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  • l'Europe l'Europe l'Europe

    Ainsi donc ça discute sur l'Europe, l'occasion est bonne, son périmètre évolue, si tant est que la présence de la Grande Bretagne dans ou hors de l'Europe change grand chose aux principes fondamentaux que nous devons réfléchir. 

    La Grande Bretagne fut toujours en faveur des mouvements migratoires intra européens. Du moins son gouvernement, la réaction anti immigration qui partiellement produisit le brexit fut populaire… En fait la réaction anti libérale qu'on nous décrit fut d'abord contre ce libéralisme là. On voit donc que l'attribution de l'anti européanisme est complexe et source de bien des affirmation péremptoires: les ouvriers anglais se révoltèrent donc non contre la finance mais contre l'immigration. Bien sur Mélanchon pense le contraire. 

    Au fil des discussions et des lectures un ensemble de thèmes apparait et la complexité de la chose est tout à fait ravissante, tant les points de vue sont variés et les chocs d'arguments divers. 

    On parlera d'abord des trois Europes possibles. On a en effet trois projets, et il faut savoir de quoi on parle. D'abord le libre échangisme pur: laissons les entreprises commercer et les politiques nationales se déployer dans le plus vaste espace possible, en supprimant toute politique de contrôles des échanges. 

    Ensuite, l'Europe fédérale: non pas simplement le triste commerce (les lumières parlaient du "doux", mais le marxisme est passé par là), mais aussi la fusion des peuples, la disparition des inutiles et guerrières nations et la reconstitution de l'Empire Romain (germanique ou austro hongrois, c'est à dire prussien, voire polonais). 

    Il y a une alternative ! Une troisième Europe, dite politique, considéra que les nations pouvaient discuter et mettre en commun ce qu'elles pourraient décider ensemble, pour le plus grand bien de la prospérité générale, basée bien sur l'abaissement contrôlé des barrières douanières, pourvu, on le vérifie à chaque niveau, qu'elles soient acceptées par les acteurs (le camembert au lait cru reste recherché dans certains milieux français) et profitables effectivement à tous. Au passage, on se définit une monnaie commune, pour échapper aux puissances des autres monnaies, et des frontières communes pour filtrer les migrants envahisseurs, légaux ou illégaux. Le bon sens. 

    Au passage, on s'assurera que les impôts sur les sociétés sont les mêmes partout, pour éviter de trop pénaliser les pays de débiles dont tous les efforts productifs sont consacrés à maintenir des fonctionnaires inutiles chargés à tort de dépenser pour le bien des producteurs d'écrans plats tout l'argent qu'on leur consacre. 

    La question fut depuis le début, le projet fédéral. Il faut savoir qu'une partie des "élites" européennes sont hors sol: métissées entre riches blancs, ils ont toujours fait la civilisation européenne et eurent bien des mérites dans toute l'histoire, mais là voulurent généraliser leur condition: erasmus, les plombiers, les ouvriers de l'automobile en roumanie, tout ça c'est pareil, foin des nations. Cette espérance fut aussi poussée par ceux qui attribuèrent aux nations les malheurs du début du XXème siècle, comme par hasard, ils furent partiellement les nostalgiques de l'empire austro hongrois, première victime du premier épisode.

    Le fameux Coudenhove-Kalergi, cauchemar des souverainistes est l'image de cette vision (…).  Malgré tout il est un fondateur de l'Union Européenne actuelle, il faut de tout pour faire un monde. Il faut toutefois noter qu'il ne vit de l'Europe que celle, purement politique, qu'un De Gaulle imposa pour continuer d'y participer. C'est bien lui par contre, qui eut l'idée de faire de l'hymne à la joie de Beethoven l'hymne européen.

    On pourrait aussi parler de Walter Hallstein, envoyé par Hitler pour fonder l'Europe, et qui fut le premier président de la commission européenne. Comme Von Braun il fut récupéré par les américains, ce qui est bien sur le fond de l'affaire: car cette europe fédéraliste, se voulant confusément porter le projet des états unis d'Europe, à l'image des USA, et donc c'est ce que disent les souverainistes, un projet secret entièrement comploté depuis les US. 

    On pourrait alors parler d'une quatrième Europe, celle des souverainistes, et se poser la question de savoir en quoi elle diffère de mon Europe "politique".  Et bien d'abord elle n'est pas libérale et donc ne veut aucune politique économique commune depuis le libre échange jusqu'à la monnaie commune. Cette vision là, aussi ambiguë que la fédéraliste, d'ailleurs, ne veut tout simplement pas d'Europe, du moins pas sous une forme différente d'une suite d'accords d'état à état, ce qui n'est pas très innovant, étant le système qui prévaut depuis le moyen âge. 

    Nous sommes donc entre nous: même si une partie des souverainistes, du moins les libéraux, peuvent continuer de râler contre l'Europe sans s'en séparer tout à fait, il y a bien une vision libérale non fédéraliste de l'Europe, qui est précisément ce que défendent implicitement bien des europhobes et qui, réaffirmée, devrait sauver l'Union, dont les institutions, mais pas la pratique actuelle, est parfaitement compatible avec le point de vue de l'évidence et du bon sens.

    En parlant de bon sens, on a évoqué l'économique, et la fédération a bien des avantages, dont le principal, celui de pallier la bien connue disparités entre les cultures, celle qui fait de certains peuples des cigales corrompues et d'autres des fourmis généreuses (à moins que cela ne soit l'inverse, si l'égoïste fourmi se refuse à donner). Devoir de tous les empires, du moins des modernes, il faut donc compenser les niveaux d'emprunts et de corruption (absence de réformes) des pays, généralement du sud, la proportion de sang méditerranéen étant bien sur la cause du mal, passage de l'empire Ottoman sur l'ascendance oblige.

    Problème bien connu des allemands, qui venant de le voir à l'oeuvre en soignant leurs frères et soeurs simplement violés pendant cinquante ans, il fut traité de manière stricte, par une monnaie indépendante qui se refuse rituellement à toutes les demandes toutes aussi rituelles d'"investissement d'avenir" dans les pays qui soit ne recouvrent pas l'impôt, soit en en recouvrent tant qu'ils ne peuvent s'investir eux mêmes, toutes leurs ressources étant consacrées à financer les jours de carence de leurs fonctionnaires. 

    Nous avons là d'ailleurs une cause d'europhobie: la terrible politique d'austérité européenne qui abat sa main de fer sur les populations misérables sans défense (bien que défendues par tout ce qui reste au monde de communisme et de syndicalisme révolutionnaire).

    En réalité, laissés à eux mêmes avec une capacité à emprunter dans une monnaie forte qui dispose de prêteurs en dernier ressort puissants, les pays "nègres" se sont horriblement goinfrés, ont tous formé une caste de super riches, quasiment d'oligarques, mais assez malins pour constituer aussi leur sous caste de fonctionnaires prébendiers, chargés de maintenir vivante l'originalité des traditions populaires mais cette fois sans travailler. C'est évidemment cette caste là, entièrement caractérisée par l'expression "toujours plus" qui hurle à l'austérité en permanence, tant elle est frustrée de réaliser sans la diagnostiquer, l'extraordinaire abaissement de sa condition qui la rend progressivement non européenne… 

    Là fut l'abjection française, qui s'éloigna, en ne faisant rien depuis quinze ans, de l'Allemagne qui se réformait… La pauvre germaine mit en place sa politique nationale et tira ce qu'elle devait tirer de son action. On le lui reproche à tort. Elle finança un "ost" retrouvé qui bien que champion du pacte de Varsovie, était (et se trouve toujours) dans un état  pitoyable. S'agit t-il de pauvres à bon compte que les ignobles patrons germains exploitèrent sans vergogne ? Et bien si c'est le cas, la patrie de Karl Mark attend toujours sa révolution, les réformes sociales de cette partie là de l'Europe ayant été faites par des viols de conscience, et quand je parle de conscience…  

    On doit aborder la question de la politique étrangère: tiraillée entre les demandes d'élargissement (on pense à la Turquie), les demandes fantasmatiques de protection (on pense aux pays de l'est traumatisés par la Russie), les volontés de faire la paix au moyen orient (l'Union est le principal financier de la bande de gaza, un comble), l'Europe fait n'importe quoi, aux grès des fantasmes de nouveaux occidentaux variés hésitants et confus, sans parler des démagogies variées, voir plus haut.  

    Une constante: la fameuse défense européenne qui doit se soustraire à l'OTAN d'une part (la Turquie en fait partie), et d'autre part du piège du partage de l'arme atomique française avec les allemands. Bref, on préfère l'OTAN, malgré tout, en fait une politique d'alliances, tout simplement, en particulier avec la Grande Bretagne brexit ou non, et surtout, c'est ce que l'on demande à raison, que l'on finance ces fameuses opérations extérieures, qui surveillant tout de même milles kilomètres d'Afrique, finissent par nous couter cher. 

    Mais l'abjection française pays fondateur, eut un autre rôle. Rappelé par François Fillon et cela suscita des protestations à l'assemblée, elle fut le cynisme avec lequel les gouvernements socialistes accusèrent l'Europe de tous les maux, jusqu'à l'"austérité" qu'on dénonce encore, jusqu'aux traités qu'on veut "renégocier" encore et toujours pour plus d'"investissement". Conçue pour servir de repoussoir à l'échec du changement de la vie, et par le ministre des finances de la relance puis de la pause dans les "réformes" (Delors engendra Aubry, faut il le rappeler? ) cette Europe là est l'épouvantail de la démagogie du collabo complice du vel d'hiv. Et il fallut que le cancéreux lamentable dont on souhaitait qu'il souffre le plus possible fasse pitié à son principal opposant pour que l'on vota son sinistre traité…

    Traité que l'on se doit de porter aujourd'hui, en le faisant vivre au mieux, car sinon, on ne serait qu'un souverainiste… Bien sur le traité de Lisbonne, accepté par un parlement fraichement élu, après l'annonce de sa ratification fut un déni de démocratie: n'est il pas? Pourtant, le service rendu par son acception est sans doute immense, il permis de résister à une belle crise et de mettre à la raison une Grèce récalcitrante. Il y a bien sur l'argument que ce qu'un référendum instaure, seul un référendum pourrait l'abolir. Règle non écrite, portée par les tenants d'une démocratie implicite, mais non fondée en droit, et par aucune constitution: comment caractériser constitutionnellement un thème soumis à consultation ? De fait le référendum est possible, mais reste optionnel. Quand à son issue, ne s'en plaignent que ceux qui la critiquent... 

    Car un principe fondamental de la démocratie, justement est de ne pouvoir s'abolir elle même: qu'est ce qu'un référendum qui abolirait la république ? Un acte démocratique ? Et bien non. Le principe des élections, qui suppose toujours un mandat limité dans le temps permet de changer toutes les lois selon l'humeur du peuple, à condition que l'on puisse changer d'avis plus tard. C'est cela la démocratie, et l'instauration du brexit peut très bien être contredite démocratiquement. On ne sait jamais.

    On peut aussi traiter le désir des peuples en faisant des exceptions. On en fit en nombre infini pour l'Angleterre depuis Thatcher et tous les autres. On en fit une belle peu avant le référendum. Hélas, elle ne fut pas en mesure de traiter les demandes populaires anglaises, et oui les réticences de Hollande (il a réussi tout de même à nuire) aux demandes britanniques en février dernier ont peut être un peu joué, même si le niveau d'imprécations pro brexit était sans doute déjà trop important.  

    Non, ce fut Merkel et ses "réfugiés" (des afghans, des somaliens et des érythréens plutôt que des syriens dont le malheur ne fut que prétexte) qui paniquèrent, sans  doute plus (à moins que cela ne soit moins) que les plombiers polonais. Ceux-ci entendaient déclarer à la sécu britannique leur enfants restés en Pologne, alors que les autres se contentaient de piller des camions avant d'aller faire les vaisselles dix ans. Quelle différence pour un anglais ? Et pourtant, ils regrettent un peu, que ce soit l'ex maire de Londres, ou le chroniqueur du SUN. Ah qu'ils sont européens !

  • Les démocraties

    Alors que l'on qualifie le Brexit de "leçon de démocratie", on se demande bien pourquoi, le thème mérite d'être évoqué et la réflexion sur plusieurs de ses tenants et aboutissants de se faire sereinement. 

    On va donc tenter d'énumérer les différents sous entendus associés à l'emploi du terme, en évitant bien sur d'être trop docte, le pouvoir "du peuple" désignant d'abord le "démos", c'est à dire les citoyens, et non pas tout le monde, comme on pourrait le croire un peu vite. Pour mettre les points sur les "i" les tenants français du brexit peuvent le commenter, mais ce n'est pas leurs oignons, en fait.

    Ensuite, on évoquera le vote. Procédure préférée au tirage au sort, et donc permettant à bulletins secrets de condamner un innocent à une fonction, on s'arrangera pour que celui ci soit mis au courant de l'éventualité auparavant, voire soit obligé à se présenter au préalable. Pour une décision à prendre, même procédure: on s'arrange pour que la question soit claire. Le "peuple" acquiert il une voix grâce à cette magie est deviendrait il une personne à l'occasion, par-delà les électeurs dont les voix doivent elles s'incliner ? 

    Tout dépend du score d'abord. Sans exiger l'unanimité en tout, on peut imaginer qu'un quota acceptable de votants en faveur de la décision à prendre soit nécessaire pour qu'un changement important soit validé. A 2% prés, la Grande Bretagne saute dans l'inconnu, se ruine peut être: est bien démocrate ? 48% de la population, effrayée et stupéfaite, se trouve plongée dans le noir, éberluée. Une leçon ? Pour les perdants ?

    Bref, on aurait pu être plus "démocratique" et plus respectueux du "demos" en ne décidant vraiment qu'à partir disons, des trois cinquièmes. 60% aurait nécessaire pour partir, et le vote de jeudi considéré comme un aléa.  

    Le manque d'empressement du vaincu, premier ministre qui ne démissionnera qu'après l'été, signe d'ailleurs la chose: il joua un peu gros, et il doit se trouver honteux. Qu'ils lui soient hostiles politiquement, ou simplement moins euro sceptiques que lui, ceux qu'il obligea à voter pour le rendre populaire doivent lui en vouloir, ils sont la moitié du peuple dont il avait la charge, et il a finalement fouarré sa tâche à un point inimaginable, quand on y pense. On ne peut donc qu'accepter sa peine, et donner un peu de temps à une opinion surprise de réaliser l'énorme connerie qu'elle vient de faire.

    Car le résultat est peut être du au hasard: un assassinat dont les obsèques ont énervé au lieu de rassembler; une affiche de migrants en marche, terrifiante, qui fut moquée maladroitement par le maire musulman de la capitale, que sais je. Voilà qui se voulait décisif et qui repoussa. La démocratie c'est aussi la formation des opinions, avec tout le caractère impulsif, irraisonné, et instinctif qui se rattache aux décisions individuelles.   

    On parle ici d'instinct: le Royaume Uni est une vieille nation, dont la volonté de puissance a laissé son empreinte dans les consciences, et le nouveau maire de Londres ne signifie pas sa complète éviction, la preuve. Des mécanismes profonds et anciens, que certains nient à tort, sont souvent à l'oeuvre, la preuve. 

    Le respect de ces tropismes collectifs, qu'il est difficile de formaliser hors consultations officielles est sans doute une partie de ce qu'on appelle la démocratie. Il est paradoxal de remarquer que lorsqu'ils gagnent, on se prend à les dévaloriser parce que n'atteignant pas 60%, alors qu'ils sont tout de même importants, car dépassant les 40%… 

    Nous voilà donc dans ce qu'il conviendrait de respecter, quand on est un homme politique: ne pas jouer aux dés une décision, tout en acceptant d'y jouer ce qui est moins grave, quelques années de pouvoir dont les erreurs pourront toujours être corrigées peu après. Nous sommes ici dans du long terme, et qui concernera sans doute des dizaines d'années. On aurait du faire attention: d'abord à mieux respecter le vieux fond national, ensuite à ne pas jouer avec lui, au point de le mettre en position de vexer trop profondément son opposant, somme toute tout aussi respectable. 

    Et bien le pouvoir du peuple ne se manie pas sans égards, et nous remarquerons que dans toute cette histoire, la génération des années cinquante au pouvoir, de Cameron à Hollande en passant par Sarkozy se montrèrent insuffisamment soucieux de leur opinion, au point de se faire désarçonner. 

    On passera sur les référendums ratés de De Gaulle et Chirac, et sur celui réussi de Mitterand, c'était une autre époque, et les pathologies étaient différentes. On notera tout de même que les 2 derniers, le réussi et le raté portaient sur l'Europe...

    Le raisonnement s'applique à la situation européenne, maintenant privée de la Grande Bretagne. Un grand souffle, jusque-là bloqué par la présence du british va t il se lever en faveur de la fusion des peuples et des nations ?

    Ou bien le pot aux roses découverts, tout le monde va vouloir partir ? Ce type de décision est il simplement une histoire de manoeuvre politique à l'intérieur des partis, comme tous ses dirigeants le pensent ? 

    La règle de la majorité qualifiée, pourtant votée à Lisbonne doit s'appliquer aux nations, voilà la morale de l'histoire, et les majorités trop étriquées ne devraient pas décider de n'importe quoi. Evoquée déjà ici, une règle de consensus minimal doit présider aux choix importants, et c'est respecter la démocratie que de ne pas trop violer les minorités à l'intérieur des peuples.

    Comment évaluer les choix et leur équilibrage en faveur du consensus ou non? Et bien voilà un débat apaisé moderne, à tenir en mettant tous les points sur la table.  

    Dernière minute: après avoir sucé mon crayon toute la matinée, voilà t il pas que j'apprends en ouvrant les journaux qu'une pétition est lancée en Angleterre pour revoter: il faut d'après certains 60% des voix pour qu'on ne revote pas ! La voilà qu'elle est bonne l'idée en fait. 

    Nous voilà donc à la seconde partie du beau problème: ignorer les référendums solennels ne serait il pas anti démocratique ? Faire voter Lisbonne deux ans après le référendum, par un parlement fraichement élu n'est il pas anti démocratique ? Cette plainte lancinante, agitée par tout ce qu'on l'on compte comme anti européen (le contraire eut été étonnant) n'est elle pas fondatrice de la demande pour le référendum, pour ne pas dire  pour la démocratie?

    Il y a bien sur l'argument que ce qu'un référendum instaure, seul un référendum pourrait l'abolir. Règle non écrite, portée par les tenants d'une démocratie implicite, mais non fondée en droit, et par aucune constitution: comment caractériser constitutionnellement un sujet ? Par une éthique du politique, par une relation directe entre le peuple et le réel, par une angélisation du politique à son niveau le plus direct: foin des représentations, des élections, en tout demandons au peuple, faisons de la démocratie "directe". 

    Cette idée, ancienne au demeurant, oublie le caractère nécessairement provisoire et encadré de ce qu'on appelle justement le "cratos" du "démos": il ne peut y avoir de décision commune que sur la base d'une limitation dans le temps de son autorité et un méta principe doit guider tous les principes: la régularité des consultations et la confiance que l'on doit accorder régulièrement à un groupe limité d'individus considérés responsables et en charge de la direction de l'Etat. 

    De fait le référendum est possible, mais reste optionnel, à la discrétion des dirigeants provisoires de l'Etat: il ne peut pas fonder le pouvoir du peuple. 

    Et puis un principe fondamental de la démocratie, justement est de ne pouvoir s'abolir elle même: qu'est ce qu'un référendum qui abolirait la république ? Un acte démocratique ? Et bien non. Le principe des élections, qui suppose toujours un mandat limité permet de changer toutes les lois selon l'humeur du peuple. C'est cela la démocratie, et l'instauration du brexit peut très bien être contredite démocratiquement. On ne sait jamais.

    Car ces référendums considérés comme démocratiques, on l'a assez dit sont aussi l'objet d'une méfiance que je viens de décrire: sur un coup de tête, un peuple d'abrutis, négligeant et insultant votent comme leur voisin sans rien comprendre. Seul la représentation intermédiaire responsabilisée est vraiment "démocratique" d'après pas mal de gens. De Gaulle lui même, fut mordu par ce fait là et détruit par les représentations intermédiaires qu'il voulait d'ailleurs supprimer, lors d'un référendum, justement. 

    Et puis il y a le local: le référendum anti zadiste vient de tomber c'est oui pour le nouvel aéroport… La démocratie, celle du peuple soulevé va t elle se dresser contre une consultation à la portée seulement consultative, du fait qu'elle permettra à un état et à une région d'appliquer des décisions de justice édictées depuis vingt ans ?

    Bref, là comme ailleurs ce qui semble démocratique et respectueux du peuple est en fait pathologiquement le signe d'un dysfonctionnement manifeste de cette fameuse démocratie, quand des désaccords absolus et irréductibles se manifestent, et en fait n'arrivent pas à être tranchés autrement qu'en une sorte de sacrifice public, quand on demande au Dieu de décider, le peuple souverain se devant enfin de se manifester, et les pouvoirs de lui obéir: le contraire de la discussion en commun avec le souci du bien public, c'est à dire que tout le monde soit respecté et content à la fin. 

    Car le référendum, c'est aussi et surtout la marque symbolique de l'accord discuté: on veut sceller comme cela les constitutions (ce fut l'objet de 1962 et de 2005), les attachement permanents (ce fut le but de Cameron). Par quel malheur faut il que ce soit l'occasion de détester et de détruire ? 

    Car il y eut des réussites à la manipulation politique. Alors que François Mitterand réussit à littéralement pourrir le référendum de 1972 organisé par Pompidou pour accepter la Grande Bretagne, justement, il réussit, d'ailleurs contre toute attente à nous faire entrer à Maastricht, ce qui inaugura vingt ans d'euroscepticisme… Comme si qu'il soit réussi ou raté, le sacrifice ne faisait que faire retomber sur nos têtes le sang qu'il verse. 

    On se prépare l'année prochaine à sceller par référendum un certain nombre de questions. Une suite de propositions brutales sont sur la table: de grandes décisions sur l'économie, l'organisation territoriale, l'immigration, en suspens depuis trente ans pourraient être tranchées d'un coup. Cela se fera-t-il ?

    C'est pourtant un moyen de traiter un autre type de problèmes qui est celui justement de l'exagération du pouvoir des minorités. Car l'actualité de ces derniers mois consacrée à la loi travail, loi de l'année 2016 (et on se plaint du trop grand nombre de lois, merci à Valls et Hollande), a consacré deux ignominies anti démocratiques: un gouvernement et une présidence privés de toute légitimité (85% de défiance et d'impopularité dans tous les sondages, sur tous les sujets) veut absolument faire passer une loi dont une minorité syndicale agissante exige le retrait quitte à ravager des boulevards entiers de la capitale 3 fois par mois pendant toute une saison. On fait mieux comme démocratie représentative, avec un parlement chargé d'examiner en commission pendant des mois des lois dont une phrase suscite le rejet de tout le monde, y compris, d'après les sondages d'une majorité de la population. 

    On en vient donc à vouloir décider que une fois décidée une décision soit telle qu'on ne puisse décider de son contraire. Cela serait il une définition de l'autorité ? 

    P.S. Kelvin McKenzie, un éditorialiste du SUN qui supporta (tu parles) le Brexit avec sa verve bien connue, regrette maintenant de l'avoir voté. C'est ça la démocratie: il n'y a pas que les imbéciles qui changent d'avis.  

  • La morale de l'histoire

    Après bien des invectives et des provocations, ne faut il pas finalement suivre la piste de Dieudonné et se calmer un peu ? 

    Car le qualificatif de "libéral", quand on y pense, se trouve bien galvaudé et attribué à des choses bien différentes et d'ailleurs à son détriment. Il n'est pas "moral" d'après certains qui suscitent, de par ce mauvais procès, une détestation exagérée, en tout cas excessive, et je suis bien placé pour le savoir.

    Car comment ne pas exploser de colère et de rage quand on entend pour la millième fois l'histoire du poulailler libre, celle de l'argent qui corrompt tout, celle de la finance qui ruine les pauvres, celle des riches de plus en plus riches et des pauvres de plus en plus pauvres ? Comment ne pas se répandre en insultes obscènes, en sarcasmes nazis féroces quand on entend encore et encore les absurdes préventions contre le concept d'assurance, l'affirmation que le progrès social fut arraché de haute lutte ou que le communisme fut bien intentionné ?

    Publique et décisive, cette détestation confine à la folie et justifie toutes les préventions, c'est le piège de toujours dans lequel on tombe. Car l'injustice est flagrante, et les lieux communs haineux que je décris ne peuvent susciter de ma part que ce qui me semble lui correspondre et qui n'est perçu par eux que comme une immoralisme profond et insupportable. Tu parles. 

    Je ne parle pas seulement que de moi, tout le discours "libéral", alors qu'il n'est qu'honnête réflexion libre et autonome sur le monde, tombe dans le terrible travers de ne paraître que comme égoïsme et immoral, ALORS qu'il n'est précisément que ce qui se soustrait à l'atroce convention immorale de la soumission au tyrannique. 

    Nous avons donc deux immoralismes face à face et la guerre de religion s'allume: pourtant les faillis immoraux peuvent être retournés et l'exigence morale changer de camp, au bénéfice de la liberté. 

    Comment changer de discours au point de renverser la malédiction et de faire à nouveau de ce pays ce qu'il a toujours réussi à être à chaque fois suffisamment longtemps pour continuer à exister ? 

    Car la situation est dangereuse et ce n'est pas que la France qui est touchée: tout l'occident est face à ce qu'il a suscité de par sa force: une libération économique et sociale qui pousse le monde entier, lui compris à rompre avec toutes les traditions, toutes les prudences et tous les bon sens. Pire: des forces souterraines font que à nouveau, les gens ne sont plus maitres de leur destin et se confient au hasard de l'histoire, sans réfléchir ni même concevoir ce qui peut les attendre.

    On ne peut se contenter d'exprimer ses opinions dans le petit théâtre convenu des mondes stables: elles suscitent au hasard des rencontres des exaspérations terribles et dans tous les sens. Comment supporter une vieille dame qui plie des vêtements pour les réfugiés ? Un jeune qui écoute Lordon à nuit debout en pensant refonder la démocratie ? Un conducteur de la SNCF en grève pendant les inondations ? De partout, une impression catastrophique de fin du monde nous saisit et nous pousserait à la violence si on pouvait.

    La police en charge de au moins contenir les bris de vitrine se fait alors agresser par des migrants en colère, des jeunes révoltés qui leur lancent des bouteilles d'acide, et insulter par des manifestants en délire contre une loi qui ne n'a pas d'effets. Comment l'aider ? En faisant en sorte, par des attentats à la bombe multiples contre tous ses ennemis, que submergée par le nombre de morts et le regain de popularité (ou pas) qu'elle en tirera, elle soit encore plus impuissante ? Rêves funestes et inutiles, propres à horrifier la vieille dame, conforter le jeune rêveur de la nécessité d'une autre monde, sans parler du ricanement du cheminot, immédiatement en grève contre ma provocation.  

    Provocation contre provocation et absurde contre absurde. Pourtant, au demeurant, n'y a t il pas asymétrie ? Car qu'est ce qui motive les 3 revendications objets de ma détestation ? L'ignorance par la petite vieille des problèmes qui frappent ses compatriotes pauvres et très pauvres, désormais en compétition avec des étrangers arrivés d'hier, l'ignorance crasse des principes économiques de base des jeunes idéalistes, et la rapacité cynique des militants de la SNCF. Qu'est ce qui motive les sale fascistes en éruption déclarés ennemis ? La perception d'un pays à la dérive, de l'abandon de la nation à des étrangers, du cynisme ou de la folie de leur dirigeants. Quels sont alors les sentiments les plus humains dans ce débat? Les plus responsables ? Les plus moraux ? 

    Et bien la claire conscience de sa responsabilité d'électeur, de citoyen, d'humain rationnel soucieux du bien ne peuvent que refuser, pour des raisons morales, une telle situation. Il ne s'agit pas de fascisme mais d'une révolte du bon sens, qui doit être comprise, et aussi être maitrisée, du moins par ceux qui bien qu'ils partagent l'exaspération, ont autre chose dans l'esprit que l'abandon et le pire inéluctable. 

    Les "fascistes" viennent de loin. Ils sont les basses classes françaises, communistes pendant tout le XXème siècle et résolument étatistes. Privés de direction par l'effondrement du communisme comme carrière (sans l'URSS pour subventionner on peut plus se forcer à mentir) ils sont à la dérive, aujourd'hui la proie du FN mais pas que.

    Alors que traditionnellement on associe à la gauche l'humanisme respectueux envers les pauvres, quitte à exagérer en matière de ressources collectives à leur accorder, et bien il semble que cette considération du réel du malheur se trouve avoir cessé: le parti du progrès se tourne maintenant vers l'irréel, voire le surnaturel, décrit ici par le souci du lointain, la considération d'une politique sans politiciens, et bien sur le plus abject cynisme des syndiqués employés de la CGT, qui confine actuellement au satanisme. On en est à assister passif à la destruction des vitres d'un hôpital: après s'être plaint par voie d'affiche des violences policières, on encourage ceux qui n'aiment pas la police à empêcher de dormir le fils d'un couple de policiers assassinés.

    Qu'est ce qui peut motiver une telle rage ? Et bien la même chose que ce qui me révolte, et pour des raisons qui sont à la fois similaires et opposées. De fait la révolte contre ce qui me sidère est prise en charge par mes pires ennemis, ceux de l'autre coté et pour des raisons contraires. La même rage et des raisons autres contre le même ennemi. Quel est cet ennemi là, quel est ce mal qui conjugue toutes les oppositions ? 

    Car c'est le parti du bien qui est devenu immoral, voilà le fond de l'affaire. A partir de là la contre offensive idéologique et communicationnelle contre ce qui avait vaincu peut se dérouler et anéantir dans l'esprit d'une opinion fragile les derniers aspects positifs de l'impossible fusion entre le social et le démocrate, le seul conflit qui vaille étant maintenant celui avec le gauchisme, celui qui assume l'extrême autoritarisme économique, le seul ennemi qui vaille maintenant étant le regroupement avec le Front National de tout ce qui reste de la connerie nazie et communiste du XXème siècle: ils sont le mal et il faut le leur dire en mettant en avant les vraies souffrances: chômage, pauvreté des français, la souffrance nationale redevient le critère de formation des opinions, et pour résoudre ces problèmes, il faut maintenant créer des richesses, et au nom du bien.  

    On doit gloser sur le fameux diagramme de Nolan, un classique des sciences politiques, qui met le libéralisme sur deux axes, culturel et économique, quand la liberté est à la fois, mais dans deux directions différentes, recherchée pour les individus ou pour les entreprises (ça c'est Nolan), quand on partisan de l'autorité en matière individuelle ou collective, bref, tous les débats du monde, avec leur qualifications montantes ou descendantes s'entremêlent pour le plaisir (ou la fureur) de nos disputes.

    Assis sur le libéralisme culturel, la domination de l'assistance économique généralisée, a ruiné le pays et il faut s'en débarrasser. L'association de l'extrême droite à ce mouvement, marqué par son passage intentionnel au libéralisme culturel le plus moderne (homosexualité, rejet du père antisémite, et pratiquement une lutte anti raciste). L'alliance des gauches est imminente, et il n'y a guère que l'immigration pour séparer encore ces partis amalgamés de fait du fait de leur cynisme, et encore, son arrêt serait la fin d'un fromage.

    On peut alors gloser maintenant sur l'alliance de fait entre les socialismes et l'extrême droite, commode épouvantail à qui on identifiait l'ennemi avec hypocrisie: en dénonçant son racisme on dénonçait indirectement le libéralisme de la véritable alternance qu'on faisait tomber à coup de triangulaires au second tour des élections. Suscité précisément pour réaliser cela, l'épouvantail est devenu maintenant tellement puissant qu'il se prend à rêver de pouvoir: et bien il va s'allier non pas à la droite traditionnelle, avec qui il ne pourra jamais partager son autoritarisme économique, mais bien avec son créateur avec qui il a maintenant tout en commun. 

    On avait évoqué le fait que l'immigration, ni culturelle (elle pourrait être libertaire, s'il n'y avait l'islam) , ni économique (elle pourrait être libérale s'il n'y avait les allocations) séparait encore la formation des opinions. Non classifiée par Nolan, elle fera donc la différence, et en faveur de la droite libérale traditionnelle, qui doit bien sur se maintenir ferme sur son conservatisme culturel et exiger assimilation, statistiques ethniques et contrôle aux frontières. Elle doit donc se montrer impitoyable sur ce sujet et ramasser la mise, la gauche rassemblée derrières ses pratiques sexuelles dégradantes et son assistance sociale corrompue ne pouvant que quitter l'histoire. 

    Un autre point est bien sur l'autoritarisme moral, ennemi du libéralisme culturel d'après Nolan, et qui me piège horriblement: dois je pour me soustraire à la GPA et à l'imam de Bordeaux me faire catho tradi, et communier tous les jours? Et bien le libéralisme pur (économique et culturel, fédéraliste et islamo naïf) n'est pas plus mon fait que le capitalisme du vatican: la liberté c'est se soustraire aux idéologies, et le communautarisme libertarien, sans nation, sans volonté générale, en est une, tout comme l'infaillibilité du pape de 1870 qui ruina en fait toute prétention à une autorité morale personnalisée, prend ça pape François ! 

    Au nom de la liberté, donc, je me dois de me soustraire aux injonctions de me plier à quoi que ce soit, y compris de respecter absolument un principe, y compris celui de l'anarchie, dont je me crois libéré ! Conservateur libéral, certes, mais ennemi du libre échange absolu et du moralisme autoritaire.

    Ma morale est celle de l'autonomie et donc de la capacité d'exercer un jugement sur absolument tout, sans obéir à aucun ordre: la seule qui vaille, celle de la liberté ! 

    Nous sommes à un an d'une élection importante, et la situation économique n'est pas fameuse. La situation morale non plus, et il semblerait: il nous faut y remédier ! 

    P.S. Au sujet de la rapacité des syndiqués de la SNCF. Confrontée à sa mise en concurrence future, et en cours de réforme pour cela, elle bloque partiellement le pays après avoir court-circuité sa direction pour discuter directement avec un état failli qui par ailleurs est prêt à tout pour faire passer un loi croupion refusée pour cela. Les milliards s'allongent et les revendications absurdes (les avancées sociales arrachées sur la base d'un existant déjà farce tournent à la pornographie) s'obtiennent sans relâche, la grève ne s'arrêtant pas pour autant, un fer se bat jusqu'au bout. 

    Un homme prend alors la parole sur France Culture et sur la base de la "question de la solidarité" oppose concurrence et service public. Le reflux gastrique éprouvé tourne à la crise de folie furieuse: l'homme est syndicaliste, à la SNCF.   

    P.S. Il n'est pas sur j'aie réussi à me remettre en paix, comme prévu au début du texte: la chose est complexe et n'est pas débrouillée. Il nous faudra reprendre tout cela.