. Car il y a autant de dimensions que de variations possibles, par exemple une image de 1 méga pixels donne bien un ensemble de 1 million de dimensions, chacun de ses axes ayant 24 degrés. Un autre exemple, saisissant est celui des ensembles de visages soumis à Facebook: le nombre de dimensions serait le nombre de muscles du visage humain (on oublie les cheveux et les orientations de la tête). Environ 50, avec des variations continues de leur contractions. Reconnaitre c'est isoler les régions qui se ressemblent. Un voile tortillé partage cet espace là, une surface impossible mais calculable. LA surface, si on savait la construire, permettrait de tout faire... 

    Pour parvenir à tout ça, on commence par le perceptron. Inventé en 1957 par Franck Rosenblatt, il est une sorte de rétine artificielle qui répond oui ou non après qu'on ait agencé ses bits de vision répartis sur une surface. Plus exactement la machine fait une somme pondérée des valeurs de ses bits, un jeu de poids particuliers qualifiant un état donné du perceptron. 

    Les systèmes à deux couches sont prouvés, et suffisent à tout modéliser. C'est un théorème, qui prouvant (existentiellement bien sur, et seulement) qu'on a -toujours- une solution se permet de considérer acceptable celles qui sont vraiment compliquées: des centaines voire des centaines de milliards de dimensions et de paramètres à introduire, bref, en général c'est l'horreur. Ces espaces gigantesques furent à l'origine d'un long mépris: le perceptron, comme énumération fastidieuse n'était qu'un immense réseau de "if", inintéressant et stérile et surtout totalement impuissant.

    On passa alors au multicouches, en fait à plusieurs modules en série qui chacun transforment leur entrées avec leurs propres "poids". Chaque niveau a donc sa matrice de coefficients de transformation. Ce sont ces coefficients qu'on sélectionne et qu'on ajuste lors de la comparaison du résultat global avec ce qu'on veut voir deviner. Ce qu'on appelle la "rétropropagation du gradient" consiste à modifier les poids d'un module d'autant plus qu'ils contribuent à l'erreur. L'algorithme est itératif, bien sur, on corrige progressivement, exemple par exemple en supervisant donc l'évolution des différents modules et au bout d'un certain temps, le système se stabilise, le réseau multicouches a "appris". Un point intéressant est que le test du système "global", bien sur capable de reconnaitre les exemples qu'on lui a soumis pendant l'entrainement (c'est bien le moins) doit aussi être capable de reconnaitre des ensembles de tests particulier, mais ceux "nouveaux" pour lui... Pour le reste: inch Allah ! La voiture se débrouillera... 

    Mis au point en 85/86 et en particulier par Le Cun lui même la méthode fonctionne bien, voire même très bien. Elle fut d'autant plus utilisée que vers 2012, on se mit à utiliser les processeurs graphiques des PC "gamers" indispensables aux jeux vidéos, pour accélérer la chose. Les fameux GPU se mirent à calculer autre chose que les lapins crétins: hardware dédiés au calcul parallèle de multiplications entre matrices, ils permirent des facteurs mille d'augmentation des performances. Par contre, un point intéressant: il n'y a pas de résultats mathématiques qui expliquent ou justifient le fait que les systèmes "profonds" soient aussi efficaces. Seul un robot supérieur à l'homme pourra prouver la chose, sans doute, en tout cas bien des gens sont sur sur le coup en ce moment. 

    Mais il y a encore mieux ou plus ! Les réseaux convolutifs. Il s'agit d'une application aux plans de neurones de la technique de convolution, qui consiste à isoler des petites portions d'espace et de leur appliquer un traitement particulier, toujours le même. De proche en proche, on recouvre finalement tout le plan. Tout se passe comme si chaque tuile était un réseau particulier avec son ensemble de poids. Tous les ensembles de poids sont identiques (c'est ça la convolution) et chaque tuile produit un résultat (elle a un neurone associé). Cette technique, inventée par Le Cun s'est trouvé très efficace, par exemple pour lire des chèques (on ne se lassera pourtant jamais de trouver qu'écrire un chèque à la main est particulièrement idiot). La chaine de traitement multicouches de 1987 fut reprise à l'identique vingt cinq ans après, et après améliorations se mit à faire des merveilles. 

    Allez, on en rajoute une ? 

    Il y a une célèbre maxime qui permet de comparer toute pratique innovante au "teenage sex": tout le monde en parle, personne ne sait ce que sait, tout le monde croit que tout le monde le fait, et tout le monde prétend en faire.

    On y est en plein, l'excitation généralisée étant à son comble, Facebook (là où travaille Le Cun) ou Google devenant tellement forts que leurs robots pourraient être plus puissant que ceux de l'armée, raison de plus pour nationaliser les GAFA, il fallait y penser. 

    Toutes ces belles techniques sont donc en plein progrès. Une application intéressante de cet apprentissage est la "boterie" ou l'élevage de "bot", un bot étant une machine apte à dialoguer sur des messageries instantanées. Participant aux discussions collectives, capables d'exécuter certaines tâches tout comme tout un chacun, on s'acheminerait donc vers des équipes de travail mixtes comprenant un ou plusieurs robots, dont on ne saurait pas très bien le niveau de conscience, et d'ailleurs c'est déjà le cas avec les humains eux mêmes, tout le monde le sait bien.

    L'important est que le degré de complexité de la conversation serait lissé, les jargons d'adolescent étant particulièrement bien adaptés à la commande de machines: un seul milieu de travail et de commande et pourquoi pas organiser des communautés de production autour de tels processus ? En charge de démarrer sur ordre des chaines de taches plus ou moins formalisées, capable d'en saisir le paramètrage dans des contextes bien connus, les fameux "agents" ont bien une réalité, il suffit que le fameux contexte, bien verrouillé soit en place et surveillé de loin en loin... 

    On se retrouverait là non pas dans l'intelligent, mais dans ce qui a toujours vexé et humilié la vraie intelligence, je veux dire la bureaucratie, fonction exclusive des secrétaires, femmes enceintes récemment revenues de couches et des pré retraités. Ce cadre là est aussi celui des fameux "jobs de merde" dont l'apparition aurait mécaniquement générée l'ambition de leur disparition, vous verrez, les chtis bouseux  se révolteront quand même... 

    Les considérations sur le thèmes sont évidemment multi couches encore, et on pourrait parler des techniques d'apprentissage utilisant des jeux d'exemples erronés pour plus d'efficacité: en présence de bruit, et pour des raisons bien évidemment inconnues, l'apprentissage est meilleur !

    On doit aussi mentionner une théorie expliquant au moins en principe l'efficacité du multicouches: il encoderait une hiérarchie des structures à reconnaitre, le qualificatif de "profondeur" désignant le nombre de niveaux (layer, couche) que possède le problème de reconnaissance à traiter, c'est à dire le nombre de plans indépendants emboités qui constituent le problème. Une telle figuration, d'ailleurs proprement logicielle au sens classique, désignerait ainsi les espaces conceptuels indépendants, quasiment "idéaux" qui constituent -réellement- le réel de ce qu'on veut classifier. Comme si l'approche neuronale, fourmillière, n'était qu'un moyen détourné, salement biologique, d'en revenir aux sphères et dodécaèdres de la grande science, la seule, la vraie. 

     

  • Les notes de musique

    UT queant laxis

    REsonare fibris

    MIra gestorum

    FAmuli tuorum

    SOLve polluti

    LAbii reatum

    Sancte Iohannes.

     

    Les  notes: Do C UT , Ré D  , Mi  E , Fa  F , Sol G , La  A , Si  Anglais: B , Allemand : H  , Si bemol=B 

    C Do , F c'est FAcile, Ré c'est RéD 

    Les demi tons:   dièze, bémol  ; sharp,flat   ; -is , -es

     

    Les modes: majeur, mineur  ; major,minor   ; dur,moll

     

    Donc

    la messe en Si mineur, B minor, H moll

    le concerto en Si bémol majeur, B flat major, H dur   

     

    Le système tonal occidental est construit sur un système harmonique "perturbé". Harmonique veut dire "plaisant" à l'oreille, capable de distinguer des sonorités distinctes et mieux, de "reconnaitre" des "tons", les notes.  

    On a 7 tons distincts, représentés par le motif répétitif du piano. Chaque motif décrivant les tons d'une octave, chaque octave ayant sa première note de fréquence double (deux fois plus aigue) que l'octave qui précède.

    Ces tons ne sont pas des points mais des "plages", des ensembles de sons apparentés. La largeur de ces plages n'est pas uniforme, et c'est tout le problème. Disons qu'en fait, il y a 12 notes (comme de juste)  et qu'elles sont regroupées et renommées. Cette échelle à 12 tons est la gamme "chromatique", systématique. 

    Ces notes sont en fait des demis tons. Chaque demi ton est le "dièze" de celui qui précède et le "bémol" de celui qui suit. Par exemple, "fa dièze" et égal à "sol bémol". C'est la touche noire du piano qui sépare le demi ton "fa" et le demi ton "sol". Par contre et c'est tout le charme de la chose, le nommage des demi tons n'est pas uniforme: "do bémol" est égal à "si" et "si dièze" est égal à "do" lors d'un changement d'octave, et surtout (pourquoi surtout?) , "mi dièze" est égal à "fa", et "fa bémol" est égal à "mi". 

    C'est le piano, andouille: do, do diéze/ré bémol, ré, ré dièze/mi bémol, mi, fa, fa dièze/sol bémol, sol, sol dièze/la bémol, la, la dièze/si bemol, si. 

    En fait, (je me fie à mon oreille), on dit: do, do dièze, ré, mi bémol, mi , fa, fa dièze, sol , la bémol, la , si bémol, si. 

    Ce sont les 12 vraies "notes" ou "demi tons".   On remarquera les perturbations fondamentales, le grand mystère de la musique: mi et fa sont à un demi ton de différence, tout comme si et do. Toute la complexité de la théorie de la musique est là... On appelle gamme "chromatique" l'ensemble de ces 12 demi tons. Notons bien que le premier d'entre eux, si on double sa fréquence prend le même nom, mais "à l'octave". Les gammes se succèdent ainsi du grave vers l'aigu ou dans l'autre direction si on veut... Mais le do reste le do. 

    Maintenant, reste à expliquer cette histoire de "mode" mineur et majeur....

    En gros, pour chanter il suffit de 7 notes. C'est tout ce que l'on peut (même si moi j'en suis incapable) distinguer mélodiquement. 7 notes distinctes constituent une "tonalité", (on peut dire une "gamme"). Dans une tonalité, comme on a dit, il y a 7 demi tons choisis parmi les 12 possibles.

    Une tonalité est identifiée  par une note de départ, par exemple si bémol, et par une structure de choix des notes qui se suivent et qui recouvrent toute la gamme chromatique. Les 7 notes à utiliser sont trouvées successivement en ajoutant un ou deux demi tons pour trouver la note suivante.

    La gamme de do majeur sera ainsi typiquement formée des touches blanches du piano exclusivement.  

    En partant de "do", on fait (en unités de 1/2 ton) +1 (ré), +1 (mi),+1/2 (fa), +1(sol), +1(la), +1(si), +1/2, (do)

    Ainsi donc le majeur c'est 7 notes parmi douze avec seulement deux "perturbations", après 2 tons et après 3 tons.

    On a douze notes, et donc douzes tonalités "majeures" possibles basée sur cette structure...

    Mieux, un "mode" désigne une structure possible de répartition des 7 notes, incluant les couples maudits de deux notes successives distinctes alors que séparées de seulement un demi ton. 

    Le premier mode, le mode "ionien" est celui qui correspond au mode "majeur" expliqué plus haut. Le terme "ionien" est purement conventionnel et le mot est celui d'une classification faite arbitrairement à la renaissance... 

    On a 7 intervalles entre 7 notes à caractériser.

    Le mode majeur est donc de type 2,3  (2 tons successifs, un demi ton, 3 tons, un demi ton)

    Le mode mineur  sera: 1,2,2. En fait dans le mode mineur "classique", il y a une violation caractérisée de la règle, l'avant dernière note  occupant 3 demi tons ! 

    Pour être plus précis, on appelle les modes "diatoniques" les modes obtenus en décalant le mode "majeur", chaque mode étant nommé par le nom de la première note. Le mode de "do" sera le mode "majeur", et le mode "mineur" sera le mode de "la". Les autres sont des modes exotiques. En fait les 4 modes diatoniques utilisés aux moyen âge (ceux de mi, fa, sol, et ré) furent abandonnés au XVIIème siècle en faveur des modes "classiques" majeur et mineur. 

     

     

     

     

  • Les concertos pour violon de Vivaldi

    Antonio Vivaldi dit "il prete rosso", rouquin et prêtre donc, a composé comme il respire un nombre indéfini de concertos pour violon qu'il vendait à la pelle pour payer ses dettes. Certains font la fine bouche devant ces munificences, (un seul concerto infiniment long et chiant), d'autres, dont moi collectionnent leurs écoutes comme des papillons. 

    Certains d'entre eux sont à tomber par terre de surprise. On n'en finit pas de se faire prendre, éberlué, par des machins de derrière les fagots qu'on voudrait ne jamais oublier. 

     

    RV 128 en Ré minor: 

    Un Allegro con molto ahurissant: la répétition dans toutes les dissonances d'une langueur folle de tout le violon: une idée extraordinaire déclinée de toutes les manières possibles. On note des divergences étonnantes entre les interprétations: depuis l'ultra dynamique jusqu'au dissonant tordu. Le Largo est menaçant, tout simplement: ta da da da, et très bref. La fin est ultra brillante et ultra rapide, foldingue. 

    RV 267: le premier mouvement est complètement dingue, deux danses obstinées délirantes avec une grande période lente entre les deux; un andante rythmé tout sautillant en virtuosité absolue absolument saisissant qui vous emmène n'importe où, avec un clavecin qui se moque de vous derrière et qui se permet de conclure. Une totale merveille ! Le troisième mouvement, quelconque, recouvre le bijou derrière une étoffe un peu prétentieuse, avec une fin faussement vertuose... 

    RV 134: une entrée étonnée, et puis un martellement complexe doublé, triplé, arrêté, redémarré et le grand air qui revient, tchac, tchac. Quand le virtuose chantant multiplié par deux, devient ultra compliqué... L'andante avec le luth, tout délicat est une merveille absolue. Tchac, Tchac. Et c'est très court. On termine avec énergie, sans y toucher. 

    RV 281: la folie totale, le plus grand de tous, sans doute... Une intro musclée et l'explosion foldingue, tempérée deux fois. Le grand air, et on repart... Le solo est divin extrêmement pointu et puis le jeu du patron (c'est Carmignola qui régale). Le tambour encore et la folie revient. Puis encore Carmignola, le sujet romantique de l'âge baroque totalement libéré qui élabore. Tout se mélange à une hauteur démente, infaisable et la folie encore. Mais pour finir, tempérée et pour en revenir au début, mais cette fois pour conclure. Un point: la prise de son fait pour Carmignola rend particulièrement audible le caractère enchassé des sons de Vivaldi: le soliste est dans une chambre d'échos entouré par sa garde qui l'approuve par un contre souffle, comme un voile qui le recouvrirait. 

    Le Largo martelé, est à la hauteur, dans un souffle puissant, méditatif, de cette grandeur triste d'un Vivaldi qui se permet d'y inventer des nouvelles façons de l'être, triste. Et puis toujours, cette pudeur qui ramène le groupe pour interrompre l'individu ou le ramener de son voyage sur le grand lac. Le troisième est celui du groupe à la hauteur du premier, qui relance Carmignola en un truc quasi miraculeux incroyablement virtuose en écho avec l'orchestre, plusieurs fois. Toujours l'incroyable solitude pointue du soliste, et puis les tambours qui viennent le chercher. Ces fameux tambours sont bien sur des cordes, points de tam tam ici (à part la caisse des violes, mais est cela qui produit l'effet?) le plus extrême des aigus des lames aiguilles tranchantes accompagnant les soupirs profonds... 

     

    P.S. Des commentaires passionnés encore plus riches avec la classification en "opus" des oeuvres de tonio et des exemples:  https://www.musicologie.org/publirem/rusquet_vivaldi.html 

    La Stravaganza c'est l'opus 4, les 4 saisons c'est l'opus 8, la Cetra l'opus 9.

  • L'espérance de Fakir

    Traité jeune pour une épilepsie, une femme eut deux enfants autistes, ils avaient une chance importante, après exposition in utero à de l'acide valproïque de le devenir (30 à 40% de cas de retard cognitifs) . Connus pour des effets tératogènes (10% des cas) depuis les années 80, cette substance donna lieu au scandale récent de la Depakine. Prescrite aux épileptiques et aussi pour les "troubles de l'humeur" (avec le lithium, les maniaco dépressifs, quoi, le mal du siècle), elle est aussi fortement déconseillée aux femmes enceintes souffrant de ces maux là... Pourtant après la publication de ces risques, elle fut tout de même mal prescrite et cela se traduisit par les drames possibles en rapport. 

    L'article de Fakir qui relate l'histoire condamne le règne de l'argent exercé par les laboratoires pharmaceutiques qui vendirent ce poison pour pouvoir mieux se "gaver", se "goinfrer", etc etc aux dépends d'enfants débiles, de parents désespérés. Tous les malheurs du monde causés par l'argent, l'argent fou dont se goinfrent et se gavent les actionnaires pourris hyper riches qui vivent et se goinfrent et se gavent du malheur des innocents...Il faut qu'ils payent et que la totalité des bénéfices indus qu'ils déclarent soient donnés aux victimes...

    Fakir parle aussi d'espérance, celle d'un monde, d'un état des choses, ou le malheur du monde ne serait plus là, car organisé différemment, non seulement l'épilepsie ne serait plus là, mais aussi les infâmes remèdes qui la soignent au prix d'enfants débiles dont le malheur peut aussi être d'origine héréditaire, qui sait. Pour cela, l'importance de l'abolition du règne de l'argent est majeure: elle constitue (peut être) un préalable... 

    Que considéré et connu pour une arme efficace contre un malheur, cette drogue en provoque d'autres dans des cas relevant de choix ou de hasards mal informés fait partie du monde et les cas extrêmes, oui doivent être indemnisés voire poursuivis, pour que les alertes informatives sur les drogues et les pratiques dangereuses soient publiques. Au point d'aller jusqu'à l'obsession maladive du risque et la règlementation autoritaire de toutes les pratiques ? A moins qu'on ne puisse améliorer les pratiques et après la thalidomide, il y a cinquante ans, à nouveau faire en sorte que le drame absolu du médicament poison ne se reproduise pas ou au moins moins bien, qu'avant ? 

    La réflexion sur le règne de l'argent deviendrait elle alors une réflexion sur la liberté ? Nous ne sommes pas à l'époque de la liberté mais de celle de la dénonciation morale. 

    Cette espérance qu'est elle? Elle est aussi ce qui motive, confusément, les personnes poussées par un idéal religieux à aller combattre l'injustice en Syrie. Poussés par autre chose (évidemment) que l'envie d'écorcher des bébés et de violer des jeunes mécréantes, ils ne peuvent que souffrir du terrible mal qui ronge l'occident: l'argent et la perte de l'espérance. S'agit il d'excuser ou d'expliquer ? On pourrait dire qu'il s'agit de comprendre. Ou bien de choquer les fascistes qui ne veulent que les déchoir de la nationalité et les buter dans les chiottes. 

    Fakir nous la fait donc dans l'espoir. Cette espérance, qu'est elle ? 

    Est elle celle du salut ? Le fameux salut qui tarabusta tant nos ancêtres attachés aux religions et vivant non pas dans le malheur prolétaire du présent, mais dans la crainte des souffrances éternelles, bien pires, de l'enfer ?

    Car le malheur du présent est un signe, un signe du futur, et c'est là l'incroyable force de ce sentiment: ce futur peut être l'infernale damnation éternelle, la chose la plus redoutable qui soit, et qui peut ne pas arriver. Car l'espérance ancienne, c'était celle d'autre chose que de cela...  Mais cela c'était avant: l'enfer a disparu et personne n'en a plus peur, ou bien alors sous une autre forme et nous y voilà donc. 

    Et puis le mot, tout droit tiré des vieilles croyances, est attaché au soupir sentimental de l'impossible souhaitable malgré tout, qui serait, c'est là le débat, la marque du bien: comment ne pas s'enthousiasmer, au nom de la jeunesse et de l'idéal, de la passion pour l'impossible ? C'est parce que la disparition du mal est impossible qu'on fait le bien en la souhaitant. Car l'enfer est sur terre, et il est éternel, voilà la thèse, ou plutôt la gnose, le terrible mal qui ronge l'occident à nouveau en proie aux millénarismes. 

    Il y a dans le Fakir en question un article étrange, quand l'auteur aide un jeune SDF à transporter une machine à laver: à l'exemple de Simon de Cyrène qui aida le christ à porter sa croix... Est ce faire le bien que d'aider le sauveur du monde à surmonter une faiblesse passagère ? Pénétré de la signification, des théologiens moralistes du XXIème siècle, par ailleurs voulant abolir le règne de l'argent, font les déménageurs gratuitement... Je m'égare, mais on est là dans l'interprétation tendancieuse, voire à contre sens, en tout cas discutable... Y a t-il du malheur et cela est il mal ? Voilà la question: seul idéal possible, la dénonciation du malheur et du mal doit nous occuper, et l'espérance confuse justification du malheur qu'on doit infliger aux autres comme preuve supplémentaire de l'inéluctabilité de ce sentiment qui nous fait vivre: l'espérance sans objet, le mal absolu dont on se goinfre, dont on se gave. 

    Ces gens sont des misérables et souffrent horriblement, ou bien jouissent de ce qu'ils s'imaginent être l'enfer, leur vie sur terre. Le spectacle qu'ils donnent est désespérant. Que faut il espérer pour l'interrompre ?

    La société soviétique d'avant la chute (du mur) peut donner un exemple de ce qui pourrait être la solution: un enfer liberticide mais partagé, dont les solidarités collectives nécessaires faisait le lien social. C'est ce que souhaitent politiquement nos petits saints idéalistes. Privés d'industrie chimique, les épileptiques pourraient baver à souhait sans qu'on les féconde exagérément: point de folie infantile bourgeoise dans ce monde là. Quelle espérance dans ce monde là? Et bien la même que la nôtre, celle de la Liberté, celle de s'arracher à la connerie de l'oppression et du malheur, mais non pas pour s'en faire des idoles, des monstres, ou des dieux nouveaux: pour s'en moquer au delà du possible !

    Malheur au fakir assez con pour se faire mal lui même: je le conchie le moque et le méprise: je me torche avec son espérance, et le méprise au point de ne rien lui dire de plus que ce que moi j'essaye d'affronter: le silence, distrait par quelques musiques, de l'énigmatique Liberté. 

  • La nocturne numéro 13

    http://player.qobuz.com/#!/album/0190295896423  (David Fray Chopin)

    est un disque comme un autre, avec une prise de son qui sonne bien (ça tombe bien) dans mon casque.

    En gros un pot pourri de petites pièces de Chopin, jouée par un pianiste expérimenté, qui a du travailler la chose, et qui joue et enregistre avec du matériel convenable pour son époque. 

    Le nocturne numéro 13 en Ut Mineur opus 48 numéro 1 est long pour un nocturne, et il est absolument dramatique, 

    J'avoue bien aimer le nocturne numéro 15 aussi. Les nocturnes c'est du Chopin gnan gnan, certes, mais avec des variations de discours toutes en subtilité et en brièveté qui en font des "bijoux" extraordinaires, des monuments de réthorique pleins de sens multiples. 

    Car comment décrire autrement ces merveilles que comme des pensées exprimée dans un language? Cela est d'ailleurs dit par Chopin lui même, c'était précisément ce qu'il disait: la musique est l'art d'exprimer sa pensée par des sons. Cette permanente association de la musique et du langage, idée baroque au demeurant, est bien revendiquée par Chopin le romantique. Voilà donc le style du monsieur, la revendication précise que jouer c'est parler, qu'il faut phraser, dire, c'est ce qu'il recommande en permanence à ses élèves. Que cette idée de la musique comme langage soit baroque me rassure sur moi même: j'ai donc raison et connais donc mes gouts: chez Chopin on est chez Bach. 

    Ainsi donc voilà aussi pourquoi il jouait par coeur tout le clavecin bien tempéré et le recommandait aux pianistes qu'il conseillait: l'homme est un bavard, baroquement bavard, mais surtout il vénère Bach au delà de tout. Comme quoi le vieux boche eut bien des admirateurs, et pas des moindres. Pour finir avec les rapprochements théoriques, il est intéressant de savoir que le piano de Chopin doit être considéré comme un chant, la voix humaine étant là, l'humain qui s'exprime étant ici, immédiatement présent. 

    Le nocturne 13 c'est d'abord sa mélodie, au dessus du rythme puissant de l'introduction, deux fois, et puis cela s'affirme, je vous le dis gentiment 2 fois aussi. Une petite réflexion triste, et puis le ton monte: TADA DADA 2 fois. Le dernier regret, d'un triste presque neutre mais bien réel et puis le ronflement commence, mais d'abord hésitant, comme si on regrettait, mais c'est parti: roulements de tambour multiples, de plus en plus forts. Dans un autre ton, et enfin la vague déferle deux fois, puissamment, et on rappelle la mélodie du début mais encore toute en écume. Le frémissement semble repartir avec deux grands soupirs, un éclat et une affirmation grave puis la descente finale, un dernier souffle et enfin ce qui reste du rythme et qui vient s'éteindre enfin... 

    Avant le roulement, qui s'annonce avec progression, là ou on peut menacer pour notre délice, se situe le moment de "la fenêtre ouverte" propre à presque toutes les pièces de piano de Chopin: le moment ou la méditation romantique est suspendue, fenêtre ouverte, et ou on entend les bruits de la ville, propres à distraire, apaiser, enchanter, mais aussi exciter. Car la puissance psychique du maitre reprend le dessus et peut alors enfin se déchainer... Ah Chopin... 

    Le nocturne est le lieu du "Tempo Rubato", le temps "dérobé", l'altération de la mesure qui permet d'écarter les notes du rythme pour produire ces effets étranges d'hésitation et d'excitation. Chopin en est le champion du monde... Car la musique c'est aussi l'art du temps, plus exactement l'art de "voler" (rubare il tempo), de transformer, d'habiter le temps. Plus exactement, du moins de mon point de vue, on a là ce qui fait l'incroyable puissance de la musique occidentale que j'aime: celle qui fait que le rythme sort de la musique au lieu d'en être le préalable. Il n'y a pas de basse répétitive derrière, pas de coeur qui bat, pas de sang qui gicle au début: tout cela est inventé dans le temps du son musical et se trouve issu du déroulement temporel de la pièce, véritablement exprimé, comme crée sous nos yeux. Le rubato et ses infinies variations, danse et chant, figure de toutes les émotions possibles en est bien sur la manifestation... 

    Inventé par John Field (qui vécut en Russie), juste avant Chopin, le nocturne est donc le haiku occidental, la petite pièce courte pleine de poésie. Dans le premier d'entre eux, on trouve même ce qu'a pompé Chopin: un petit éclat, noyé dans dans le flot très convenu d'un "vieux", à peine en train de transitionner (né en 82, il meurt en 37). Le sixième est particulièrement complexe et admirablement "nocturne". 

    http://player.qobuz.com/#!/album/0002894789675 

    Il est toujours plaisant d'entendre les précurseurs, et en général ceux dont s'inspirèrent les maitres. On réalise à quel point un Chopin fut génial: totalement libre, il navigue sans répétition, complètement maitre du son, du temps et de l'émotion.

    Revenons au numéro 15 de Chopin. La mélodie d'introduction est construite sur un rythme moins puissant mais tout aussi insistant. Et puis l'arpège dans le petit air triste est délicieux. Après un silence, elle revient encore mais altérée, et de plus en plus allongée. On cogne alors, brutalement, mais en rythme deux fois et le roulement se met en place. Mais cela ne se concrétise pas,  une descente affirmative sur un ton significatif précède le retour de la mélodie ultra calme, avec le nocturne scintillement qui s'accélère. Un peu grave et quelques scintillements, et c'est fini, comme une petite vague. Une merveille.

    Mais la 13 continue de m'obséder. Tous les grands s'y essayent: 

    Pires est particulièrement grave et puissant: 

    https://www.youtube.com/watch?v=fck-EoNcFyg

    On doit citer Valentina Lisitsa, l'ukrainienne pro russe qui se fit censurer pour cela: 

    https://www.youtube.com/watch?v=8ZzzQbvFBJg

    Et puis Rubenstein (je l'ai vu en concert jouer Chopin, comme on dit).

    https://www.youtube.com/watch?v=-7mntyrW3HU

    Samson François dans mon enregistrement qui grésille dans sa dynamique est particulièrement puissant et détaillé. Cela est il si difficile à jouer ? Difficile de dire: le musicien est un magicien et sa magie n'est pas un fait mais un évènement...