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  • Les grandes expériences

    A l'occasion de la présentation du livre de Yasha Mounk (1), une théorisation du thème de la créolisation, de la grande expérience, c'est-à-dire pour ces sociétés parvenues à l'âge moderne (au début du XXème siècle) en étant homogène culturellement et ethniquement, de fusionner avec des peuples venus d'ailleurs récemment et en grand nombre. 

    Le multiculturalisme s'impose sans qu'on l'ait voulu, et pourtant cela s'est toujours mal passé dans l'histoire partout où cela s'est manifesté. Comment faire pour que la chose soit cette fois harmonieuse ? Et bien, il faut conduire et favoriser une, "la",  "Grande Expérience".

    À ce point, deux remarques, ironiques et grinçantes: d'abord que cette chose qui n'existe pas (on doit parler aussi du livre de Laurent Mucchielli, la France telle qu'elle est) est maintenant à l'ordre du jour dans toute sa réalité: il y a bien une fusion à faire, dont acte et l'alternative n'est QUE la guerre civile, qui plus est... Ensuite qu'on n'y peut rien, et que la réalité s'impose, les politiques n'ayant pas "voulu" la chose, bien sûr, simplement des décisions locales ont provoqué des phénomènes de longue durée qui ne peuvent plus être maitrisés et auxquels il faut s'adapter, un peu comme le réchauffement climatique (la chose n'est pas évoquée dans l'entretien, c'est moi qui grince). 

    À la question naïve de la journaliste "ça date de quand?", Mounk précise, gêné que cela est progressif, et prend des années... La journaliste, elle, devait chercher la date à partir de laquelle la chose négligeable que toute une bien pensance juge facile et possible du fait de sa faible ampleur devient un projet à mener pour éviter le "liban en grand"... 

    Revenons brièvement sur la comparaison immigration/réchauffement climatique: on vit hier (nous sommes le 20 Janvier 2022) les représentants respectifs de l'écologie et de l'extrême droite française, Yannick Jadot et Jordan Bardella, s'en prendre avec véhémence à Emmanuel Macron présent à l'assemblée Européenne, sur les deux thèmes séparés que le président en exercice, à la fois président temporaire de l'union, et candidat à sa réélection en France,  n'aurait pas du tout traité, provoquant deux fois le malheur de son pays, tout ceci sous les yeux médusés des représentants européens, et qui d'ailleurs s'en sont plaint ! 

    Revenons à notre juif allemand, prof aux US, qui fort de son expérience du philosémitisme coupable de son enfance européenne, ce qui le gênait autant que l'antisémitisme, veut développer un patriotisme pluriethnique basé sur des différences reconnues mais surmontées, en particulier en évitant le communautarisme du royaume uni, néfaste selon lui, le financement par l'Etat travailliste d'écoles religieuses ayant isolé les populations. Pour cela, il faut positivement partager   un commun, de la "bouffe" à la culture en passant par les paysages, et développer un amour commun et positif de ce qui rapproche très au-delà de l'ethnicité originale. Un "patriotisme inclusif", selon l'intervieweuse... 

    On passe alors à la gauche, au moins aussi pessimiste que l'extrême droite, d'après Monk. Submergée par les considérations sur les discriminations, les inégalités sociales, elle empêche par désespérance, le projet de se réaliser ! 

    De fait les deux pessimismes se conjuguent ! En exagérant les terribles conditions sociales des immigrés (dont la mobilité sociale est en fait bien plus forte, vu le niveau d'origine) elle refuse de reconnaitre le mélange comme possible... De fait, les élites, et cela est comme cela aux US, méprisent le peuple. Or le populisme ne s'évite que si les politiciens acceptent de suivre les volontés populaires, cela afin d'éviter l'accumulation des rancœurs dans les populismes explosifs. La France pourrait être bien placée en ce domaine, ayant des principes (la laïcité semble enviable, depuis les cyniques US, où personne ne croit plus en rien), mais a trop de rigidité dans les applications et argumentations... 

    Bref, un jugement de la planète mars bien réjouissant et bien lucide avec le côté "pieds dans le plat" qu'il convient... De fait, Mounk est proprement Zémmourien, malgré ses dénégations, car ce qu'il envisage est très exactement ce qu'il faut faire, une fois tous les flux entrants arrêtés, bien entendu... 

     

    (1) La grande expérience: https://www.franceculture.fr/emissions/la-grande-table-idees/yascha-mounk