BWV 45
BWV 45 "Es ist dir gesagt, Mensch, was gut ist" n'est que l'une des cantates, et il y en a d'autres; pourquoi s'y attacher, et on a pu s'attacher à d'autres... Il se trouve qu'elle est de mon point de vue "parfaite" en ce que rien ne peut lui être reproché en aucune manière. Diamant étincelant partout !
En gros, on a les choeurs d'entrée et de sortie et trois arias incroyables absolument géniaux, soutenus par tout ce que Bach peut fournir de perfection totale (l'ai-je bien loué, le monstre?).
On s'est attaché au bachstiftung (1), à mon sens exceptionnellement fidèle à cette perfection. Vitesse ou plutôt vivacité joyeuse et énergie magnifique, le meilleur de tout ce qu'on peut trouver, à mon humble avis.
Le NBS (2), avec une ouverture et une basse extraordinaires a l'air alto chanté par un homme moyen, hélas.
L'histoire
7 parties, un choeur d'entrée et un choeur de sortie, suivis et précédés de deux récitatifs.
On commence par l'affirmation d'un dit de la part de Dieu: on exige de toi quelque chose.
Le récitatif enfonce le clou: un ordre est donné on doit se préparer à l'examen de son obéissance.
3 arias, ténor, basse et alto développent l'histoire.
Le ténor: lors de l'examen qui viendra, récompense ou tourments suivant l'obéissance ou la transgression.
La basse: à ceux qui se vanteront diversement, on demandera de se "retirer"
L'alto: celui dont la foi vient du coeur devra aussi le dire, car le dire seulement ne mène qu'au feu
Le dernier récitatif évoque l'échec, qui guérira mon âme? Tandis qu'avec "son" assistance, on lui obéira.
Le dernier choeur: accorde-moi de t'obéir et lorsque je le ferais, accorde-moi le succès !
En gros, une histoire étrange en rapport avec la Religion, mais exprimant et c'est ce qui fait la beauté de la musique, une conception de l'Art qui illustre la différence entre sentiment et émotion. Le sentiment c'est ce qui vient de nous et qui cherche dans la musique quelque chose à assouvir ou à exprimer "passivement". L'émotion c'est ce qui vient du dehors, qui comme une réalité devant vous, devient envahissant et vous remue les tripes. Quelque chose d'extérieur à vous, présent et puissant. Exactement ce que peut être l'ordre divin exprimé par l'histoire. Un attrape mouches luthérien, extraordinairement efficace.
La cantate
L'ouverture Es ist dir gesagt triomphante et dansante est du Bach merveilleux d'emblée. Les montées au ciel des filles, et puis la mélodie qui ne s'interrompt que pour permettre à l'orchestre de relancer la machine:
es ist dir gesagt, Mensch, was gut ist !
L'aria ténor est le plus complexe. Une intériorité connue par ailleurs par une mélodie de fond "classique" qu'on retrouve (où?). Bon:
a a b b c d c d
e f f g g h
e f g h
f g g g(ooooo) h h(ooooo)
L'aria basse du bachstiftung, la jeune basse, est absolument splendide, l'un des très grands morceaux de basse de toutes les cantates, en tout cas. Herr Herr ! et puis les Ha ha ha: une puissance incroyable.
Introduction triomphante !
Mais des prétentions répétées Herr Herr , n'avons nous pas etc etc.
Mais cela finit mal Ha Ha Ha Ha "weichet aaaaaaalle von mir, ihr Übeltäter!"
L'aria alto,
Avec la flute mystérieuse et sa ritournelle délicieuse est un sommet invraisemblable de beauté. De fait l'un des centres (et il y en a plusieurs) de la musique occidentale, trésor d'humanité et de perfection.
Le message est que celui qui croit vraiment doit le proclamer. Bach y arrive très bien, par exemple...
1) a b b a b
2) c c a b b c (eeeeen) c
3) d d e f d d e f
4) a b b (aaaaa) a b
5) c c a b b c (eeeeen) c
Cet aria est une aventure à lui tout seul. On se doit de comparer les deux cc abb cc.
Qu'il se termine par un petit récitatif étonnant et ... calmant.
Le choeur final est "à coeur poussé en avant" choral "ultra connu" au demeurant.
(2) Netherlands Bach Society