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  • Les platoniciens

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  • Les managés

    On a lu le magnifiquement heideggerien, mais amateur (1). 

    Amateur car parfaitement clair et compréhensible: l'ère de l'actuel est passé par là et les petits jeunes à défaut d'avoir appris à lire, on appris à parler: clairement. En plus celui là a lu au delà du possible et nous (me) donne un éclairage complet sur l'une de mes détestations, peut être la seule que je puis avoir: Macron est un manager et le détestable management est ce monde perverti que je conspue.

    Bien sur convoquer H. là est de plus immensément délicieux. Mieux, on pose la question:"et si le management était à Heidegger ce que les sophistes furent à Platon?". Un régal.

    Parlons du "Dasein": l'état de présence au monde de l'individu, d'ouverture au monde. Et bien c'est cette ouverture au monde que veut détruire le coaching en repliant l'homme sur lui même pour le mieux reprogrammer... 

    Ce n'est pas  l'humble technique que H. dénonçait, mais  l'"organisation", c'est à dire le management, qui  scientifique lui même, s'applique d'après Taylor lui même, à toutes les activités humaines...

    Taylor est un quacker héritier de William Penn, le fondateur de la Pennsylvanie, le quacker est un hérétique tremblant, persuadé que l'étincelle du saint esprit se propage de fidèle à fidèle et donc se trouve une société des amis. Pourquoi donc s'appelle donc nous tous par nos prénoms? Et bien parce que le management est sécularisation de ce mode de vie là. 

    Et puis H. et la cybernétique! Au Spiegel en 1966: "-Qu'est ce qui remplace la philosophie? - La cybernétique". On a donc H. et ses obsessions autour du management, élément principiel de l'achèvement de la philosophie, à la fois son accomplissement et bien sur, sa fin. On a ainsi la cybernétique, comme méta-science, celle qui les "contrôle" toutes.

    Un point intéressant est que le mot "informatique" n'apparait pas: l'ordinateur (le mot d'après une délicieuse polémique viendrait d'une réunion de normaliens voir (7)) est absent et se comporte comme un spectre derrière tout cela. On se contentera, la chose est trop drôle, de penser à H. dénonçant l'usage de la machine à écrire au groupe de filles et de semi tafioles (comme Ernst Nolte) qui assistaient à son fameux cours (j'en ai la larme à l'oeil, ach Stalingrad) de l'hiver 42-43. Une génération d'allemandes qui allait, mais c'est sans doute à cause des viols systématiques commis par les russes lors du printemps 45, dénoncer le machisme dactylographique et donc la technique pendant le reste de l'histoire. 

     

    Le Golem 

    D'abord l'inventeur du Golem, le "Maharal" de Prague, contemporain de Salomon Louria (ou Luria), le "maharshal". 

    Louria, postérieur au renvoi des juifs d'Espagne voit le monde comme séparé de Dieu qui ne lui laisse que peu de place, et composé par les vases brisés par la lumière: il faut rassembler (c'est le "Tikun") les morceaux épars de ces vases.  Les deux mythologies n'ont l'air de n'avoir rien à voir avec le sujet: on a pourtant les robots, et l'organisation manuelle de la réconciliation du monde... Les robots c'est l'informatique, et le Tikun l'organisation... 

    La Cybernétique

    Deux aspects de la cybernétique. D'abord le principe de rétroaction, archi connu, mais pas tant que  ça. Il a 4  phases, deux d'information, deux d'action: le but et le retour, l'action et sa correction. Il fallait le dire et cela fait tout le système.

    Ensuite que le principe s'applique en principe partout: de la cellule au gouvernement mondial. Cette totalisation totalitaire est sans doute un point faible. Et puis la cellule c'est pas ce qu'on croit: je la verrais moi plutôt comme bien plus compliquée, formée de l'enchevêtrement de systèmes indépendants en équilibre, héhé, je suis nationaliste et adepte de la guerre de tous contre tous, plutôt. 

    On retiendra le "la victoire de la méthode sur la science", de la part de celui qui disait que la science ne pensait pas, tu parles, elle ne fait que s'organiser et la pensée sociale (Latour est tu  là?) la décrit même comme ne faisant que cela. Tout comme si la déploration de H. était prise pour argent comptant et prise en compte comme ontologie (héhé, elle est pas mal celle là); tout comme le vaincu (la cybernétique a décodé les codes SS, calculé la bombe atomique et organisé le débarquement) qui se plaint du manque de sportivité de son vainqueur, bien mieux outillé. 

    Un point intéressant est la considération des machines automatiques égales aux êtres vivants. H. n'a pas le robot pensant en tête, comme quoi cette fiction peu philosophique, n'a vraiment pas de sens: la vraie réflexion se concentre bien sur sur le vivant et le gouvernable. D'ailleurs et c'est aussi une merveilleuse découverte dans ce texte: "organisation" c'est bien sur l'organisation du vivant lui même et la vraie métaphore est bien celle du corps qui s'identifie à la société, et pas celle du "cerveau artificiel". 

    Le management

    Mais le monsieur a bien d'autres idées...

    D'abord, il renverse trois lieux communs archi connus et que je ne partagerai plus: d'abord la  nature "originale" de la révolution de l'information qui n'est en fait que la continuation de la seule grande révolution, l'industrielle, ensuite que le management n'est pas meilleur (plus cool) depuis Taylor qui l'a inventé. Le coaching n'est qu'une manière de fouetter charlot et ses clés à molette... Pour finir que le capitalisme c'est la recherche du gain, alors que le management c'est la recherche de l'efficacité, pas de complot ultra libéral capitaliste là dedans; mieux, H. est formel, la technique et donc le management a absorbé et dépassé le capitalisme ! 

    Ensuite, il crache le morceau et cela est essentiel: les techniciens de l'humain à l'ère moderne, 20% des édudiants se forment au management, et on ne compte pas les psychologues, les "RH" (le mot et la fonction, fut inventée dans les années 80 pour pallier l'incapacité des chefs du personnel à virer des électeurs déçus de Mitterand) ou les assistantes sociales, bref bien plus de la moitié des travailleurs ne produisent pas mais regardent produire  dans le cadre d'un déploiement omniprésent du ... management.  Mieux, on les entraine à "orienter les désirs", à  stimuler les travailleurs et à les manipuler pour  les impliquer. 

    ll est prof de management en plus d'être philosophe, et tout cela (le management bien sur) se fait au nom de principes et de théories qui ne sont pas explicitées, d'où la philosophie, ah qu'elle est belle. 

    J'avoue être un peu surpris par l'ampleur de la charge, l'identification technique/management étant bien tentante, mais hélas un peu trop unificatrice, car il y a la science là dedans. Même si le social (la technique futile et le management) peut paraitre entièrement subverti, on ne peut nier que le technique mécanique pur fut, comme marche pied, le support des développement expérimentaux qui validèrent la physique moderne. Tout imprégnés de la métaphysique d'un langage qui devait être adjoint à TOUT le réel, ce qui n'est pas le cas, les philosophes originaux, tout en gardant leur capacité à saisir l'essentiel, doivent admettre que le savoir est dépendant de la technique, tout comme la victoire à la guerre et la prospérité collective. C'est le noeud du problème et la défaite du vieux nazi boche (tous les nazis ne sont pas boches) sur le terrain et dans les cerveaux, n'en déplaise aux contempteurs de la cybernétique, fut patente.

    Il y a pourtant chez Rappin une critique radicale extraordinairement convaincante et puissante car tapant sur l'efficacité de la méthode du feedback. Dans la boucle de rétroaction, on prélève l'information du réel et on s'ajuste dessus. Au deuxième tour de roue, le réel a disparu, et se trouve remplacé par la modélisation qui solitaire, continuera de tourner. Parlez de vos problèmes d'hémorroïdes en entretien le premier jour et vous voilà pour la durée de votre contrat astreint d'en démontrer la réduction à chaque période. La modélisation est fonctionnelle et se trouve ainsi engagée dans la conduite. Comment  recaler ? Rappin veut-il proposer sa propre méthodologie. Si le management est un sophisme, c'est bien qu'il y a autre chose. 

    La technique

    Il n'empêche, et ceci doit être considéré, que certains considèrent le quantique comme phénoménotechnicisé. La technique après la logie: on ne comprendrais rien sans la technique, l'oscilloscope a remplacé le cerveau pour appréhender le monde. L'argument est d'ailleurs donné à de multiples reprises contre Kant, soit disant maintenant dépassé par la relativité: ses formes a priori de l'espace et du temps seraient maintenant démodées et obsolètes.

    Je considère cette considération comme un ânerie et une fausseté et cela pour en affirmer le contraire exact, car ce sont bien les appréhensions originelle de Kant qui sont utilisées pour modéliser, théoriser, décrire et prévoir ce qui est précisément, et c'est le fondement du monde, paradoxal, subtil et étrange et ainsi à notre portée nous les hommes avec très exactement les intuitions basiques des singes originaux que nous sommes, toutes développées dans les arbres au service de notre gloire et de notre puissance ! Même chose pour la techno science, ah le mot étrange à la fois vrai et faux, vrai car c'est bien la technique qui confirme nos intuitions (oui, bande de singes, nos intuitions!) mais ce n'est pas, et non, la technique qui nous domine voire qui se "déploierait toute seule".

    Encore une fois, le contraire de l'intuition heidegerro-bernanosienne doit se manifester: le technique est empirique et issue de la pensée car à la fois symboliquement organisée et donc soumise aux interdits de la logique, mais aussi fondamentalement faible car conçue agissante à l'extérieur de l'homme. C'est sa faiblesse dont il faut se plaindre, pas de sa puissance ! 

    Ainsi, et là j'avoue en être content, identifier technique non pas à la science mais à son écho organisationnel et mondain, parfaitement non scientifique en fait, et cela malgré tous les scientismes. PNL, AT et autres hypnoses énnéagrammatiques n'étant que des distractions pour employées incompétentes adeptes de sectarisme.  Surtout que c'est tout le "management de la recherche" qui étouffe les scientifiques avec des formulaires. Quand donc se révolteront-ils? 

    On peut alors se déclarer heideggerien, son antisémitisme pouvant rester mondain (et donc anodin)  et ne manifester qu'un légitime refus de pratiques obligatoires agaçantes (les standup meetings, les réunions  en anglais). 

    Car la lutte contre les sophistes est de tout temps, et ce n'est pas parce qu'ils ont beaucoup d'influence à une certaine époque qu'ils doivent gagner toujours. Il y a un vrai savoir dans les recherches sur la grande unification, et sur les théorèmes concernant le calcul distribué et la preuve de théorème: rien à voir avec les cures dents connectés des startups débiles qui ne créent que des "boulots de merde". 

    Bien des indices montrent en fait les limites du "management": croissance faible, incroyables échecs techniques dans les domaines clé: constructions d'EPR, projets informatiques de paye des fonctionnaires, total déséquilibre des comptes des hôpitaux: partout de très étranges failles montrent que  les méthodes enseignées (à moins que lui et ses pairs n'aient déjà saboté la chose) ne fonctionnent pas aussi bien qu'elles le devraient. Nous en sommes peut être déjà à une recherche d'efficacité comparable à celle qui agitait le XIX siècle rural ou même la Russie communiste juste avant la chute du mur... Le technique est profondément faible, encore une fois. 

    On en vient alors au politique (esprit de Macron montre toi!) : le management est multiculturel, antinational, pacifiste et cela intégralement et absolument. De quoi faire et nous y sommes: on en peut plus et tout cela finira mal, le contrôle de tout cela nous ayant échappé. Car les résultats sont pitoyables, et cette notion du management explique  sans doute l'incroyable incapacité à se réformer des grandes organisations qui s'y sont abandonnées: partout des grands groupes industriels en déclin, réduit à consacrer leur capital en décroissance à acheter des petites entreprises, à qui on promet, pour ne pas faire fuir leur seule valeur, les hommes qui y travaillent, de ne surtout pas leur appliquer les "process" débiles qui ont vérolé tout le reste de la superstructure. 

    Les lamentables simagrées RH des grandes entreprises, leur multiculturalisme délétère et énervant suscite bien des résistances, implicites à défaut d'être explicites. La motivation chute et la critique du management faite ici montre bien que le macronisme entreprenerial, startupperiste et openspaciste, bref, ce qui a bercé les annéees 2000 est déjà ringardisé, en tout cas, il est et doit être combattu. Le dégout se pointe. Cela remet-il en cause les vrais savoirs, les vraies coopérations, les vrais sentiments fraternels basés sur les vraies communautés ?  Bien au contraire, et une belle critique comme celle là nous met du baume au coeur, on avait eu raison de ne pas céder au superficiel. Vive Platon: car le simulacre bien qu'envahissant n'est jamais qu'une preuve  de l'existence du réel ! 

     

    Les nouveaux hippies

    On peut par contre, tenter de faire des remarques générales sur l'attitude induite par ce point de vue, puissant et organisé (héhé). Hors de la précieuse et documentée description d'un monde qui cesse donc d'être mystérieux et on peut en être vraiment reconnaissant, il y a bien sur au premier degré la haine totale de notre monde dont je suis partie prenante au moins en partie. Cette haine se déploie sur la partie droite de l'échiquier, voire même plus  loin, avec certaines dérives mues par certains ressentiments. 

    Bien qu'il ne s'agisse pas, bien au contraire, de démotiver le populo, Billancourt et ses rameurs se devant d'être managés convenablement jusqu'à la victoire finale, et je veux toujours les couilles de Macron sur la table, on pourrait faire la remarque que l'eau du bain contient un bébé et que Heidegger n'est pas occidental. Son indo européanisme est en fait un peu trop ancien, pour tout dire manifestement antérieur à son arrivée en Europe depuis des confins asiates dont l'effroyable barbarie sylvestre nous dégoute depuis sainte Geneviève.

    Qu'il y retourne lui et son être gothique, je ne pardonnerai jamais la trahison des germains à Alésia. 

    Mais là n'est pas la question, le monde a basculé et les courants réactionnaires phosphorent et prennent le lead culturel dans l'ombre, ce qui va changer le monde. De jeunes chevelus boivent des coups en déplorant dans les arrières salles la vilainie de l'univers, qui se trouve ainsi réformable au moins dans l'avenir. Enfin, chevelus: en matière capillaire Rappin suit le courant de Foucault (elle est pas bonne celle là?).

    En tout cas, il faut tenter quelque chose: "saboter le trafic" disait Benjamin (un dissident). Vient alors face à cette puissance infinie et omniprésente (là il me semble qu'on surestime Macron), la nécessité de l'anonymat, seule solution pour échapper aux trop puissantes boucles de rétroaction prête à tout ramasser. Le "discours de haine", donc, serait bien la seule solution... 

    En tout état de cause, on a une espèce de trotskysme: tous opposés évidemment à l'engeance majoritaire on est toute une communauté à la conspuer jour et nuit sans que cela ait un quelconque effet sur la réalité. Exactement comme la lutte contre le capitalisme, exclusive occupation d'une classe sociale entière dont d'ailleurs l'inefficacité et le hors de propos total ne l'empêche pas d'exister, avec sa presse et son économie, et de traverser toutes les chutes des murs, et toutes les crises financières maitrisées. Faut il basculer chez les cons rassemblés et se frotter de culture en n'ayant à l'esprit que l'avenir (ou le passé) d'un être obscur qu'on est de toutes façons incapables de penser ? Et bien, non ! Ma totale solitude ne se résoudra pas par l'intronisation dans des organisations qui d'ailleurs m'ignorent. 

     

    (1) http://www.juanasensio.com/media/02/01/2510517559.pdf

    (2) http://www.juanasensio.com/archive/2016/04/06/heidegger-et-la-question-du-management-baptiste-rappin-francis-moury.html

    (3) http://cerclearistote.com/au-fondement-du-management-theologie-de-lorganisation-entretien-avec-baptiste-rappin/

    (4) http://www.fondation-prometheus.org/wsite/publications/newsletter/octobre-2016/entretien-avec-baptiste-rappin-lhegemonie-du-management/ 

    (5) le wordpress de l'auteur: https://baptisterappin.wordpress.com/

    (6) la vraie histoire du mot "ordinateur" https://www.laviemoderne.net/detox/39-deus-ordinator

    (7) tout sur le management:  https://journals.openedition.org/leportique/2809 

    P.S.

    Puisqu'on parle d'Asensio: https://www.youtube.com/watch?v=hdA6cla0sKc

    est bien plaisant. 

    (8) Un interview complet radiophonique de Rappin  sur méridien zéro https://www.youtube.com/watch?v=r33OPqeEruo