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  • Les éducations

    La frénésie éducative bat son plein. 

    De partout des initiatives étatiques ou à visée étatique pour prendre en charge, organiser et imposer des comportements jugés pour l'heure insuffisants et qu'on souhaite améliorer par force, euh par "éducation". 

    Tous les domaines sont concernés. 

    Une "agence nationale d'éducation à l'information" est projetée par un ex journaliste. Un peu lèche cul, à l'heure où le gouvernement donne l'argent pour lutter contre les fake news... On commence donc par du lourd: la volonté de l'état de décider du vrai. Le ponpon.

    La logique de tout cela? (héhé). Devinez. 

    Une soirée devant le journal de 20 heures. Pub sur comment conduire, puis comment ne pas fumer. Les reportages du journal ? Comment cultiver son champ (de gauche à droite), puis comment (et quand: toujours!) manger des légumes. Comment ne pas insulter les femmes dans la rue? On va vous le dire. Au fait, la fessée est interdite, et coucher avec une prostituée aussi. C'est la vie, et cela s'allonge, tous les jours un peu d'éducation, c'est la journée de l'interdiction de quelque chose. N'importe quoi tout est bon: vous devez faire comme cela et pas autrement, on va vous l'apprendre et ou vous y obliger. 

    Unique sujet, unique préoccupation: décider pour vous de faire ce que vous devez faire pour des raisons évidentes, comment résister au bien ? Il n'y a que cela à faire. 

    Mes petites prétentions à faire du Philippe Murray avec ce désespoir, que dire ce cauchemar médiatique qu'est le post socialisme français sont ridicules: tout est bien pire, bien plus insupportable et abject que l'on pouvait imaginer. Ségolène Royal sortie de scène et envoyée au pôle nord ne déplace qu'un acteur de la catastrophe vomitive. Le sourire à visage humain est partout. 

    ON parlait de prostitution, vous ne rêvez pas, on veut aussi interdire la location de poupées gonflables (2) ! Cela "donnerait envie" et "banaliserait" parait il ! 

    Je parlais du bio: savez vous que TOUT est comme cela? Inutile et communicationnel, exclusivement destiné à boucher les trous de l'insupportable oppression de la terrible et totale connerie de ce monde là.

    En relation avec cette frénésie, on doit placer le judiciaire. Parlons de Bertrand Cantat, un poète connu pour sa sanctification de l'amour dans ce qu'il a de profond: sa femme s'est suicidé, il a tué sa maitresse à coup de poings et se trouve connu pour sa violence en privé, je le passerais lui et son rock viril à la batte de baseball. Trois ans de prison et une libération conditionnelle assumée par le taré sentimental judiciaire qui l'assume toujours (1); il fut persuadé et n'en démord pas, surtout après de légitimes protestations contre la présence sur scène du cynique assassin qui parait il en rajoute en montrant ses poings pour mieux exciter son public.

    "Depuis une certaine nuit de juillet 2003, je le crois plongé dans une culpabilité profonde, une souffrance inextinguible, une prison intérieure dont aucun juge ne pourra le libérer." (si, moi)

    Encore une attitude indigne à interdire: s'opposer aux jugements laxistes est un crime à punir, sévèrement bien sur. 

    Quel rapport ? La société en plein décadence dans laquelle nous vivons substitue l'éducation au judiciaire et la justice à l'éducation. Confusion totale et liquéfaction de tout sentiment réfléchi, au nom des sentiments puérils d'une génération d'abrutis, et de corrompus: le juge, il a touché combien pour sa méprisable pitié ? 

    Il n'y a pas de rapport à faire entre crime et peine: le crime comme possibilité est irréparable et donc ne doit pas et ne peut pas être réparé: son auteur ne peut qu'être libéré et sa durée de détention est indexée sur l'efficacité de ses mensonges devant un "juge". Tout est crime, car  il peut y contribuer et y contribue, principe de précaution oblige, il faut prévenir, et non punir.

    A la punition doit se substituer un aveu et une demande de pardon, dont l'humiliation constitutive se mesure à la gravité du crime et à la durée de la peine. Autant c'est s'humilier abominablement que d'assister par force à une séance de sensibilisation aux différences de genre pour un "sale gouine", autant c'est jouir intensément que d'assister à la promotion de la douceur de caresser des hamsters quand on a violé et éventré des jeunes yézidies... 

    La justice ne s'exerce que comme "éducation" c'est à dire avant l'acte. Du moment qu'une peine, disons 3 ans est la menace qui s'exerce contre TOUS les crimes, on est sur d'éviter la plupart des meurtres, et aussi mais là on jubile, les accusations de "salope" proférées dans le métro. Tout étant judiciarisé à ce niveau de pénitence, on a le contrôle éducatif total de la population et cela dans tous les domaines de la vie.

    Pour faire cette bascule il faut oublier et changer deux traditions. D'abord premier point, celle de la vengeance: conçue pour éviter la vendetta, la vengeance judiciarisée publique et étatique raisonne dans les termes de la vengeance: le rétablissement de l'équilibre "naturel" des actes et des préjudices. Vieux sentiment, vieil affect, source des détestables et destructrices vendettas, la vengeance étant aussi crime et reconnue par tout le monde qui plus est. L'interruption de ce flux ne peut avoir lieu que par un crime assumé qui n'en est pas un. Voilà la leçon et voilà ce qui nécessite l'invention du concept de "justice", chose distinguée du sentiment enfantin qui anime les victimes d'un partage de bonbons inégal: la justice est d'abord une expression du "symbolique" cette chose qui est et qui n'est pas à la fois. On a déjà eu l'occasion d'en parler: le "symbolique" est devenu inconcevable, voire immoral.

    La vengeance personnelle étant devenue interdite, la conclusion logique, après un certain temps, est que la notion même de vengeance sous tous ses aspects y compris ceux assumés par la justice, devient immorale. Le crime ne peut plus être compensé et d'ailleurs il ne l'est plus. La peine c'est que la tape pédagogique sur les doigts du "symbolique" de l'interdiction. Comment peut on menacer de souffrance celui qui ne sera jamais meurtrier ? On ne le fera donc pas non plus à celui qui le sera, et qui le sera de toute façons, la seule manière de résoudre le problème, l'égalité sociale absolue, étant impossible, c'est l'époque qui pense cela. 

    Ensuite, deuxième point, l'éducation à la liberté. Conçu comme enseignement, c'est à dire distribution de savoir et donc de puissance d'agir, et donc de liberté, l'éducation est dans son principe positive: elle donne l'épée et la science de s'en servir. Pour cela, elle nécessite de la discipline et de l'ordre. Avec la disparition, à cause de la mollesse sentimentale des mères énamourées qui refusent absolument toute critique adressée à leur fils chéri, de toute discipline positive, on substitue alors à la totalité de l'éducation un dressage démagogique maternisant, civique et moral, qui ne consiste qu'à interdire ce qui peut déranger le boudoir parfumé de la même mère. L'éducation est devenue entièrement négative et ne forme plus que des esclaves, le seul savoir étant celui de la précaution. 

    Trois ans de prison pour négligence dans le tri des ordures est sans doute bien plus éducatif que les 50 ans de gnouf que l'enculé de Cantat méritait. Voilà ce que pense, projette et réalise le monde moderne, sous nos yeux. 

    Et bien ce système là je le refuse, le méprise et le déteste. Sa réforme me semble impossible, c'est son contraire qui s'installe, et sa destruction inéluctable m'est maintenant indifférente, quel qu'en soit le moyen.  

    Y a t-il un peu de pneuma laissé dans les âmes écrasées par cette gluante et visqueuse saloperie? Y a t-il au moins un humain dans ce désert sinistre qui comprenne ce que je dis? 

     

    (1) le juge s'explique: http://www.leparisien.fr/faits-divers/bertrand-cantat-les-verites-du-juge-qui-l-a-libere-13-10-2017-7329999.php

    (2) https://www.lci.fr/societe/paris-une-maison-close-de-poupees-sexuelles-irrite-des-elus-communistes-2081960.html

  • Les A prioris

    On avait déjà défini le "transcendA/Ental", mais il faut nous le faire définir par Kant.

    Définition

    Le vieux branleur de Königsberg avait des idées précises sur la question. On a lu (1).

    D'abord, ce n'est pas tout à fait ce qu'on croyait. Kant pose bien SA manière de voir: est transcendental

    (le "a" vient de transcendAnt tandis que le "e" vient de transcendEntal, semble-t-il...)

    est transcendental, donc, ce qui concerne les modes de connaissances (et non pas les objets de la connaissance) en tant qu'ils sont "a priori", c'est à dire qu'il ne sont pas issus de  l'expérience, du transcendant ou de la spéculation métaphysique. Les intuitions pures, celles du temps, de l'espace ou du nombre sont transcendentales, mais y a pas que. 

    La philosophie dite transcendentale (la seule qui vaille) est donc celle de la recherche de la seule connaissance sure possible, celle des concepts a priori et des intuitions pures de toute expérience ou spéculation. 

    Pour préciser encore davantage, est transcendantal(e) la fonction, le processus, le concept dont l'origine n'est ni métaphysique, ni physique. 

    Contre Descartes

    Il faut mentionner que Kant est contre, complètement contre Descartes. Le criticisme est d'abord un rejet et une critique de la métaphysique "traditionnelle" et Descartes, le sale fransoze en est porteur. 

    La critique du cogito est multiple. En gros, il y a: 

    - mélange indu entre pensée et existence.

    - séparation indue entre sujet et objet.

    D'abord, La déduction de l'existence à partir de la pensée, est une erreur logique: le concept n'existe pas comme objet et la pensée ne peut accéder à l'en soi, à l'être non représenté. Ensuite, le sujet ne peut s'abstraire de la représentation et donc de l'objet. Si une psychologie est possible, sujet et objet sont en interaction et l'ego, le sujet, devient transcendental, c'est à dire condition de l'objet. 

    Plus largement, Kant se veut au delà des deux métaphysiques possibles, le dogmatisme (Descartes, Wolf) et le scepticisme (Hume). Il décrit d'ailleurs lui même l'état des choses à son époque concernant l'attribution des sources de la connaissance dans l'expérience ou dans la raison. Aristote serait un empiriste, et Platon un noologiste, Locke et Leibnitz suivant leurs traces respectives. 

    Le synthétique a priori

    On en vient à la grande question: quid du synthétique a priori ? C'est LA question Kantienne par excellence et toutes ses réflexions ont pour objet d'expliquer la possibilité de jugements synthétiques à priori. 

    On sait la différence entre analytique, qui se déduit naturellement du contexte: 2 + 2 = 4 et du synthétique qui vient de nulle part (un synthèse, quoi) par exemple "le bonheur existe". Tout l'analytique est a priori bien sur: (enfin bien sur, pas pour tout le monde). Il déduit, il analyse, il descend à partir du connu a priori. Le synthétique, lui apporte de l'information, il "monte", il synthétise... 

    Notons ici que l'exemple 2+2=4 est particulièrement débile car polémique. Kant prenait l'exemple 12=5+7 pour illustrer le synthétique en ce que faire la somme (par exemple en comptant sur ses doigts) suppose utiliser l'intuition. Cette conception est bien sur le contraire du logicisme, qui identifie les deux termes, je dirais par définition...   

    Plus précisément, le synthétique est typique de l'utilisation de l'expérience, alors que l'analytique est linguistique. Le synthétique est naturellement a posteriori, et l'analytique naturellement a priori. L'analytique n'est JAMAIS a posteriori. Alors, le synthétique? 

    Kant donne lui même des exemples: 

    "tous les corps sont étendus". Typique de l'intuition pure de l'espace a priori, qui permet d'affirmer la présence des objets dans l'espace. Nul besoin d'expérimenter quoique ce soit, cela est, on en est sur. 

    "tous les corps sont pesants". Typique du synthétique: il s'agit d'une affirmation théorique basée sur l'expérience, avec une généralisation. 

    La question est donc posée, mais pour y répondre, et c'est l'objet de la critique de la raison pure, on doit travailler. Allez Kador, chausse tes lunettes. 

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    Le vocabulaire

    Les données de départ sont la sensation et la pensée, dans lesquelles on trouve respectivement les intuitions et les concepts. On regarde le transcendantal, on a donc une "esthétique transcendentale" et une "logique transcendentale".

    Naturellement et pour être bien sur que les points sont sur les "i", le caractère transcendantal (et non pas empirique ou intellectuel) de tout cela est réaffirmé en caractérisant l'intuition et la pensée en question comme "pures".  

    Par opposition, l'intuition empirique a pour objets les "phénomènes", tandis que les concepts à priori sont les "catégories". Les catégories sont quatre: qualité, quantité, relation et modalité. 

     

    Analytique et Synthétique

    L'esthétique transcendantale consacre l'espace et le temps comme des supra réalités, formes de l'intuition pure, conditions de la perception des phénomènes. Ce sont eux qui sont responsables et origines des jugements synthétiques a priori, ceux qui sont d'autant plus importants qu'ils sont ceux que le positivisme logique a voulu faire disparaitre. Car pour Kant, les mathématiques sont synthétiques a priori, cela à rebours de la logique, purement analytique. Mieux: l'analytique se définit par l'application du logique: "tous les hommes sont mortels...".

    Alors que le synthétique est créatif: 2 + 2 = 4 est une révélation, une création, une innovation! On est loin de l'absence de sens de l'égalité entre deux références et de l'affirmation logiciste que les seules vérités non démontrables de l'arithmétique sont les axiomes: on n'avait pas anticipé Gödel (3). 

    Pour Poincaré, le raisonnement par récurrence est synthétique a priori, par exemple: il était possible d'anticiper, justement. En gros, Gödel démarque maths et logique, analytique et synthétique, et donne raison à Kant. 

    Pour Kant, donc, l'arithmétique est basée sur l'intuition pure du temps, et la géométrie sur l'intuition pure de l'espace. Les mathématiques sont le synthétique a priori, conception que le programme logiciste de Frege veut réfuter en en démontrant l'analycité. Après l'échec de Frege, Brouwer se réclame de Kant et de sa succession temporelle des entiers, intuition pure. 

    Dans "Recherche sur l'évidence des principes de la théologie naturelle et de la morale" Kant dénonce l'identité construite par Wolf sur la base de l'indiscernable... 

    Les concepts 

    On lit (4). Kant opère la déduction transcendantale des catégories, concepts purs de l'entendement, trouvés à partir des fonctions de l'entendement. Qu'est ce que l'entendement ? Et bien ce qui met en oeuvre la faculté de juger urteilkraft, les actes de l'entendement sont les jugements urteil. Les fonctions sont à trouver et s'identifient à la mise en oeuvre des catégories. 

    C'est ainsi qu'on synthétise, en formant et combinant des concepts, et en subsumant des individus sous les concepts.

    Alors se manifeste le tour de magie: l'intuition fondamentale de l'espace et du temps s'identifie à l'intuition pure de l'application des concepts. Ce qui explique le mystère de la correspondance entre des concepts à priori et des objets extérieurs: les fameux schémas d'application. 

    Quine

    Oui mais il y a Quine... 

    Quine refuse, de manière notoire et célèbre, la différence analytique/synthétique, en la rendant équivalente à la distinction entre synonymes (non marié = célibataire)...  C'est aussi la question du calcul: est il analytique ou synthétique? Quine considère la différence comme floue, et la démarcation douteuse. Néanmoins cela se situe dans le cadre de la dénonciation de l'empirisme logique, Girard s'y livrant aussi, il faut le dire, et on le redira. 

    Il ne faut pas trop se formaliser de la critique de Quine: elle a pour objet surtout de dézinguer l'analytique positiviste. Et puis Quine est aussi un naturaliste, un behaviouriste. 

    ET puis Schlick

    Le positivisme logique et le cercle de Vienne et Schlick acharné contre la métaphysique refuse aussi le synthétique a priori, il n'y a que l'analytique d'a priori. Et c'est Carnap et l'identification entre énoncé significatif synthétique et réalité observable, état des choses concevable. Un énoncé a une signification si il a des conditions de "vérification", de capacité à être rendu vrai. 

    Même si elle fut amendée (en fait affaiblie, c'est la question de la réfutabilitéà par Popper, Quine et les autres cette position a pour objet de tuer la vieille métaphysique, c'était bien le programme. 

    Et puis les post kantiens 

    Le pont aux ânes de l'anti kantisme (on passera sur Onfray obsédé par cette histoire de dénonciation à la Gestapo) est bien sur que la relativité et le quantique on détruit les fameuses intuitions sur l'espace et le temps et sur tout le reste d'ailleurs, et que donc Kant n'est au mieux qu'un philosophe expliquant Newton du point de vue historique: un relativiste en quelque sorte, et de la science de son temps. Un prétentieux dépassé. 

    On fera remarquer pourtant que la structure de ses explications est remarquablement explicite et honnête. Son objet G (la chose en soi) est bien circonscrite, et surtout il a raison: quoiqu'on en dise, les intuitions relativistes ou quantiques n'existent aucunement et nous restons des singes dont le cerveau et les intuitions fondamentales, forgés dans un monde 3D euclidien et temporellement orienté normalement a bien les intuitions pures dont parle Kant.

    Avec en plus la capacité de modéliser dans ce cadre là des entités "réelles" adaptées à d'autres contextes. Les graphes ce concepts utilisés restent dans l'espace et le temps traditionnel et c'est cela qui compte. 

    Cette position, très post kantienne, suppose bien qu'on peut continuer à considérer une métaphysique extérieure au monde comme on a toujours dit, et pleine d'objets très utiles. Vive la philosophie ! Vive Kant !  

    (1) http://www.danielmartin.eu/Philo/Transcendantal.pdf

    (2) https://www.les-philosophes.fr/kant-critique-de-la-raison-pure/Page-10.html

    (3) https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-00014609/document

    (4) https://www.cairn.info/revue-de-metaphysique-et-de-morale-2004-4-page-485.htm