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  • Les Morales

    À l'occasion de diverses discussions se présente l'occasion de distinguer le moral, le juridique et le politique, trois manières d'agir selon la volonté humaine qui ont des motivations, des rôles et des caractéristiques différentes. 

    On présentera d'abord la chose sous l'angle double de la civilisation et de la culture, les deux concepts se devant d'être séparés à l'Allemande, la kultur étant identitaire et propre à certains seulement, alors que la zivilization peut être universelle, au point (j'y suis attaché) de considérer que le droit à l'identitarisme local est global, c'est-à-dire que la possibilité (et la liberté) de cultiver le particulier se doit d'être universel, seules les cultures véritables se rendant capables de civilisation c'est-à-dire d'exprimer ce lien-là qui doit rassembler les humains, mais là, forcément, on dérape. 

    Des distinctions du même ordre règnent entre les côtés ascendants et descendants du politique, l'autorité intemporelle rendant possible le pouvoir accepté, et le pouvoir effectif non discuté justifiant et exprimant l'autorité. Qui vient de la nature des deux entités ? L'un n'est pas possible sans l'autre, cela est certain et le caractère surnaturel de l'autorité n'est qu'un moyen de rendre le complexe dual incontournable, c'est-à-dire plus que "naturel": créé. 

    Le politique, au-delà de la distinction entre amis et ennemis critiquée par Blumenberg, est d'abord une expression de la volonté individuelle ou collective, et répond à une nécessité, mais qui n'est pas seulement celle de la guerre: il faut organiser le portage de l'eau ou le tannage des peaux et ces quotidiens-là se partagent entre groupes et aussi entre sexes, l'usage établi pour longtemps relativisant les guerres, sans empêcher l'expression des obligations, et des volontés, donc des politiques à mener. 

    Dans ce cadre le moral s'oppose au juridique comme la culture s'oppose au politique: un avis préalable, un jugement et une pratique indépendante, et cela sans ignorer ni déconsidérer l'utilité fondamentale de la volonté appliquée et raisonnée du juridique. La question est celle de la régulation du juridique, qui est la règle fixée rationnellement et collectivement à l'avance, réfléchie par l'activité humaine du jugement conduite au nom du collectif, alors que celle de la morale, qui est l'éthique, est une réflexion portant sur les jugements moraux, déduits de principes généraux complexes préexistants mais appréciés individuellement, c'est là l'essentiel.

    La morale est non pas individuelle, ses principes sont universels, mais réfléchie et exercée individuellement. Elle n'influe qu'individuellement, et ne peut juger des autres qu'en propre. 

    Il existe une confusion coupable entre le juridique et le moral, qui conduit des populations d'attitudes d'esprit à condamner juridiquement ce qui ne devrait ressortir que du jugement moral, et moralement ce qui n'est qu'une nécessaire régulation juridique. Les contraposées existent aussi: on innocente totalement ce qui doit faire l'objet de réprobation au nom de l'absence de critères juridiques, et on innocente juridiquement des comportements inacceptables. 

    Et puis bien sûr il y a la confusion pure: on veut donner à un jugement moral force juridique alors que nulle loi ne le permet: la pire de toutes les situations, car le paradoxe est que la force du jugement moral peut être telle qu'on pourrait souhaiter s'abstraire du juridique et appliquer des lois inexistantes, voire conduire une justice sans lois. 

    Chaque fois, des attitudes erronées et irréfléchies conduisent à des injustices variées, grosses de révoltes et de malaises et aussi de dommages considérables laissés sans réparation. 

    A l'oeuvre derrière bien de ces confusions, une hypostasie du juridique considéré comme seul moyen d'appréciation. C'est la réduction du moral au juridique, l'innocence devant la loi valant approbation totale, voire interdiction du jugement moral, même exprimé comme opinion légitime. Derrière cela, le pire de tout, la réduction de l'humain à l'application de règles, ou plutôt à la croyance que l'humain est réglé, ce qui contredit sa liberté fondamentale. 

    Les opinions

    On commencera par toutes les lois excessives qui veulent judiciariser les mauvaises opinions exprimées publiquement. Ce sont toutes les lois mémorielles et comportementales, qui se mettent à condamner physiquement des expressions langagières qui même si elles peuvent être discutables, ne causent pas de souffrances physiques et peuvent être supportées par l'ignorance. Construites sur la notion de l"appel à la haine", ces lois ne peuvent être définies objectivement et laissent aux juges des libertés d'appréciation considérables, qui reviennent à le laisser libre de juger "moralement", voire politiquement, au grès de ses sentiments, cela sans être précisément guidé par une volonté législative vélléitaire et aveugle. On rappellera que seules devraient être contrôlés les expressions actives d'appels à la violence qui ont intention et volonté d'organiser des actions violentes. Les insultes publiques pures, hors diffamations explicites devant être prouvées, ne sont que des expressions libres comme les autres, comparables aux moqueries et ne pouvant être condamnables que comme manque de respect à l'autorité nécessaire aux institutions lorsque les victimes sont des fonctionnaires en exercice.  Le refus de toute censure s'applique ainsi aux critiques des religions, et des institutions en général. 

    On rappellera toutefois que la condamnation morale s'applique ici, l'excessive moquerie insultante envers les religions par exemple, et cela pourrait s'appliquer à Charlie Hebdo, pouvant vexer des personnes attachant un grand prix à celles-ci et leur causer des irritations assimilables à des souffrances, se devant d'être critiquées, voire explicitement rendues excusables, c'est-à-dire se devant de s'excuser du fait leurs auteurs ou d'autres. 

    L'innocence par manque de preuves

    La dénonciation calomnieuse, ou plus simplement l'erreur judiciaire en général surplombe l'accusation difficile à prouver, qui inclut bien sûr la fameuse accusation d'agression sexuelle niée, parangon des nouvelles relations conflictuelles entre sexes. L'échange judiciaire moral se produit dans les deux sens et se trouve redoublé dans certains cas, quand par exemple, dans le cas de l'affaire Joxe, le pauvre ex ministre injustement accusé, se voit innocenté par l'invraisemblance de la plainte (un attouchement lors d'un entracte qui n'a pas eu lieu à lors d'un opéra), mais malgré tout, débouté de sa plainte en diffamation pour mise à l'encan de son honneur et de sa vie privée, à cause d'une présomption "de bonne foi."...(1) 

    Là, la justice se trouve immorale, ayant mis des moyens considérables au service d'une fantaisie, qui plus est invraisemblable, mais qu'il aurait été immoral d'ignorer. Sur ce thème, les accusations concernant des paroles obscènes qui se traduisent par des dommages personnels considérables causé au coupable de l'impolitesse, lors d'appels à la haine caractérisés. C'est l'affaire du "porc", qui ressort de l'impolitesse coupable moralement exclusive. La justice là put sévir contre une diffamation, au grand dam d'une morale revendicatrice souhaitant faire un exemple hors la loi, précisément. 

    Peut-on ranger dans ce domaine la volonté systématique de suspendre les prescriptions concernant les crimes sur certaines victimes les différentes catégories visées (enfants, femmes) pouvant s'étendre aux grands invalides de guerre, aux pupilles de la nation, aux décorés des palmes académiques, et bien sûr aux handicapés sans parler des immigrés noirs de peau et aux transgenres ? Je dirais, bien sûr: le jugement moral construit sur le caractère insupportable d'une action devient prédominant devant toute action proprement judiciaire, et le besoin de prise en compte va au-delà de toute raison: le sentiment de révolte excessif qui submerge lors de la prise de connaissance de l'action ignoble justifie l'excessif de la décision, qui en plus maltraite son effectivité: longtemps après le crime, les preuves sont effacées, les souvenirs troubles, le besoin de réparation atténué... 

    La fausse morale

    L'interdiction du cumul des mandats est une exemple de fausse morale, qui introduit une règle débile pour des raisons imprécises, allant du besoin de renouvellement jugé bon, à la limitation d'une corruption gravissime jugée inhérente à ce qui et en fait une bonne pratique, séculaire en plus. Des députés ignorant du terrain et largement irresponsables en sont le résultat. Concue pour faire la place aux jeunes et sans doute aux femmes, la mesure doit être changée ! 

    Il y a aussi l'interdiction aux députés d'employer leurs familles, du même acabit, la corruption ne pénalisant que l'élu, son travail étant son intérêt. Mâtiné de l'obligation d'exposer ses moyens, la contrainte équivaut à un contrôle a priori du législatif par le judiciaire, et n'a satisfait que le gagnant d'une élection présidentielle récente, qui a ainsi établit une jurisprudence démente du fait de la folie hystérique manifeste d'une justice dévoyée, ne revenons pas sur l'affaire Fillon, si sur l'affaire Cahuzac. 

    Car il est paradoxal que l'invraisemblable scandale que fut la corruption insensée du prestigieux président de la commission des finances devenu ministre du Budget, menteur absolu et que l'on renonça à emprisonner (il aurait fallu le torturer longuement avant de le décapiter en public) et dont la conséquence des frasques ne fut qu'un parquet de plus au service du pouvoir, celui là même qui défait par les affaires et son incompétence, devait préparer la venue de son successeur, le meilleur de ses conseillers... On a là en plus de toutes les morales violées, le plus extrême dévoiement du politique et du judiciaire. Ce pays est à vomir. 

    Dans le même genre, mais en inversé, les condamnations morales portées contre des hommes et femmes politiques dont les enfants commettent des (petits) délits. Marisoul Touraine eut un fils criminel, le fils de Valérie Pécresse fuma du sheet, le fils de Fabius est un escroc, celui de Dupont Moretti bat sa femme, celui de Nadine Morano fait un délit de fuite. Etendre l'opprobre au parent du délinquant est injuste, pour le moins. Par contre, rechigner à se faire infliger des leçons de morale par qui a du mal à élever ses propres enfants est naturel, et c'est bien le sujet... 

    On revient donc au positionnement "moral" des politiques, en particulier des membres de l'exécutif, chargé d'appliquer la loi et qui pourtant se transforment en législateurs de ce qui ne les regarde pas, ou pire, qui veulent exercer une magistrature moraliste indue, par exemple, celle absolument insupportable qui consiste à condamner hautement dans le discours exclusivement, un parti politique présent à tous les second tours, et qui représente 40% de l'électorat qui vote... 

    La misérable comparaison de l'ex bornestein qui au nom de souffrances qui ne l'ont concernée qu'indirectement se permet, premier ministre en exercice, d'insulter gravement le fameux parti politique en question a un côté misérable, et surtout, profondément immoral, sans être bien sur juridiquement condamnable. L'exemple même de ce à quoi sert la morale, et qui est de réguler les comportements. Mon "ex bornestein" que j'aurai pu accentuer pour faire encore plus "années trente" n'est que l'écho, et avec la même valuation proprement immorale, car méprisante et injuste, que son "parti héritier de Pétain" dont la puanteur ne le cède en rien aux pires remarques racistes. Cela fait "années quatre vingt", et en plus, le plus drôle de l'histoire d'ailleurs, elle se fait recadrer par le Président de la République... 

     

    Les conflits d'intérêt

    Un aspect fondamentalement moral et cela à double titre, qui est insuffisamment pris en compte par le judiciaire est la notion de conflit d'intérêt. Pour éviter toute corruption directe et indirecte, et aussi tout soupçon de corruption, qui survient assez vite dans le cadre de décisions ou d'avis particuliers, typiquement les expertises, on veut devoir 1) déclarer ses liens d'intérêt professionnels (rémunérations dues à des collaborations hors de son métier principal) 2) rendre public les conflits d'intérêts qui peuvent surgir du fait de ces liens lors de l'attribution de missions ou fonctions 3) se déporter systématiquement de ces missions ou fonctions lorsque ces conflits se manifestent. 

    Karine Lacombe, ayant reçu de l'argent de Gilead, fabriquant d'un médicament concurrent de l'hydroxychloroquine, ne pouvait pas exprimer d'avis public sur la question. Ses dénénégations outragées sur la question, voulant justifier son impeccable morale lors de ses activités, ne furent qu'aveu d'ignorance de principes piétinés en France à notre grande honte, et par la même la faiblesse totale de son éthique personnelle: elle ne réfléchit pas, ne comprends pas et prétend.

    Alexis Koelher, cadre de l'armateur MSC devenu Secrétaire Général de la Présidence de la République, ne s'est pas déporté (c'est le moins qu'on puisse dire, il en fut l'auteur direct) de décisions concernant son ex employeur, d'autant plus proche encore que possédé par ses cousins, avec qui il entretient régulièrement des relations proches... Protégé par des déclarations d'innoncence du président, le scandale pourtant inconcevable est majeur et n'a pas, pourtant, de conséquences pratiques, même minimes.

    Les dévoiements

    Et puis il y a le dévoiement de l'institution. Quand les frasques privées des resonsables déshonorent à divers degrés les institutions. Depuis les écrits pornographiques de ministres en exercice, jusqu'au publications la même semaine qui de Macron dans Pif le Chien, qui de Marlène Chiappa dans Playboy, celle ci se faisant accuser de détournements de fonds publics avec l'utilisation pour ses partisans politiques de fond destinés à défendre la mémoire d'un prof égorgé abandonné par l'institution éducative  seul face à la vindicte islamiste. Faute morale sur faute morale, au carré, plus du judiciaire, tout de même, mais cela est bien peu, un ignoble et pitoyable dévoiement de la profession de ministre, sans parler de celle de président.

    Ayant propagé exagérément dans son abondante communication son gout pour les torses ruisselants de sueur de délinquants ou de transgenres de peau noire, plus la démagogie ridicule des galipettes youtubeuses, il dévoie, hors des jugements de la morale, et du judiciaire. Est ce moral pourtant, que de dévoyer ? Et bien non. Pas plus qu'il fut moral pour sa femme que de séduire un moins de 15 ans autrefois, le traumatisme pédophile produisant ce qu'il produit, voir les oeuvres et les pompes du monsieur. 

    Les nouvelles moeurs

    On évoquera les moeurs sexuelles modernes, soi disant, du moins leur acceptation et leur pratique à géométrie variable.

    La bite de Benjamin Griveaux, qui lui couta sa candidature à la mairie de Paris, après s'être fait défoncer la porte de son ministère par les gilets jaunes dont il critiqua la beaufitude de ceux qui fument des clopes et qui roulent en diesel. Immorale qualification méprisante, ministre, d'une partie du peuple, lui valut le mépris pour sa femme cocue et sa disparition honteuse de la scène publique. Etait-ce immoral de se priver d'un talent pour une si bégigne et répandue pratique ordinaire des réseaux sociaux actuels ? A réfléchir, mais je dirais que non. 

    Et puis il y a la batarde tardive de Mitterand (60 ans, la dernière goutte compte), bon, mais qui profita de bien des dépenses publiques pour cacher son existence ( la popularité et la rééection d'un président pourrait patir de condamnations morales injustes) voir pour la loger aux frais de l'Etat, elle est sa mère, toutes deux installées sans avoir à le rembourser, y compris après la mort du tyran, au frais de la République, avec pour seule justification le maintien d'une polygamie qui ne le cédait en rien à ceux dont on guillotina une instance sans parler des rois nègres de nos colonies injustement racisés pour des pratiques similaires. La tehon. Là encore, le mépris moral et la honte morale pour ce qui ne sera jamais condamné juridiquement, s'impose et s'oblige en espérant des pratiques futures où ce genre d'errements sera réduit en nombre. 

     

    (1) https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/04/14/pierre-joxe-perd-en-appel-son-proces-en-diffamation-contre-alexandra-besson_6076791_3224.html

     

  • Les Occidents

    Il faudrait sans doute relire Toynbee et Spengler pour vraiment comprendre ce qu'ils voulaient dire, et aussi évaluer où nous en sommes, là où nous sommes, en Occident...

    Déclin et ruine

    Les deux cataclysmes qui se sont abattus sur nous ces 3 dernières années ont mis en évidence et démarré de manière irrémédiable, à mon avis, un déclin et une ruine déjà sans doute en germe mais qui maintenant ira surement jusqu'à son terme. Covid et Ukraine ont scellé ce que nous sommes, en révélant nos réflexes, nos mécanismes cognitifs, nos organisations, nos espoirs, nos craintes et nos projets... 

    Bien sûr, on peut toujours dire "pas tous, pas tous" et évoquer la sagesse du professeur Raoult (1) ou celle de bien des gens ordinaires avec qui on hausse les épaules en silence à propos de "tout ce qui ne va pas" et "qu'on voit bien", et contre quoi rien, absolument rien n'est fait, bien au contraire: toutes les réformes, toutes les décisions et tous les projets n'ont d'effets manifestes que pour aggraver le mal. Étonnante plongée dans les abimes, menée en klaxonnant. Car jamais les prétentions, sous forme de "révolution" (titre de l'ouvrage publié par Emmanuel Macron pour se faire élire), de "refondation" et autre "réinvention" ne sont succédé aussi vite, chacune chassant l'autre avec le même pouvoir de conviction, assis sur l'évidence partagée d'un espoir progressiste à chaque fois réaffirmé et qui, ce n'est pas la moindre qualité de chacun des projets en question, fait absolument fi de l'inquiétude mentionnée plus haut, se prévalant au contraire de sentiments radicalement contraires, ceux dont les effets manifestes, absolument délétères, nous navrent et nous ruinent. 

    Un suicide

    On va la faire court (si possible), et le pessimisme dramatisé est de mise. Pour un ensemble de raisons, philosophiques ou sociologiques, l'Occident est actuellement en train de se suicider c'est-à-dire de tuer tout ce qui en lui avait fait non seulement sa puissance matérielle mais sa justification morale, l'alliance des deux ayant réalisé sur terre un imperium manifeste, le sommet de cette éclatante réussite ayant été la marche sur la Lune, un an après la révolte mondiale de 68, entaille sur la pointe de flèche et qui symbolise, voire explique, toute la suite. 

    Le suicide est concret tout d'abord car il porte sur la généralisation des moyens de le produire depuis l'avortement droit fondamental des femmes, l'euthanasie sans contraintes, et avec la fin de la sexualité paritaire, l'arrêt de la natalité, conséquence (ou cause ?) de tout cela: la vie biologique occidentale s'arrête, physiquement. 

    Ce suicide vital s'accompagne de l'acceptation enthousiaste d'un déplacement de population massif en provenance des zones menacées de la planète et qui a vocation à submerger quantitativement nos territoires. Acceptées et encouragées pour des raisons morales, ces arrivées rendues quasiment obligatoires par nos lois sont justifiées scientifiquement et politiquement par le suicide en cours, qui a d'autres motivations, en l'occurrence le maintien en vie des retraités et des entreprises manquant de bras. Étonnant double suicide, mené au nom de la survie... 

    L'histoire

    À ce point, il nous faut diviser l'Occident par l'Atlantique et noter que celui-ci fut traversé deux fois au siècle précédent, qui vit, le nier serait imbécile, l'Europe commettre déjà un double suicide d'une violence extrême en moins de 50 ans. Sans doute expression du même sentiment, les deux guerres devenues par ailleurs mondiales furent bien européennes et consommèrent la disparition culturelle complète d'une zone de créativité historique intense. L'apogée occidentale fut ainsi américaine et on a pu croire que cela suffirait: conscients désormais pour toujours de leur incapacité à vouloir, les élites européennes et leurs peuples séduits sont devenus américains, identifiant Occident et Amérique. 

    Que ce soit la construction européenne, menée par des agents américains et des allemands définitivement soumis à l'impérium qui les avaient brisés malgré leur résistance forcenée, l'alliance atlantique permettant aux européens d'abandonner toute référence culturelle au militaire honni, le combat contre le Covid mené par l'industrie pharmaceutique en charge aux USA d'une baisse étonnante de l'espérance de vie menée au nom de la lutte contre la douleur, et la guerre en Ukraine menée par les vendeurs d'un gaz et d'un pétrole produit en Amérique, le choix de l'asservissement forcené, déterminé et volontaire fut fait de manière systématique et organisé, au nom de l'évidence. 

    On notera que tous les aspects décrits ici s'accompagnent systématiquement de l'application déterminée et prolongée d'un principe de corruption évident, à l'oeuvre systématiquement, la direction des peuples sous l'hégémon se devant d'être non seulement contrôlée, mais rémunérée. Le suicide aura été doré pour pas mal de gens. Notons de plus que ce principe de corruption s'applique également aux bénéficiaires de l'assistance généralisée monstrueuse mise en place en Europe, sous l'égide du maitre bien moins généreux pour lui même, mais dont la supériorité a bénéficié à plein à l'occasion, de l'affaiblissement tout aussi généralisé de son allié qui ne pouvait qu'en découler.  

    C'est alors que la question de la guerre mondiale se pose, et si motivé par le fait que le plus beau des suicides est celui qu'on s'inflige en combattant, l'Occident aurait-il décidé de déclencher l'apocalypse si ses désirs moralistes n'étaient pas satisfaits ? La liberté ou la mort! On doit distinguer ici, donc, les deux rives. 

    En passe de sacrifier la rive est, la rive ouest s'offre pour l'instant pour compenser les destructions infligées des gazoducs. But de guerre premier rationnel (mais cruel), la chose est entendue et en cours, une sorte d'incitation à la relocalisation à l'ouest de ce qui reste de l'industrie européenne étant donc mise en place. Tout doit être mis en place pour compenser l'affaiblissement trop intense de l'hégemon économique et social, et cela se voit. Pour ce qui concerne la rive est, la poursuite des politiques de soumission met en oeuvre, cela est clair le maximum de corruption, la chose, menée avec extrémisme ayant déjà totalement subverti absolument tous les médias dits "main streams". Une classe d'oligarques, en l'occurence les 10 premières fortures de France, par exemple, gère entièrement ses journaux. Le capitalisme à cigare, qui le journal les pieds sur la table, l'a écrit lui-même... 

    La mise de l'Occident en posture guerrière sur une longue période, acceptant revancharde un gel militaire le temps de se constituer une force conséquente pourrait être un pis-aller qui instituerait une confrontation civilisationnelle. Peut-être est-ce un objectif qui pourrait nous satisfaire, la militarisation imposant de restaurer l'autorité perdue par les laisser-aller contemporains et d'abolir énergiquement, qui le woke, qui l'immigration. Un complot néo libéral, qui couperait autoritairement et peut être par la violence fasciste militarisée, l'herbe sous le pied de tous les libertarismes... 

    Au passage, séduit par les bienfaits de la discipline imposée, on pourrait alors s'en prendre à l'autorité américaine et restaurer la paix avec la Russie. Un rêve rose. 

    Ce n'est pas un suicide

    Mais le terme "suicide de l'occident" ne convient pas. Ce à quoi on assiste est un effondrement de l'intérieur qui s'il est effectivement motivé par une haine mortifère de soi, n'est pas directement volonté de mourir: plutôt de faire mieux au sens du "changement" tel qu'exprimé par cette part féminine de l'humanité insatisfaite de l'essence du monde et qu'elle ne conçoit que comme frustrante et menée par un autre à détruire.

    Confronté à la mort ou pire à l'ingratitude et la cruauté du monde, l'humain a de tout temps exprimé cette limite-là de lui même en dehors de lui-même, cela même après l'invention funeste de la responsabilité humaine dans sa chute. Pouvant être réparée, la faute mit même en lumière une possible perfection humaine. Hélas l'oubli de toutes ces légendes et surtout de toutes les préoccupations profondes et anciennes qu'elles comblaient a mis à jour d'autres sentiments, bien plus sombres: il y a un responsable humain aux malheurs du monde et il doit être sacrifié. 

    Situé dans le passé, mais aussi dans tout ce qui dans le présent référence le passé, et tout ce qui dans l'avenir pourrait s'appuyer dessus, le crime qui n'est une faute originelle mais une malfaçon essentielle à corriger. C'est là qu'est le côté suicidaire de la chose: comment corriger quelque chose d'essentiel sans le détruire tout entier ? 

    On se trouverait donc face à un projet inacceptable, basé sur une conception nécessairement fausse du monde car contradictoire. Le poursuivre est donc nocif et doit être combattu. 

    Caractérisons la malfaçon décrite: elle concerne l'état du monde, familial (le patriarcat), économique (le capitalisme), climatique (l'utilisation du pétrole), sexuel (le genre), racial (la suprématie blanche), alimentaire (le rejet de la viande). Dans tous les cas, la racine de l'accusation est un être incontournable naturel qu'il s'agit de renverser, ce qui est évidemment impossible au sens strict. Là se situe l'absurde folie de la chose: à l'impossible on est tenu. 

    Naturellement, il y a une façon de présenter les choses pour convaincre les militants. Cette "manière" se doit d'être analysée. À ce titre elle est composite, formée d'une part d'une description du passé, essentiellement décrit comme impur, violent, injuste et d'autre part une description des actions à mener imposées par la réalisation du projet, toutes consistant à révolutionner les manières de vivre et de penser, et à interdire tout simplement ce qui s'en distinguerait. 

    La chose vient de loin et se pose évidemment la question de la gnose, l'ennemi principal du christianisme naissant, qui le poussa (la thèse est connue) à se transformer en religion pour se démarquer et assumer son autorité. La gnose avec son démiurge méchant et stupide, et son Dieu inconnu désincarné ne voulait pas s'installer dans le monde et le changer, mais l'abandonner: elle assumait le suicide comme seule chose à faire, et malgré sa puissance de conviction a disparu: le woke n'est pas une gnose, en tout cas c'est l'une des deux options à tenir, et je serai finalement de ce côté-là: les théologies gnostiques se situent plutôt dans le rejet du symbolique positivé, tentation initiale effective du christianisme, et ne sont que l'antithèse de tout projet humain civilisationnel. Le monde woke est normatif, et innovant: il a des motivations réalistes, et même s'il est  déconnant en pratique, a des buts effectifs quant à un monde possible finalement logiquement souhaitable. Ses dénonciations sont à propos du réel, ses projets sont réels. Et puis, il faut le reconnaitre, il ignore absolument toute espèce de spiritualité. 

    Les causes de l'hérésie

    L'arrivée de cette hérésie fondamentale du monde libéral est difficile à expliquer. Tout d'abord, elle se construit aux USA, ensemble civilisationnel occidental qui s'est toujours distingué de l'Europe sur des points fondamentaux essentiels: crée par un compromis entre franc-maçons illuministes et puritains protestants rigoristes, la fédération étatique américaine a permis d'éviter les maux européens liés aux conflits sociaux et religieux: les idéalistes charitables considéraient les pauvres comme damnés et les illuministes passés à la tolérance laissèrent aux religions leurs pouvoirs. Ces comportements très conservateurs en matière de moeurs, conforté par un religieux et un politique rigoriste durèrent très longtemps, les franges libérales sociétalement de la société restant structurellement minoritaires, quoique tolérées par défnition. 

    L'explosion se produisit en 1968 (si on veut une date) ce qui amorca une réforme profonde du sociétal américain, mais n'aboutit véritablement que très récemment. Ce n'est qu'à partir de 2020, en effet, que l'athéisme déclaré devient majoritaire aux USA... Dés ce moment le compromis fondateur fut remis en cause fondamentalement: les illuministes universalistes américains ont repris leur liberté et abandonné tout respect pour le sociétal contraint par le religieux ou en général par tout système symbolisé respectueux de quoi que ce soit. Le point de fuite est devenu le transhumanisme sans limites, l'homme augmenté maitre de machines surpuissantes pouvant absolument tout en principe et en fait. 

    Le point d'ancrage de la mutation pourrait être la "révolution" sexuelle des années 60, stimulée et rendue possible par la contraception chimique. Ou pas: les moeurs ne sont pas forcément indexés sur les techniques qui en découleraint plutôt et quelqu'en soit ses inconvénients, les préservatifs sont efficaces aussi: la pilule avec ses inconvénients aussi mais réservés aux femmes ne fut qu'un choix, voire une obligation. Qu'est ce qui causa cette libéralisation des moeurs ? 

    On pourrait dire que de même qu'alors que la fin de la guerre de 14 s'accompagna de grandes licences en Europe du fait du sentiment de la victoire, la relativement faible participation américaine n'avait pas atteint le sentiment moral américain, ce qui fut le cas après 45. Rock and Roll et compagnie, la folie sociétale américaine post jazz fut extraordinairement puissante, au point de créer la classe sociale des "jeunes" en Europe, encore bien présente et au combien. Ce changement là y ruina entièrement la transmission traditionnelle des valeurs, la consommation purement passive des nouveaux biens culturels accentuant énormément la vitesse de la mutation. De ce point de vue, on peut parler d'avance européenne, avance qui comme on l'a vu est maintenant comblée: l'Occident maintenant unanime et rassemblé peut regarder son futur en face. 

    Un projet "métaphysique" est en cours, et contrairement à bien des gens, on peut s'inquiéter du fait qu'il s'agisse d'une mutation anthropologique globale qui affecterait sur le long terme des parties importantes de la population, avec les conséquences secondes sur les autres qu'on peut imaginer. Bref, en aucun cas une mode ou un défoulement passager destiné à s'éteindre telle une mode. 

    En bref, l'empire Romain a son christianisme, et si l'on persécutait, il n'est pas évident que cela ne serait pas stimulé, bien au contraire. Car la remise en cause est profonde et va au delà du politique, clairement explosé, et aussi du social : elle est "anthropologique" car ressortant du fond humain préalable au simple "accord" primitif symbolisé classiquement par les  philosophies occidentales: on revient à avant le contrat social; on ne fait pas une "révolution", on revient en arrière et on bifurque. Grandiose ! En fait du jamais vu.

    Le mécanisme

    A la racine du phénomène global, on pourrait placer la disparition ou la destruction d'un caractère souvent décrit comme essentiel à tout social ou à toute culture: la dualité de l'état global des choses, à la fois imposé et voulu. C'est le double principe du pouvoir et de l'autorité, les deux choses s'échangeant comme le décrit Bruno Latour avec les deux flux constitutifs du politique : ascendant et descendant. Pas de pouvoir (descendant) sans autorité (ascendant), pas d'obligation sans imposition etc etc. Cette machine quasiment chimique fonde l'Etat, les religions, les familles, bref tout ce qui stabilise et harmonise les collectifs. On dit bien "stabilise": ces échanges sont de longue durée par essence et s'ils peuvent être rompus, c'est pour être remplacés. On aurait donc ici une tentative globale de remplacement en forme d'attaque globale multiple.

    Est ce le cas ? On pourrait affirmer le côté profondément nihiliste des injonctions wokes en ce qu'elle ne sont pas symbolisées sinon négativement. Sur tous les sujets, les habitudes millénaires sont mises cul par dessus tête après avoir été maudites, la nouvelle pratique radicalement contraire devant s'imposer par la force de la persuasion et de la décision: le pouvoir est exclusivement ascendant, maximalement "démocratique"... Rien en effet ne peut justifier la "descente", évidemment pas pour ce qui concerne sexe et genre, la négation de la sexualité mettant en cause un milliard d'années de vie sur terre, par exemple. Tout à l'avenant, le végétarianisme étant imposé par un savant mélange de défense du climat, d'économie d'énergie et surtout de sensiblerie animale justifiée par leur attribution d'une consience, à rebours de toutes les écologies construites traditionnellement avec les animaux domestiqués. 

    Or toutes ces habitudes déniées issues du fond culturel et civilisationnel, lui même héritier par transmission et  réexpression d'un fond anthropologique antérieur ancien furent symbolisées positivement et stabilisés comme indiqué dans les mémoires, les volontés de transmettre, voire les motivations profondes de la conduite des vies propres. Améliorés et adoucis par les cultures, les civilisations et les moeurs modernisés et réfléchis ils conservaient le gout des traditions et donnaient le plaisir de l'ancrage dans l'histoire et de la permanence des héritages des parents aimés. Tout cela doit donc être détruit par l'instauration d'institutions strictement "ascendantes". Rien ne doit être hérité ou accepté du fait de traditions ou d'antériorités, en tout cas elle ne doivent pas compter. Seule la volonté directe actuelle issue d'une liberté "éveillée" sans limites peut s'installer. 

    Cette question de liberté joue un grand rôle. De manière surprenante, là encore une contradiction manifeste se présente, personne ne pouvant garder la liberté de refuser la "proposition", alors que les indécis se convainquent facilement à tort que l'exercice de la nouvelle pratique peut être laisser à une appréciation "libre": elle est en fait appellée à être généralisée, son acceptation ne pouvant être que "de principe" et donc universelle. Ce dont on accepte la présence par gout de la liberté des autres produit l'abolition de la sienne propre. Comme si le suicide du monde devait commencer par le suicide préalable de ceux qui pourraient s'y opposer... 

    Après tout

    Et puis, le terme de destruction s'applique-t-il vraiment ? Après tout, un nouveau monde est déconcertant mais c'est un monde... Pour juger, on se doit de noter le refus de la reproduction physique, qu'on pourrait juger provisoire, et la soumission à l'immigration incontrôlée, grosse de destruction à terme de la mutation elle même, par défaut de transmission aux nouveaux arrivants... Et puis la destruction anime toujours le processus révolutionnaire, toujours suivi, on l'a évoqué, d'une remise en ordre, quelle soit le fait du révolutionnaire après sa victoire, ou de la contre révolution et ses besoins de purger. On peut dire déjà que le besoin de purger est vif. Qu'en sera-t-il demain quand les premières vraies agressions contre le premier qui se rebiffera vraiment auront lieu? Sera-t-il trop tard et verra-t-on un vrai innocent supplicié à la Girard avec ravissement par une foule exatique ? Faudra-t-il alors une vraie guerre de religion exterminatrice pour se débarrasser physiquement d'une lèpre dont on commence à connaitre les représentants ? 

    Considérer comme positive cette réaction là est il plus ou moins pessimiste que de d'admettre l'inéluctable ? Autant se suicider par avance pour protester contre ce futur là qu'il soit ou non l'affreuse lutte contre l'affreux monde. La chose est donc complexe. 

    En bref, on n'a ni suicide ni destruction malgré les apparences : le phénomène n'est pas une évolution de la nature comme on pourrait trop facilement l'accepter. C'est un combat et les adversaires sont désignés. Non pas un match, mais une guerre, et le vainqueur aura tout. Peut on vaincre cette lèpre sans sauvage extermination ? On aura l'occasion d'en discuter. 

    (1) Interview de Raoult par Asselineau https://youtu.be/Usk5wSO9U4c

    (2) Henri Hude et ses désespoirs: https://www.youtube.com/watch?v=3wiMRJHel4A

  • Les Démocraties

    La question de la définition de la démocratie, de son état et de son futur est re-posée. Avec talent et vigueur, par un couple étrange de bordelais: Pébarthe et Stiegler (2) (3).

    Christophe Pébarthe est un helléniste de première catégorie (1) qui s'est toqué d'une point aveugle de l'historiographie grecque, la "démocratie", pratique ignorée par les grands anciens, plutôt intéressé par la politique, la culture ou l'esprit. Il en déduit des principes énoncés avec un ton très pré-revolutionnaire, et en cet âge troublé qui donne envie de foutre en l'air l'atroce corruption inefficace et ruineuse qui préside à notre déclin en forme d'effondrement, c'est précieux. 

    Les 10 000 personnes rassemblées sur la Pnyx (une colline d'Athènes) dirigeaient, formés en démocratie directe, avec un esprit de cette pratique particulier, décrits avec bonheur et enthousiaste par un Pébarthe enflammé et convaincant. 

    Quelques dates: Clisthène instaure la chose en 510 , Marathon c'est en 490 et de 431 à 404 (trente ans), c'est la guerre du Péloponèse qui met fin à l'aventure ou du moins à la puissance d'Athènes. La peste d'Athènes tue Péricles en 429.

    Trois concepts, Isagoria (égalité de prise de parole) Isonomia (égalité devant la loi) Parrheisia (liberté de tout dire au nom de tous) et on en oublie: il y a des principes fondamentaux qui ne ressortent pas de la "justice", mais de l'exercice de la démocratie, la vraie.

    La pareisia, assimilée par Pébarthe à la laïcité, se définit par l'acceptation essentielle que sa vérité propre ne l'est pas pour tous forcément et peut s'affirmer telle, à la fois particulière et non pas générale: l'intérêt général, le vrai pourrait donc sortir de cette confrontation entre libertés qui tolèrent leurs différences d'avec la décision finale, qui devient alors l'objectif d'un mode de gouvernement qui se veut pratique. Cette histoire de "laïcité" permet alors de comparer les universels: le sien, celui des autres, celui de tous... 

    La réflexion est profonde et commence par assimiler le politique à une confrontation avec le savoir, et surtout le savoir global qui justifie et rend possible l'agir, et surtout l'agir collectif. Local/global individuel/collectif, le fond du problème est là et peut-on savoir où on en est ? 

    Car l'aporie est de taille: mon opinion vient de chez moi, de ma personne. Comment puis je avoir accès à celle des autres, ennemies ou trop différentes, et qui plus est à une qui serait souhaitable au point de conduire à une action collective qui influerait sur tous ? Comment un intérêt particulier pourrait il permettre un intérêt de surplomb qui serait général? 

    La solution est alors exclusivement pratique, et résout le problème, apparemment personnel, en le transformant en méthode de gouvernement. Non pas méthode pour choisir des représentants, ou soumettre à une décision, mais pour élaborer la décision et ainsi, la faire respecter. 

    Pébarthe (et aussi Stiegler) veulent ainsi donner une épine dorsale aux rassemblements révolutionnaires à venir, au-delà des nuits debouts et autres discussions entre antifas: le débat en question suppose et exige de prendre en compte les anti nucléaires, voire (j'en ai des tremblements dans les poings) le "front national"... 

    Stiegler mène depuis le Covid une lutte féroce contre la chose qui fut mise en oeuvre à l'occasion et qui a séduit (tout comme la chose qui a géré les gilets jaunes) au point de permettre sa réélection. Le paradoxe, patent et qui moi m'ébranle, la stimule: elle veut continuer à agir au lieu de tirer l'échelle, comme la logique l'exigerait. Gloire à elle ! Elle est jeune et belle et je lui souhaite bien du plaisir. En tout cas, bien qu'issue de la gauche, elle met en oeuvre un ensemble de raisonnements et de "pratiques de discours" qui la rendent en apparence absolument pure (voire immune) de bien des véroles. 

    Pour l'exemple, sa réponse furieuse, comme femme philosophe branchée à la langue bien pendue, à la question du vote des femmes dans la démocratie athénienne: et alors ? Qui se soucie du vote des femmes pendant la "République" de 1871 à 1945 ? Le concept, pratique et théorique de la démocratie est indépendant du fait que les femmes votent ou non. Cette attitude philosophique maniant l'essence des choses est tellement décalée, tellement improbable à notre époque de débiles taraudés par la vérole égalitariste (la question puante posée d'un ton agressif par une greluche barrée que je conchie au passage se fait répondre avec une puissance magnifique porteuse de la vraie virilité ) ! 

    Néanmoins, un certain nombre des points d'étapes qu'elle décrit sont plus ou moins faux et liés à son histoire personnelle (d'ailleurs paisiblement et honnêtement revendiquée) de gauche. On résumera les deux motivations du libéralisme ancien et néo à museler le peuple: d'abord sa misère abrutie manifeste dans les sociétés anciennes (les intellos du XVIII ème vivaient au milieu d'un tiers monde désespérant très en decà des bergeries de Marie Antoinette), puis il faut le dire sa tendance au moins aussi abrutie à se toquer de communisme ou de fascisme dans les années 30. Ajoutez à cela le fait que les classes moyennes pourtant dressées à coup de guerres mondiales perdues se soient encore toquées de socialisme à peine 40 ans plus tard et on a la totale: le peuple est complètement con, fait n'importe quoi et en voilà la preuve. 

    On peut y ajouter la conscience de l'actualité immédiate: soumis à ce que teste l'histoire, une pandémie suivie d'une guerre en europe, le peuple en question s'est soumis aux mensonges sans moufter, dominé et écrasé par plus fort que lui donc, et on ne voit pas pourquoi cela cesserait tellement ca se déroule sans accrocs. Le système est rodé et fonctionne, on n'en changera pas. 

    De fait, admiratif du dispositif, je ne peux que souhaiter son succès à part qu'objectivement, cette belle mécanique de domination pour des raisons mystérieuses ne sert à rien et accumule les décisions stupides à quoi rien ne peut s'opposer (c'est là le problème). Décisions qui vont précipiter sa ruine de manière imminente. Comme quoi. Ainsi donc, ce n'est pas le peuple qui gouverne, mais les évènements. Comme toujours dans l'histoire. 

     

    (1) la mort de de Romilly par Pebarthe https://blogs.mediapart.fr/christophe-pebarthe/blog/191210/les-deux-morts-de-lhelleniste-jacqueline-de-romilly?userid=448b35d6-949a-44b9-8c6d-f849b60ee7e0

    (2) Pebarthe Stiegler https://www.youtube.com/watch?v=0VTTxBJ2rJQ

    (3) Pebarthe Stiegler https://youtu.be/cpI4yBr4onY

    (4) 

  • Les interprétations quantiques

    On avait dans http://francoiscarmignola.hautetfort.com/archive/2019/01/04/les-ontologies-du-quantique-6118078.html évoqué des ontologies inutiles, on se doit aussi d'évoquer les interprétations, ce qui n'est pas la même chose, tout à fait, car après tout, cette histoire de "mesure" reste bien mystérieuse, voire carrément sèche: que se passe-t-il? 

    Comme précisé, la mesure n'est pas "expliquée" par la décohérence, et une explication lumineuse est donnée en (1) de tout ça. Au passage est expliqué, cela est détaillé en (2), la théorie de Zwirn, le "solipsisme convivial". 

    Zwirn a animé avec D'Espagnat un colloque "culte" décrivant les débats sur toutes les interprétations possibles de la chose. C'est le bouquin "Le monde quantique". Il est un pédagogue hors pair, et se trouve extrêmement sympathique et avenant, et d'une honnêteté intellectuelle indéniable. 

    Son solipsisme qu'il veut situer dans la mouvance de Von Neumann et de Wigner est en fait une variante (à mon avis) des mondes multiples d'Everett: chacun voit lors de la mesure une possible valeur de l'état superposé, et s'accorde avec les autres observateurs (c'est le convivial) qui eux voient autre chose et sont contents car une "traduction" des "faux" acquiescements est effectué PAR la réduction de la fonction d'onde, en fait non pas une traduction, mais une "existence" simultanée de la vision des autres avec qui ils s'accordent... À l'objection que l'on ne voit pas pourquoi et comment cette traduction est faite, Zwirn ne répond pas grand chose, et le reconnait... 

    Cette conception concerne le monde, qui refuserait de rester multivalent "à la quantique", et force les organismes à ne percevoir que les vecteurs supports d'un état et non pas cet état composite en lui même, et cela en plus cohérent avec chaque point de vue manifesté. Chapeau, le monde ! De plus, cela suppose qu'une conscience soit mise en jeu, la seule valeur sélectionnée n'étant qu'une illusion personnalisée. 

    Et puis il y a Coleman

    Sydney Coleman (5) a une autre conception de cette histoire de mesure, qui semble faire intervenir la conscience d'une autre manière. En gros, il prétend que seule l'équation d'évolution de Schrödinger suffit à décrire la mesure: un opérateur de mesure projetterait l'état global du système sur l'un des deux vecteurs propres disponibles de l'appareil, et pi c'est tout, c'est comme ça qu'on le voit. Il refuse absolument toute influence d'une "conscience" sur la réduction du paquet d'onde, qu'il semble nier par ailleurs. En gros le quantique est ce qu'il est parce que c'est comme ça. 

    Coleman est ainsi porteur d'une interprétation dite "Zen" qui consiste à modifier son propre état mental pour comprendre l'incompréhensible, toutes les "interprétations" n'étant que des illusions bouddhiques... Ce retour à l'évidence. 

    En écoutant Haroche

    La conférence du prix Nobel français Haroche vaut le détour: avec une suave raideur le monsieur nous montre le réel microscopique expérimenté qu'il touche avec le doigt et illustre tout ce qui est nébuleux et "de pensée". Sa mention du mot "nature" pour désigner ce qui se manifeste sans vergogne dans toute la précision des descriptions élaborées avec exactitude il y cent ans a un retentissement extrême: "nature", "réel" : les voilà, les vrais. 

    Derrière tout cela il y a la course à l'ordinateur quantique qui continue et le monsieur dont l'expérience a mis 15 ans à être réalisée, a de la ressource: il met en oeuvre les trucs de son maitre, prix Nobel aussi, et cela pour passer à la suite. 

    En gros, Haroche (et son équipe) a créé un "chat de Schrödinger" sous la forme d'un ensemble de photons qui rebondissent dans une cavité super refroidie suffisamment longtemps pour être observés dans un état quantique complexe superposé. En envoyant des atomes spécialement hackés dessus, il mesure sans destruction le chat et c'est tout l'intérêt de la chose. 

    On commence par l'état initial qui à basse température, l'apparition ou pas d'un photon du fait "de la nature" (la température). Le système a deux états 0 ou 1 photon et on a là l'intuition présentée par Haroche du caractère spontané et hasardeux du monde microscopique: l'état se projette sur le vecteur propre zéro photon avec une certaine probabilité. L'apparition contribue à l'état avec le hasard fondamental de la venue à l'existence. Derrière on a les modes quantifiés du champ électromagnétique dont l'énergie s'accumule et avec un "pop" réifie le quantum fondamental du monde quand un nombre entier de longueurs d'ondes s'accorde avec la distance entre deux parois métalliques limées à mort et à bon escient. 

    La prétention mathématico physique va jusqu'à mesurer des états superposés entre les sous états nombre pair et impairs de photons (encore de l'apparition hasardeuse de photons). On mesure le réel et en le remesurant, on vérifie bien que l'état a été projeté sur son vecteur propre. Le chat est devenu "l'une des alternatives"... Comme prévu au demeurant. Problème de la mesure ? Ou évidence matérialisée que la méca-cul marche ? 

    Haroche mesure alors la décohérence, ruine de l'état superposé, dont la vitesse croit avec le nombre de photons, hélas, et qui traduit la transformation des états superposés en mélange statistique du fait des interactions avec la complexité de l'environnement. Quoiqu'on en dise, il n'y a pas maintien de la superposition en termes réels et les élucubrations de Zwirn semblent absurdes. Ce qui montre que je n'ai rien compris à rien... 

    Les interprétations, en résumé.

    Faisons une petite liste des interprétations du "problème de la mesure": 

    • Copenhague : la première, la référence; c'est comme ça et puis c'est tout
    • Mentale (Von Neumann, Wigener) c'est la conscience qui réduit le paquet d'onde
    • Transactionnelle (John Cramer) 
    • Objective (GRW = Ghirardi, Rimini et Weber) une perturbation de l'équation de S. perturbe tout système
    • Relationnelle (Carlo Rovelli) tout dépend des interactions 
    • Bohm l'onde pilote de de Broglie, plus un hasard initial indispensable, mais hélas pas vraiment relativiste... 
    • Histoires consistantes (Roland Omnes,Murray Gell-Mann) seules les "histoires consistantes" ont un effet

     

    (1) Hervé Zwirn sur le quantique https://youtu.be/XfxTATYprX0

    (2) Zwirn et son solipsisme : https://youtu.be/OcFJMYjUE1U

    (3) Zwirn encore expliquant encore https://youtu.be/OmdLt649mvk

    (4) http://www.afscet.asso.fr/modelisation-quantique/2018-2019/Zwirn-solipsisme-convivial-08octobre2018.pdf

    (5) la conference de Haroche https://culturesciencesphysique.ens-lyon.fr/video-html5/depphysique/2011/haroche/tests-fondamentaux-de-la-physique-quantique-dans-une-boite-a-photons#diapo03

     

  • Les préludes

    On a celles de Chopin, mais aussi celles de Debussy. De toute façon, elles sont 24 à chaque fois. 

    Pour ce qui concerne Debussy, on a deux livres de 12. 

    Debussy est (lui aussi) un immense génie, est Français, récent (il meurt en 1918), ultra-moderne et absolument fascinant. L'invraisemblable classe luxueuse de ces merveilleuses ambiances est incomparable: il est tout à la fois, musique de bar, de concert, d'église et je me souviens encore d'avoir pleuré la victoire de Hollande en 2012 sur "des pas dans la neige". La musique d'un concert insolent hyper distingué avait remplacé le dégout d'entendre l'annonce de l'inéluctable désastre: l'enchantement avait tout comblé et tout consolé. Merci Achille-Claude ! 

    Debussy comme l'immense génie qu'il est joue du piano en racontant une histoire, toujours. 

    Livre 1

    Danseuses de Delphes. Lent et compassé, tout le charme mélodique d'emblée. Un long silence au milieu. 

    Voiles. tic ta da da da: le plus debussyesque qui soit... 

    Le vent dans la plaine. Un souffle avec des petites rafales... 

    Les sons et les parfums tournent dans l'air du soir

    Les collines d'Anacapri.

    Des pas sur la neige. Répétitif lancinant et perdu. Ouaté et tendre. 

    Ce qu'a vu le vent d'ouest. Puissant et tournoyant. 

    La fille aux cheveux de lin. Fait écho aux voiles (selon moi). Plein de notes... 

    La sérénade interrompue

    La Cathédrale engloutie. Solennel, pour le moins. 

    La danse de Puck.

    Minstrels. De la prose, un peu nostalgique. 

     

    Livre 2 

    Brouillards. L'esprit Debussy tant tout ce qu'il est capable. N'importe quoi en apparence alors que le lien tonal est maintenu en permanence, toutes les arabesques anticipées et le mélodieux tragique du sombre toujours signifiant. Du cinéma ! 

    Feuilles mortes. Elle est déjà tombée et va n'importe où. On ressent à cette vue, et c'est ce qu'on entend. L'une d'entre elles a un destin propre, et on l'a suivie. 

    La Puerta del Vino. Le faux espagnol à la française. De loin, avec une allusion, encore plus espagnole que l'Espagne... On sent un léger reproche au sujet du côté capiteux du vin, mais je rigole. Musicalement une "habanera".

    Les fées sont d'exquises danseuses. On a là bien sur les "sorcières", c'est-à-dire les feuilles mortes qui dansent, toujours, sans cesse. La grande mélancolie abstraite à la française. 

    Bruyères calmes. Très connu et profond, mais aussi, délicatement désinvolte. 

    Général Lavine. Sautillant et truculent, un cakewalk(1), danse d'esclaves nègres syncopée, manière du début de XXème siècle... 

    La Terrasse des audiences du clair de lune. Lunaire donc, et perlé. 

    Ondine. Étrange et surprenant, virtuose et espagnolisant. 

    Hommage à S. Picwick

    Canope

    Les Tierces alternées

    Feux d'artifices. Des pluies de perles séparées par des silences et des éclairs. 

     

    (1) https://fr.wikipedia.org/wiki/Cake-walk

  • Les atrides

    Dur dur... Ça part dans tous les sens

    Pélops et Hyppodamie ont pour fils Atrée et son jumeau Thyeste et aussi Chrysippe

    Atrée et Thyeste tuent Pélops

    Atrée et Erope ont pour fils Agamemnon et Ménélas

    Erope et Thyeste sont amants

    Thyeste et sa fille Pélopia ont un fils Egisthe 

    Ménélas épouse Hélène, ont pour fille Hermione

    Agamemnon épouse Clytemnestre , ont pour enfants Oreste et Iphigénie

    Iphigénie n'est pas sacrifiée à Artémis par Agamemnon, elle est emmenée en Tauride

    Egisthe et Clytemnestre sont amants

    Oreste tue Egisthe et Clytemnestre

     

    Priam épouse Hécube, ont pour fils Paris et Hector,

    Paris enlève Hélène et tue Achille  

    Hector épouse Andromaque, ont pour fils  Astyanax

    Pélée épouse Thétis, ont pour fils Achille

    Achille viole ou épouse Deidamie, ont pour fils Néoptolème ou Pyrrhus

    Achille tue Hector, est tué par Paris

     

  • Les ingérences

    François Fillon, mon chéri de 2017, est de retour à l'assemblée nationale pour témoigner sur la commission "ingérence" de l'Assemblée Nationale. Six ans après sa défaite mémorable, qui a, à mon humble avis, consommé l'abaissement définitif de la France et l'échec complet du redressement miraculeux accompli par De Gaulle en 1958, le voilà, expert de l'alliance russe, qui donne son avis. 

    On commence par le concept d'ingérence. La commission présidée par un député R.N. Jean-Philippe Tanguy ne semble nommée que pour parler de l'ingérence du jour, celle de l'ennemi russe qui a fait élire Trump, gravement perturbé l'élection de Macron, et qui mène le génocide en cours en Ukraine... À moins que ce ne soit pour démontrer le contraire et l'absence complète d'ingérence, précisément, de la part de la Russie, le concept ridicule et inopérant ne pesant rien face à ce que décrit Fillon en quelques phases: les seules ingérences étrangères dont il a eu connaissance sont: 

    • les USA qui ont écouté la présidence française, lui même et tout son gouvernement pendant tout son mandat
    • les USA qui ont écouté tous les gouvernements européens pendant la période
    • les USA qui par les lois d'extra territorialité exercent des pressions constantes sur les entreprises françaises et européennes, l'affaire de la BNP (jugée en 2015, 9 milliards d'amendes) étant la plus importante de toutes.
    • La Chine dont l'espionnage constant en France et en Europe est notable, noté et effectif
    • les pays d'immigration musulmane, Turquie, Algérie et Maroc, faisant pression sur leur diaspora lors des élections en France et en Europe.

    L'intervention qui suivit de la part de J.P. Tanguy fut à la fois hallucinante de cynisme obstiné et/ou d'efficacité hypocrite: il demanda des précisions sur la vague allusion faite par Fillon au sujet de l'inefficacité globale des influences journalistiques menées sur les réseaux sociaux ou télévisés par la Russie... Un tel contraste avec ce qui venait d'être dit, signe l'obsession exclusive d'un pays humilié et vassalisé en charge des basses besognes envers l'ennemi de son maitre. Et encore, ce maitre-là n'est que le gagnant d'une élection truquée (par les Américains eux même, le FBI ayant délibérément censuré des réseaux sociaux, l'"ingérence" se posant un peu "là"), et qui de plus, était l'un des commanditaires et des lecteurs des écoutes menées alors qu'il était vice-président du très célébré président de couleur responsable, excusez du peu, de l'installation des frères musulmans en Libye, Tunisie et Egypte, de la création de Daech du fait de son départ d'Irak, et bien sur  du coup d'État en Ukraine responsable de cette guerre. Mais cette charge haineuse contre qui est de fait le principal responsable d'ingérences étrangères en France, les USA, ne fut pas menée par Fillon, tout en allusions distinguées: il n'est plus qu'un vendeur de rillettes sur la place rouge... 

    A la décharge de M.Tanguy, quoique le vice se cache dans les détails, il demanda à Fillon si celui-ci était au fait des procédures de sécurité des communications, connaissant l'espionnage américain. On lui répondit 3 choses. D'abord que Snowden ne fit ses révélations, tout de même un peu surprenantes, qu'en 2013 après la défaite de Sarkozy, ensuite que tout le monde trouva cela normal, au point que nul ne songea à le reprocher aux US, ni bien sûr à reconsidérer ses alliances avec eux, le monde "libre" se devant de rester uni. Le dernier point fut qu'effectivement, à l'époque (et j'en suis témoin ), nul ne pensait qu'on puisse simplement en recevant un mail, voire un sms, on pouvait avoir son téléphone ou son ordinateur compromis. L'affaire Pegasus a consommé la gravité du problème: seul la méthode mafieuse du message manuscrit empaqueté dans du scotch et transmis de mains en mains peut être considéré sur. Le reste est public. 

    La transparence des communications sur l'internet fut totale pour les US, jusqu'en 2013, et bien sûr au-delà... Notre naïveté à nous tous, internationalistes libéraux (Fillon en était) fut totale pendant toute la période. Que n'avons-nous moqué ces affirmations sur ce système, soi-disant inventé par l'armée et dont nous étions sûr qu'il l'avait été par des hippies, alors qu'en fait, il était entièrement écouté par la NSA, tout simplement, depuis le début. 

    On en rajoutera avec une question imbécile de la rapporteuse dont la blondeur nacrée ne traduisait à part la bêtise, que la sénilité, et qui proposa de délimiter géographiquement les lieux de reconversion des anciens hauts responsables français. La réponse qui mentionna bien sûr la Chine et l'Algérie sans parler de l'Arabie Saoudite, ne mentionna pas les USA, sans doute déjà trop fournis pour qu'on puisse faire grand chose... Ayant conseillé une entreprise américaine d'"intelligence artificielle" Fillon est questionné: il répond en souriant qu'il s'agissait d'une entreprise de téléphonie qui choisissait intelligemment l'opérateur destiné à répondre... Cette ironie profonde (qui confirme l'extrême hauteur de vue que j'avais attribué à mon candidat de 2017) se poursuivit avec la réponse à une grosse dame qui le questionnait sur les caractères personnalisables des ingérences possibles (besoin de reconnaissance, d'argent): il mentionna d'"autres" besoins dont il avait été témoin lors de ses voyages. Arriver à conjuguer subtilement insulte à la bête laideur et obscène allusion est du grand art. Chapeau Fillon. 

    Au sujet des règles devant s'appliquer aux conflits d'intérêts en général, Fillon expose le problème très moderne de la substitution de la décision "par les règles" à la décision "par les personnes". Engagés personnellement dans des décisions qu'ils devaient assumer, les décideurs (Fillon cite les préfets, archétypes des hauts fonctionnaires dont le rôle et le pouvoir sont effectivement maintenant détruits) sont maintenant remplacés par des dispositifs (Fillon utilise le mot avec gourmandise)  d'"intelligence artificielle", c'est-à-dire des dispositifs essentiellement stupides d'application bêtes de règles souvent inadaptées, et pouvant et devant conduire à l'absurde. L'essence du monde actuel, en quelque sorte "soviétisé", et qui court vers sa ruine en klaxonnant. La suggestion par la dame de rajouter des règles imbéciles pour résoudre ce problème consomme la tendance "féministe" des processus étatiques occidentaux, dont la cause, la règle de la parité dans l'attribution des mandats électoraux, transforme les gouvernances en application (rigoureuse) de recettes de cuisine. 

    On pense à cette saillie admirable décrivant notre Occident d'aujourd'hui, opposé à l'Union Soviétique d'hier: exactement comme eux à l'époque, nous interdisons les médias de l'ennemi, refusons d'y faire des affaires, interdisons d'y aller voyager, et confisquons ses biens et son argent... Par peur de la contamination sans doute, imaginez des banlieusards français amenés à visiter un Moscou propre sans ordures ni SDF, parcouru la nuit par des femmes seules et où "Allah Akhbar" n'est crié que par des tchétchènes fêtés partout pour leur gentillesse... 

    Isolé du reste du monde, l'Occident avec ses sanctions imbéciles ignore qu'il alimente avec la guerre en Ukraine un tourbillon de méfiance et de haine dans les 3/4 du monde. Fillon, rangé des voitures, nous aura prévenu. 

    (1) Audition de François Fillon https://videos.assemblee-nationale.fr/video.13312676_64512a5a7de21.ingerences-politiques-economiques-et-financieres-de-puissances-etrangeres--m-francois-fillon-anc-2-mai-2023

  • Les pensées

    Me trotte dans la tête une théorie du tout qui me semble-t-il fait litière de bien des spéculations et en tout cas, qui me semble éclairer bien des préoccupations et donc d'en voir les conséquences sous un angle à la fois compréhensif et apitoyé. Du pur hubris, condamnable et ridicule et mais pourquoi pas s'y lancer, ça m'amuse. 

    Il y a trois modes ou façons de penser, qui correspondent à trois manières de représenter, vivre et transmettre les influx nerveux qui représentent les choses dans le cerveau. Ces trois modes sont actifs simultanément et s'utilisent les uns les autres au cours des activités humaines. Ils se complètent mais accèdent à des sensations et des significations différentes. On pourrait parler d'"ordres" différents, tant ils correspondent à des activités distinctes et essentielles de l'activité humaine.

    Le premier ordre est l'ordre symbolique, rationnel, logique et donc soumis au principe de contradiction. On ne parlera pas du principe de raison ni de celui du tiers exclu. Tout franchissement ou extension de cet ordre conduit nécessairement à l'oubli ou à la violation consciente du principe de contradiction, source du n'importe quoi logique, et de la ruine de la pensée, dès qu'elle s'aventure sous cet ordre dans les paysages interdits. 

    Il y a deux autres ordres, qui n'ont pas besoin du fameux principe pour enchainer les pensées et discourir en poursuivant des buts: l'ordre psychologique ou sensoriel et l'ordre spirituel. 

    L'ordre sensoriel est une pensée, qui pourrait être partiellement inconsciente, mais qui peut aussi exercer la volonté consciente symbolisée par ailleurs: par la sensation passive (la douleur, le plaisir) et aussi active (la gastronomie, le combat ) on pense la relation au corps et exerce sur celui-ci les pressions nécessaires à l'accomplissement physique, qu'il soit celui des coups, de la digestion ou de la copulation.  On trouve là les émotions, le sexe et la violence, disons toute la psychologie et ses affects multiples. 

    L'ordre spirituel est mon innovation à moi, quoique. Soigneusement distingué de l'ordre émotif trop facilement utilisé pour résoudre les apories du symbolique, il est en fait le lieu de la conscience qu'elle soit celle de soi ou des autres, ou même celle de Dieu, le grand autre participant du fonctionnement de cet ordre-là, qui est la sensation de l'invisible, redoublée donc de soi confronté à ce mystère-là, qui se trouve et c'est là l'essentiel, non conceptualisable et non symbolisable dans cet ordre. 

    Nous sommes là avec une représentation fonctionnelle de l'inconceptualisable de Blumenberg (je me lance) qu'on situe dans la tête, biologiser la chose qui pense ayant l'avantage de la rendre possible pour de vrai au lieu de la laisser dans le concept. Ce mode de pensée est une activité neuronale distincte, avec ses lois et ses négligences et non pas une conceptualisation d'un état virtuel de la pensée réifiée. 

    Qu'une source et son doux bruit soit la personnification d'une dryade est effectivement conceptualisable mais l'élaboration psychologique puis spirituelle de la perception de cette considération-là puis de la mise en scène de son être à soi face au mystère de cet autre mystérieux ne l'est pas (conceptualisable) et donc, incapable de participer au monde logique qui ne peut jouer que le rôle rassurant d'une parole tranquille. L'émoi et donc le raidissement terrorisé devant la chose vient bien d'un corps ému, mais la source de ce mouvement-là, où est-elle ?  Où et comment s'est formée cette perception-là ? Hors de la logique et hors de l'émotion, la conscience qu'on doit admettre être là, reste mystérieuse fondamentalement en tout cas, et comme tout le monde le dit "impensable" comme telle. 

    Le monde spirituel est aussi le lieu de l'Art, qui bien loin de se réduire à une "activité sensible" qui rayerait harmonieusement l'écaille de tortue, produit des représentations dont l'existence fait exister un "autre" antérieur d'essence mystérieuse et dont le mystère ne peut s'exercer qu'au-delà. Là encore, le mystère, celui de la conscience. 

    Voilà donc un cadre simple pour décrire et voir décrire le monde, ou paresseusement cesser de le décrire, la vie étant plus simple qu'on ne le croit.  En tout cas me voilà à comprendre et interpréter toutes les apories et mondes multiples ultra complexes tous différents et toutes descriptions ampoulées et mal conceptualisées de la simplicité de mes trois ordres en interaction. Une manière d'étendre sur la rugueuse table une toile cirée légèrement humide sur laquelle on ferait glisser les verres de pif... 

    Au sujet du spirituel, dont l'existence à part entière suffit à expliquer et comprendre les religions, toutes faites de la symbolisation nécessaire dans l'ordre logique de choses entre aperçues ailleurs et dont on ne peut se débrouiller logiquement au point d'exiger et à bon droit l'investissement dans la contemplation du mystère, introduction à toutes les esthétiques et à toutes les mystiques. On peut donc lui accorder droit de cité, et autoriser donc les sécularisations: s'y investissent bien sûr tous les émois laïques et toutes les sensations d'injustice, et donc avec la violence et l'absurde assurance qu'on trouve dans les grandes passions religieuses, surtout celles préparées à l'avance par les grands discours et les grandes musiques, capables d'émouvoir... 

    On n'a pas transformation mais activation des ordres nécessaires de la pensée, capable de contenir toute la richesse du monde des représentations possibles, ce monde infiniment riche situé entre les individus, qui garantit et permet leurs discussions et rencontres et donc l'essentiel de la vie. On notera au passage que la communication intersubjective nécessite des encodages propres à la pensée justement dite "symbolique" et que toutes les ambigüités du langage sont bien situées à ces frontières, et rendent l'ordre spirituel encore plus nécessaire. 

    Pour conclure, on peut situer le fameux (...) objet G dans la pensée symbolique comme expression imagée, symbolisée, de la chose impensable que la conscience croit percevoir: l'autre bizarre que l'autonome, imaginative et irrépressible  conscience "imagine" ou non en filtrant ses aspects par la pensée "logique" qui lui est ainsi subordonnée. Car c'est bien cela l'ordre des ordres: l'autonomie de la conscience toute puissante, qui utilise la puissance et la froideur du raisonnement contradictoire pour décrypter les encodages du monde et survivre tout simplement... C'est la force de cette logique que d'obliger la conscience à se discipliner, tout en lui laissant bien sûr le soin de diriger ... la machine ! 

    Naturellement, faut-il le dire, nul besoin de "surnaturel" ici, l'hypothèse est inutile et n'a pas de "la place": le monde spirituel est assez riche pour concevoir des autres très présents, capable d'émouvoir au-delà du possible et aussi de générer des discours intarissables. La richesse infinie des espaces magiques peut se déployer à loisir, et cela n'en est pas moins effrayant... Les formes infiniment riches du souvenir peuvent de plus rendre quasi immortelles certaines âmes ou perceptions spirituelles de grandes présences, celles qui ont réussi à communiquer l'ineffable... 

    Voilà qui devrait régler son compte pour toujours, tout en en respectant l'origine et la matérialisation neuronale complète, à cette chose existante invisible dont tous les doutes continuent encore d'en suspecter l'existence dans un matériel surnaturel contradictoire qu'on continue de vouloir efficient dans notre nature alors qu'on sait bien qu'il ne l'est pas... Ma contribution serait donc celle d'un athéisme absolu mais respectueux qui en plus accepterait l'immortalité des vraies âmes dans un monde spirituel partagé car oui, on peut communiquer des métaphores et donc s'échanger des photos de doigts pointés vers les toujours vertigineuses profondeurs des perceptions de l'autre, celles qui peuvent traverser les âges pourvu qu'elles soient décrites avec talent.