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  • Les histoires des années 80

                           

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  • Les Histoires

    On pourrait imaginer une nouvelle manière de faire de l'histoire, en suivant deux axes parallèles exclusivement et simultanément. 

    D'abord que l'histoire c'est d'abord un discours de légitimation de ce qui s'est passé: justification, explication, description, il s'agit de dire "pourquoi" cela s'est passé comme cela et pas autrement. Le discours produit ne peut être que celui-là car toute prétention à la rationalité du producteur de ce discours tomberait s'il se contentait de supposer que tout évènement historique n'est que le résultat d'un hasard inconcevable, d'une loterie globale insensée. Il faut bien que les intentions, les volontés et les plans à long terme jouent un rôle, sans parler des tendances lourdes et des accumulations de ressources prêtes à servir... 

    Expliquer cela c'est légitimer. Point barre. De plus, cette histoire-là sert. Immédiatement ou à long terme pour légitimer des décisions prises AVANT la suite de l'histoire. L'histoire influe sur l'histoire, je dirai bien sûr. 

    On pourrait alors considérer que cette légitimation a elle même une histoire, car ces histoires-là changent, figurez-vous, et se consacrer à l'histoire de l'histoire, comme élément moteur de l'histoire elle même devrait être le but affiché de cette production intellectuelle et scripturaire. Si tant est qu'elle veuille enfin être rigoureuse... 

    Ensuite que l'histoire comme évènementiel acquis et effectif ne peut in fine être que le résultat direct de l'application de forces pendant un certain temps, en d'autres termes que l'application d'un travail, c'est-à-dire d'une énergie qui se trouve consommée pour produire les effets visibles de ce qu'on veut décrire: victoires militaires, construction de pyramides, cela a couté, et l'histoire du déploiement de ces couts, face à une adversité que l'on peut qualifier de "frottement", est juste l'essence de toute description possible des évènements. 

    On se placera donc complètement à l'écart du funeste concept de "domination", la notion étant à la fois d'origine guerrière (le dominant est fort) et d'origine littéraire (la domination c'est pas bien). Séparer en deux l'ambigu concept c'est faire du scientifique, ou tout du moins du rigoureux, l'utilisation du mot, qui fait bien rire dans les chaumières sado maso n'étant qu'une allusion fine, soit aux bordels que fréquentaient les contemporains de Weber ou de Foucault, soit tout simplement à l'éternelle forme de plaisir que prennent partout, mais pas toujours, les humains excités. 

    D'autre part, on remarquera que la domination est légitimante des deux côtés du manche, alors que les forces qui sont d'action et de réaction sont bien égales quand elles s'annulent en un point d'équilibre qui, décrit, se trouve une image du réel et c'est bien ce qu'on veut. L'histoire n'est pas l'étude de la méchanceté ou de l'oppression, sauf bien sûr si on a "un cadavre de nègre à vendre" suivant l'expression consacrée... 

    Voir le monde comme expression de forces est bien sûr amoral en un sens plus que nietzchéen sauf que l'étude des discours de légitimation associés, et surtout, de la totalité d'entre eux, devrait permettre de faire la part des choses. 

    Justifier un écrasement militaire au nom de l'essentialité inférieure non pas du dominé mais de l'assassiné mis en esclavage, quand c'est un discours produit dont les effets traversent les siècles et justifient d'autres esclavages sans guère de transformation sémantique véritable est un discours de légitimation dont la description froide doit pouvoir en faire ressortir les côtés "forcés", et on en revient à l'autre thème sous un angle capable d'éveiller le côté moral, dont il n'est pas question de nier ni l'existence ni l'intérêt. La force qui se manifeste peut fasciner ou exciter, elle n'en est pas moins motrice et productrice d'effets. La contempler lucidement est le devoir du sage. 

    Les conséquences de ce beau programme sont multiples et variées et devraient avoir un intérêt en bien des endroits. En particulier pour éclairer ce que peut bien vouloir dire l'historien trop subtil:  ces choses sont elles réélles et peut on appliquer à notre époque l'énergie logique et législatrice d'un Péricles à moins que nous n'en soyons, légitimation oblige, à jamais obligé de célébrer ce qui a une histoire, qui a été différent et qui pourrait changer si nous le voulions vraiment. 

    Je ne parle pas des considérations sur les grandes forces implicites qui meuvent l'histoire du monde, comme l'Esprit, la volonté divine ou la victoire toujours repoussée du prolétariat, sans parler du marché omniscient ou du pouvoir bourgeois de se reproduire: elles ne sont que d'obscures divinités foireuses évoquées par des prêtres qui se sont toujours moqués du monde, tout le monde le sait bien. 

    La seule force c'est la force elle même et encore, elle n'est rien que vecteur et son intérêt (comme concept) est d'être appliquée sur une certaine distance, c'est à dire à une certaine vitesse un certain temps, pour produire ce que j'appellerai des "étincelles", du feu, de l'action divisée par du temps, de l'ENERGIE, source véritable de tout ce qui se meut dans notre monde. 

    On introduira à ce propos le critère fondamental du choix de toute politique destinée à optimiser l'usage de cette énergie, et qui est de décider d'appliquer une force supérieure un court instant, ou bien une force inférieure pendant longtemps. Dilemme d'Achille et choix fondamental que tout être vivant applique sans cesse et en tout temps, image de l'option éternelle de la survie, il est essentiel à comprendre et à utiliser. Il caractérise et oriente, et constitue l'axe essentiel de toute description. On pourrait dire qu'il module l'axiologie, toute volonté orientée effectuant ce choix-là, toujours. 

    On pourrait dire que ce qui oriente ce choix est la situation essentielle de l'acteur, le petit rapide choisissant bien sûr ce qui va l'avantager. Mais qu'en sait on vraiment ? Le plus petit, humble et persévérant va travailler longtemps pour construire sa monstrueuse termitière... etc etc. L'histoire est d'abord diverse, et même si prise au hasard, les décisions sont d'abord des productions de forces qui s'affrontent et qui finalement "décide" du sort du monde, sa réalité. 

    Toute considération morale ou esthétique qui permettrait de se départir de la considération de ce calcul là dans l'appréciation de l'histoire est une distraction, un faux semblant, une tromperie et on vous aura prévenu. 

    On appliquera cette histoire d'énergie aux jugements actuels concernant l'Ukraine, avec toutes les stupides considérations qui concernent la victoire de l'Ukraine, jugée souhaitable ET possible, voire certaine, par un grand nombre d'experts télévisuels dont l'absolue bêtise et décrédibilisation passe en ce moment par un pic que je vous dis pas. 

    Tous les discours sur l'"histoire" que l'Ukraine gagnerait militairement du fait de sa "force", en fait de sa motivation nationaliste  (en plus, alors que celle-ci, proprement nazie est construite sur une "histoire" rien moins que troublée), très supérieure à celle d'une armée de moujiks dégénérés, alcooliques et barbares, est parfaitement ignoble et lamentable, indigne de cette civilisation prétentieuse qui ne mérite plus de survivre, et dont je souhaite la mort, voilà une conception axiologique déterminée... 

    Plus que jamais, la force brute, la vraie, va prendre ses droits, encore hélas. Mort aux cons...